Bien, les filles restaient concentrées, et malgré quelques moues à la vue des lapins, la plupart semblaient quand même vouloir continuer à apprendre. Il commença à fouiller sous le meuble en acquiesçant à chaque réponse donnée.
« Bien, viser le nez est une excellent idée. Tal vous avez particulièrement raison pour les doigts, un doigt qui traîne est très facilement cassable surtout si il est plaqué contre une surface dure. »
Le professeur continuait à fouiller en continuant son exposé.
« Irmingarde, vos doigts sont assez pointus pour des yeux, pour peu que vous ayez le courage de les mettre à l’intérieur. Mais oui les yeux sont une cible facile, et comme dit Saskia, si vous n’avez pas d’objets pointus, des pierres ou du sable fera parfaitement l’affaire, vous laissant le temps de vous redresser et d’adopter une nouvelle stratégie. »
Il se redressa ayant visiblement fini sa fouille archéologique dans le fond de son établi.
« Feuille tu as raison aussi, les articulations en général font une cible de choix. Elles sont indispensables au bon fonctionnement de tout être humain. Un coup bien placé dans un coude qui se retourne, ou un genoux, rendra la poursuite de votre adversaire nettement plus difficile. Mais il faudra pour cela pouvoir frapper avec suffisamment de forces »
Il prit un des couteaux, attrapa un lapin par les pattes arrières, le tendit devant lui, et d’un coup sec l’ouvrit en deux, du cou jusqu'aux pattes arrières. Le geste était sur, mais il avait pris le temps pour que ses élèves puissent bien voir le mouvement. Il n’avait pas appuyé trop profondément, juste assez pour que l’animal s’ouvre sans endommager l’intérieur.
« Pour ce qui est de l’animal, je me doute que cela sera difficile pour beaucoup d’entre vous. Mais être végétarien est un luxe que vous ne pouvez-vous permettre en temps de guerre j’en ai bien peur. Et un collet pour lapin ne sera jamais assez important pour piéger un ennemi, mais je vous enseignerai aussi à poser des collets cela sera utile. »
Il plongea rapidement sa main à l’intérieur du cadavre de l’animal, en sortant avec dextérité toutes les parties molles. Montrant à chaque fois le geste et ce qui sortait de l’animal à ses élèves d’un jour. Et vérifiant aussi à chaque fois qu’aucune d’entre elles n’étaient en train de tourner de l’œil.
« Vous devez apprendre avant tout à les vider, Feuille a mentionné l’âge de la viande qui pourrie vite, elle a raison, mais il y a aussi le fait que tout n’est pas mangeable dans l’animal, et il serait idiot d’avoir survécu à l’ennemi, et de mourir car vous avez attrapé une saloperie en mangeant un truc avarié vous ne trouvez pas. Vous devez apprendre à vider son estomac, ne pas manger les abats, savoir n’en laisser aucune trace pour ne prendre aucun risque. Je sais que c’est assez dégoûtant, mais autant commencer par cette partie de la survie, comme ça on n’y reviendra pas.»
Il avait vu des soldats bloqués par la courante car ils avaient bouffé des animaux crus sans préparation, il préférait épargner cette image à ses jeunes recrues.
D’un geste précis, il étala les boyaux sur la table, et sorti quelques petits os qu’il mit à son tour devant lui. Puis il déposa le reste du lapin juste à côté. Parfois Fitz se disait qu’il aurait pu être chasseur de papillon à son compte, ou compteur de nuage, au lieu de ça il dépeçait des animaux devant des jeunes femmes, certaines n’ayant même pas encore vu le loup…. Et cette fois il ne pensait pas aux animaux.
Et alors qu’il continuait de parler, sa lame se glissait avec précision écartant la peau et la fourrure de la carcasse.
« Vous avez toute raison. Les os font une superbe arme de secours, petits, que l’on peut facilement taillés, utilisés comme projectiles, dans les yeux de votre victime comme suggéré par Irmingarde tout à l’heure, ou simplement comme pièges, ils peuvent vous sauver de situations délicates quand vous n’avez aucune arme à portée de la main. La fourrure et la peau comme vous dites, peuvent protéger certaines de vos extrémités du froid. On ne pense que rarement à protéger ses doigts et ses orteils, c’est l’erreur principal des gens acculés et seuls en forêt. Et entre vous et moi, il est plus évident de vider et dépecer un lapin, que de devoir vous découper vous-même un bout d’orteil à cause d’une engelure mal ou pas soignée. Enfin après c'est votre choix... Si vous préférez les lapins à vos extrémités je ne peux pas vous en empêcher. »
Du bout de son couteau il désigna les boyaux.
« Mais vous avez oublié l’élasticité et l’intérêt de ces restes. On ne pourra pas en faire un arc avec, il faudrait tuer un animal bien plus gros que ça Irmingarde, pour l'instant on se contentera de chasser le lapin, mais des boyaux bien vidés, peuvent vous servir pour nouer des pièges, poser des nouveaux collets, remplacer de la corde dans certains cas, vous pouvez même justement les utiliser pour vous aider à projeter les os de l’animal. La seule limite reste et restera toujours votre imagination. Par exemple, prenez le crâne du lapin, et quelques petits os, accrochez les à un boyau à l’entrée de l’endroit où vous vous cachez, assez proche pour en entendre le bruit, si vous préparez bien votre piège, le bruit des os qui s’entrechoquent vous permettront de savoir quand une personne tente de s’introduire.»
joignant le geste à la parole, il noua avec dextérité plusieurs petis os à l'estomac de l'animal, les faisant teinter joyeusement.
« Des boyaux peuvent vous servir à pendre et cacher certains objets en hauteur à l’abri de certains animaux. Ou même de vos ennemis. Autre exemple, un lapin que vous venez juste de tuer, encore chaud, peut réchauffer rapidement vos mains pour peu que vous les mettiez dans son cadavre. La graisse quant à elle… Et bien oui en théorie cela peut alimenter un feu, mais cela lui donnera une couleur facilement reconnaissable, et provoquera une fumée que l’on préfère généralement éviter en territoire ennemi, par contre la graisse est très pratique, en l’appliquant sur une brûlure, ou une blessure suintante, elle calme la douleur, et facilite aussi la cicatrisation.. Et si vous avez un peu de courage, vous pouvez même l’enflammer à même votre peau pour vous permettre de cicatriser une plaie béante. »
Il déposa le couteau, et la peau devant les jeunes femmes. Récupéra un chiffon sous l’établi, et commença à se laver les mains.
« Bien vous avez chacun le vôtre, montrez-moi donc comment vous ouvrez cet animal. Ne vous inquiétez pas, vu leur état ils ne devraient pas vous mordre. Par contre les cuisines étaient censé les servir au repas de ce soir, donc si vous pouvez ne pas trop les massacrer, sinon les cuisinières vont me tomber sur le râble, et j’ai peur que ce ne soit moi le menu de ce soir. Pendant ce temps-là je vais préparer les éléments pour apprendre à faire un feu. »
Et alors qu’il se penchait pour récupérer des éléments sous sa table, il se redressa subitement jetant un regard à Irmingarde.
« Et je préviens que pour l’atelier suivant on ne triche pas »