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Artisans d'une alliance [Kateerid/Micha]

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Kateerid de Girier:
3eme jour de la 4ème décade de printemps 1485

Kate et Micha avait relativement bien organisé les choses.
Ils s'étaient vu un nombre de fois correct, et en public, pour que les langues bien pendues de Haven puissent s'étonner de la persistance de ces rendez-vous, sans trouver ça trop cousu de fil blanc.
Chez les Venelgueste, même le père, pourtant souvent dans les nuages, avait remarqué la régularité des visites de l'héritier des De Girier, sans pour autant arriver à la bonne conclusion, et Ingra, la soeur cadette, avait commencé à poser des questions.

Kateerid n'avait pas répondu à la curiosité de sa petite soeur, pas plus qu'aux remarques sibyllines de ses amies et connaissances. Elle laissait planer le doute en arguant que Micha et elle étaient amis. La jeune femme n'était pas forcément très superstitieuse, mais tant que rien ne serait officiel, elle ne voulait pas tenter le diable.
Cet accord entre Micha et elle était inespéré. Cela l'angoissait mais réglerait tant de problème que cela en vaudrait la chandelle.

Micha et elle avait décidé il y a trois jours que la demande se ferait aujourd'hui, sans préciser l'heure, histoire de conserver un minimum de spontanéité. Après tout, on ne se faisait pas demander en mariage tous les jours !
Accoudée à la fenêtre de sa chambre, au dessus de la boutique, elle attendait de la voir apparaître, se donnant des airs de demoiselle amoureuse. Elle était toujours bien habillée, quand elle n'était pas dans son atelier, mais aujourd'hui, elle avait fait un effort sur sa coiffure, et avait choisi de mettre une chaîne et un pendentif en or, création De Girier.

Derrière son expression assez neutre se battaient deux sentiments. Une légère angoisse, et un certain ennui. Kate n'avait pas l'habitude de regarder passer les heures sans rien faire.

Micha de Girier:
Micha de Girier, habillé d’un de ses plus beaux costumes, considérait sa boîte à bijoux  pensivement. Tout comme sa sœur, il ne paraissait pas en société s’il n’était pas harnaché de la production familiale. Nerveusement, il remit son torque en place, rajusta sa médaille qui était encore partie se perdre dans son dos et choisit quatre bagues qu’il enfila rapidement.

Pensivement, il ouvrit l’écrin qui renfermait une bague de saphir et d’or Fubos. La semaine précédente, il avait fait la démarche de demander à son père des conseils pour la bague qu’il voulait ciseler pour Kate. Ç’avait été la première fois qu’il parlait directement de ses projets matrimoniaux à ses parents. Ils s’en doutaient, bien  sûr. D’ailleurs, dès qu’il avait commencé à s’afficher avec Kate, ses parents avaient cessé leurs manœuvres de marieurs, laissant leur fils aîné mener sa barque lui-même. Drôle de sensation d’être le premier de la famille à choisir qui il épouserait depuis quelques générations. Ses parents n’avaient pas eu le choix, Isabeau avait accepté le choix de leurs parents, Sertan et Mamie aussi avaient vécu un mariage arrangé… Son mariage ne serait certes pas un mariage d’amour, mais il avait choisi Kate, lui.

Le jeune homme referma l’écrin d’un mouvement vif. Bon. Il était temps d’y aller. Il n’était pas correct de faire attendre sa presque fiancée de la sorte. Il arrangea son chapeau et descendit dans l’entrée de la maison De Girier d’un pas vif. En bas, il croisa sa mère, manifestement émue. Sans un mot, elle lui passa sa cape légère, lissant le tissu affectueusement. Le silence s’étira un instant.

« Kate est un très bon choix, mon fils. »

« Merci, Maman. »

Micha enlaça sa mère puis sortit. Devant la maison l’attendait son cheval. Il enfourcha et parcourut les quelques rues qui le séparaient de la maison Venelgueste. En arrivant dans la rue, il leva les yeux vers ce qu’il savait être la fenêtre de son amie. Il croisa son regard, lui envoya un sourire amusé puis la salua dans une grande envolée de chapeau. Puis il démonta et confia sa monture à un commis des Venelgueste. Il prit une grande inspiration, puis frappa au domicile de la famille. Quand le majordome ouvrit, il lui confia sa carte en précisant :

« Bonjour. Je suis Micha De Girier. J’aimerais m’entretenir avec Mr Venelgueste d’une affaire privée. »

Conteur:
Quand le majordome vit qui se tenait sur le porche, il comprit immédiatement de quoi il retournait.
Les rumeurs allaient bon train depuis quelque temps, parmi les serviteurs. On avait vu mademoiselle Kateerid et sieur Micha ensemble trop souvent pour que cela ne débouche sur rien. Des paris avaient été pris et chacun attendait maintenant de voir qui allait décrocher le gros lot. Et d'après ce qu'il voyait, ce serait lui.
Ce fut donc avec un sourire satisfait qu'il allait prévenir les maîtres de maison, après avoir installé le jeune homme dans le bureau de sieur Venelgueste.

À son arrivée, Capser lança un regard incertain à sa femme. Il n'était pas certain de comprendre pourquoi le jeune De Girier souhaitait le rencontrer. S'il s'était agi d'horlogerie, Micha aurait demandé sa femme.
Laeallas lui fit signe d'y aller. Elle lui emboîta le pas. Elle ne pouvait décemment pas laisser son mari seul dans cette situation. Il risquait de faire une bourde. Encore.

Capser entra dans le bureau et serra la main du jeune De Girier avant d'aller s'installer à son bureau. Laeallas entra à son tour, mais resta près de la porte, silencieuse pour le moment.

«Que me vaut l'honneur de cette visite, sieur De Girier? Puis-je vous faire servir à boire? J'ai une excellente eau-de-vie qu'on m'a vendue à prix d'or. Et elle vaut bien cet argent.» Il désigna une desserte en acajou dans un coin de la pièce. «Ou peut-être quelque chose de plus léger? J'ai une liqueur de fruits rouges absolument délicieuse.»

Kateerid de Girier:
Enfin, parmi la foule habituelle du quartier, Kate aperçut un charmant cavalier élégamment vêtu. Elle pensa à le siffler, mais en public, ce serait terriblement mal vu, une jeune femme ne sifflait pas un homme, trop vulgaire !
Malgré elle, son ventre se serra d'anticipation. En jouant à l'amoureux avec son chapeau, Micha la fit rire de bon coeur, puis elle disparu de la fenêtre pour aller écouter depuis le pallier de sa chambre.
Ce n'était pas très distingué non plus, mais elle ne voulait pas rater ça.

Elle entendit clairement la satisfaction dans la voix du Majordome, et attendit de voir passer ses parents. Comme elle s'y attendait, sa mère était de la partie. Normalement, c'était une affaire qui se traitait "entre hommes", mais il était plus sûr que sa mère puisse gérer cette demande, elle avait les pieds sur terre.

Avec une extrême précaution pour ne pas faire craquer les lattes du parquet, Kate traversa le pallier sur la pointe des pieds afin de rejoindre l'espèce de boudoir qui se trouvait au dessus du bureau. Elle savait, comme son frère l'avait su, ainsi que sa soeur, que le bureau partageait avec cette pièce une canalisation commune qui permettait d'écouter ce qu'il s'y passait pour peu qu'on colle son oreille sur l'endroit où le tuyau était le plus fin.

Mais surprise! Ingra avait eu la même idée, et Kate fit l'étonnée:

"Espèce de fouineuse curieuse, qu'est-ce que tu espères entendre?!"
"D'après toiii..." chantonna sa petite soeur.
"Va-t-en de là, c'est pas une affaire qui te concerne!"
"Hors de question, je veux être aux premières loges, depuis le temps que j'attends ça! Cachotière, tu auras pu me le dire à moi!" se révolta la jeune fille.
"Pour que tu le répètes à tout va? Tu es incapable de garder un secret! Surtout un de ce genre-là."
"Pfft, quelle confiance dans ta propre soeur, tu ne connais pas!"
"C'est justement parce que je te connais que je ne te fais pas confiance sur ce point. Bon, je vois que tu ne décolleras pas de là, et j'ai pas de temps à perdre. Pousse-toi un peu de là qu'on partage le tuyau, je te rappelle que j'ai un peu la priorité !" concéda Kate.

Ingra eut un grand sourire victorieux et lui laissa une place pour qu'elle place son oreille contre le tuyau.
Le rendu n'était pas vraiment très clair, mais on comprenait l'essentiel. Et elle comprit parfaitement que son père n'avait pas encore cerné la raison de la venue de Micha, comme elle s'en doutait. Sa mère, en revanche, devait être sur des charbons ardents !

Micha de Girier:
La réaction surprise de l'artisan pris Micha de court. Ils s'étaient affiché ensemble des mois durant et quoi? Capser Venelgueste ne se doutait de rien en voyant débarquer tirer à quatre épingles le jeune homme qui  fréquentait sa fille? Pourtant il y avait eu des potins sur eux. Où la réputation de joli cœur de Micha était telle que Capser n'y croyait pas? Un peu perdu, il chercha le regard de l'autre personne de la pièce, Laeallas. Elle, elle avait l'air plus sérieuse, plus déterminée. Le sourire satisfait du majordome revint en mémoire de l'orfèvre. Non, c'était bon. Les gens savaient. Juste, Capser Venelgueste était... Capser. Il n'avait pas inventé l'eau chaude et chacun savait que c'était sa femme qui tenait les rênes de la maison.

Le jeune homme raccrocha un sourire sur son visage, accepta la liqueur de fruit rouge et se lança:

"Et bien, je viens pour vous proposer une alliance. Vous savez sans doutes que Kateerid et moi sommes amis depuis de longues années. Récemment, il nous est apparut que l'amitié était une bonne base pour une union heureuse et que nos deux ateliers en sortiraient renforcés."

Sauf dans la cours à ces demoiselles, Micha était un homme direct. Inutile de tourner autour du pot. Il prit une grande inspiration et précisa:

"Je viens donc vous demander la main de Kateerid Venelgueste, votre fille."

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