"Ah quand même..."
Elle allait peut-être rester ici en fait. La dévotion pour elle, c'était pas trop son truc.
"Attendre l'autorisation de Micha ? Tu l'as vu avec toi avant de te laisser monter ? Je suis pas certaine qu'il se montre facile à convaincre. Même le Guérisseur est plus souple. Mais j'ai hâte de venir et te voir forcé au repos. Ce serait bien une première. Et une alerte sur ton état pour que tes soldats prennent le risque de te confronter."
A propos de sa jeunesse, elle sentait bien combien il essayait de la convaincre de sa valeur. Il l'avait toujours fait, depuis le début, alors qu'elle ne comprenait pas ce que le Commandant de la Garde trouvait à une gamine grise coincée.
"Je crois qu'il vaut mieux laisser les fantômes où ils sont. Mais je sais que je peux toujours compter sur toi."
Parfois, elle se disait que si elle recroisait sa route, elle serait encore terrifiée. Malgré son Don, malgré Ezarell. Malgré Beltran.
Même si ce dernier savait lui changer les idées alors qu'il lui promettait de la divertir. Elle se trémoussa un peu - en grimaçant d'inconfort. Beltran lui avait manqué, et à tous les niveaux, même si elle rougissait d'y penser. De toute évidence elle aussi.
"Oh, j'ai hâte de voir ça..."
Même si dans leurs états, ils ne seraient pas capable de grand chose. Il en fallait au moins un de valide. Comme la fois où il était rentré du front blessé au même bras, elle n'avait pas encore son uniforme blanc à cette époque. Elle avait alors... pris les choses en main. Ça, ça avaient été de belles retrouvailles.
Beltran avait toujours été... sentimental avec elle, comme dirait Méra (si elle était polie). Il lui déclara l'aimer avec une telle passion que Mina en fut embarrassée.
Puis il mit alors l'accent sur ce qu'il n'attendait pas d'elle, et elle fut heureuse de l'entendre, même si elle n'en doutait pas. Elle ne répondit rien à ce sujet, pour le moment.
"Le culte ? A vrai dire je n'en sais rien. Je n'en pratique aucun."
Gamine, Mina s'était toujours tenu loin du temple, au cas où son père ait soudainement envie de l'y enfermer.
"Aanor me semblait bien parce que c'est à cause d'elle, enfin grâce à elle, que l'on s'est connu."
Si on lui avait demandé de trouver une idée pour fêter la fin de la menace que représentait Cerath, c'est pas à son mariage qu'elle aurait pensé mais bon...
"Oh, je crois que j'ai assez conscience du genre de mariage que voudrait organiser la mère d'un Héritier d'un domaine comme le tien." elle soupira. "Je suis prête à sacrifier une journée pour ça, te promettre de t'aimer, sourire un peu devant des tas de gens, même si je crois que je ne préfère pas savoir à combien de personne tu penses, danser un peu et voilà. Parce que pour le reste, puisque tu parlais de rôles dans notre couple, tu peux effectivement être sûre que je suis une Héraut, et pas une Dame. N'attend pas de moi que je sois une Dame comme ta mère, où ses ancêtres féminines. Même si tu sais tous ça, je veux que ce soit clair. Je ne passerai pas mes journées dans un boudoir à écouter des bardes, je n’aurai pas, Grands Dieux ! de dame de compagnie. Je ne passerai pas des heures avec une camériste à m’habiller pour parader et à faire des ronds de jambe. Quant à la politique, ne compte pas sur moi. Je suis une Héraut militaire, pas de palais."
La politique, c'était le domaine d'Alem et Aenor, et surtout pas le sien.
Le sujet de la descendance troubla Beltran bien plus qu'elle ne l'aurai cru. Et sa réponse lui tira un soupir de soulagement.
"On m'a fait comprendre que c'est le rôle qu'on attend d'une femme, même si elle n'est pas... conventionnelle. Comme je ne veux pas que ce sujet nous explose au nez dans quelques années, je préfère l'anticiper. Et nous sommes d'accord, donc, tout va bien."
Faire un enfant dans leur position, c'était prendre le risque de faire un orphelin. Et ça, Mina ne préférait pas l'imaginer.
"Liane est venu me voir en effet... J'étais avec Fitz, il ne t'en a pas parlé ? J'ai oublié de la ménager quand je boudais dans mon coin. J'espère qu'elle me pardonnera, tu sais que je l'aime. Parce qu'en plus je l'ai dénoncé à ton cousin, elle ne tenait pas du tout ses dons en place et diffusait vers tout le monde."
Là, un bâillement l'interrompit, et la fatigue lui tomba dessus brutalement.
"Je te préviens, j'ai tendance à m'endormir d'un coup en ce moment. Et comme je n'ai pas envie de me réveiller seule en regrettant de ne pas t'avoir dit au revoir, laisse-moi le faire maintenant."
Comme elle le put, elle se pencha vers Beltran pour poser ses lèvres sur les siennes. Elle aurait aimé avoir l'énergie de l'embrasser avec plus de passion, mais ses paupières s’alourdissaient déjà.
Quand le baiser prit fin, elle se laissa retomber sans grâce mais sans douleur sur les oreillers dans son dos, ferma les yeux et s 'endormi en moins de dix secondes.