Justina n'avait pensé qu'à mettre les villageois en sureté, ceux qui avaient voulu la suivre, elle et le guérisseur. Ce n'était qu'une fois arrêter par une patrouille qu'elle avait réalisé qu'elle ne reverrait sans doute jamais Rethwellan. Elle avait eu du temps, ensuite, pour réfléchir à son avenir. La frontière lui était maintenant fermée, mais elle se rendait compte que ce qu'on lui avait demandé de faire ne lui avait laissé aucun autre choix. Elle ne pouvait pas cautionner ce genre d'actes barbare. Son pays ne l'était plus, souiller par tout cela, elle se souvint des rumeurs qui courraient sur la disparition de l'Épée, sur le fait qu'elle n'avait, en vérité, jamais chanté pour l'oncle du prince. Elle était restée dans l'armée malgré les rumeurs, parce qu'elle se battait pour protéger des innocents de bandits et autres truands du même acabit. Jusqu'à la guerre, elle avait toujours su où était son devoir, où était le bien...
Avant la guerre, Valdemar avait toujours été décrit comme un allié, elle avait adoré les contes de ce pays, avec les Hérauts et les compagnons, surtout ceux qui concernaient Kerowyn Veris. Maintenant, elle ne savait plus ce qu'elle devait croire, sinon qu'elle espérait sincèrement que les contes de son enfance avaient encore un fond de vérité. Elle en était là dans ses pensées quand la patrouille les guida dans un camp, si semblable à ceux où elle avait dormit ses dernières décades, sauf que tout était en bleu.
On la mena vers un homme de grande prestance, habillé comme un noble qui la dévisageait d'un oeil presque espiègle. Elle ne se gêna pas pour lui retourner son regard, restant digne et martiale, son propre regard bleu, bleu comme ceux de certain loup, planté dans celui de l'autre. Son apparence lui disait quelque chose, elle savait qu'elle l'avait déjà vu, mais le chef de patrouille les présentait déjà. Elle s'avança donc à l'avant du groupe, elle était responsable de leur sécurité et de leur fuite, elle se devait de l'assumer. Saluant l'homme comme elle l'aurait fait d'un officier supérieur, poings sur le coeur et courbant le dos.
« Je suis Justina Alera, ancienne écuyer du Chevalier Jullianyo Saren et voici des hommes, des femmes et des enfants qui ont été attaqués par les hommes même qui avait charge de les protéger sur l'ordre du Régent pour ne pas avoir envoyé leur enfant, frère, mari ou père se battre contre vous. Jugez-moi pour avoir cru faire mon devoir, mais offrez leur au moins l'asile, car ce sont des civils innocents.»
Elle ne savait pas ce que serait son avenir, elle espérait sincèrement pouvoir trouver un nouveau but dans sa vie, maintenant qu'elle avait réduit à néant son destin à Rethwellan. Elle ne voulait pas se battre contre ses compatriotes, mais elle comprenait maintenant qu'ils faisaient fausse route autant qu'elle l'avait fait. Pour autant, verser le sang de ses anciens camarades lui répugnait et elle doutait qu'on lui fasse suffisamment confiance pour qu'elle puisse conserver ses armes, peut-être même lui confisquerait-on Patience, ça plus proche amie et la monture qui l'avait fidèlement servi depuis qu'elle lui avait été donnée. Pour autant, elle espérait pouvoir gagner suffisamment leur confiance pour entrer dans la Garde et défendre les routes contre les brigands ordinaires. Elle savait au moins faire cela. Si ils avait accueilli les princes de Rethwellan, il y avait un espoir pour qu'il l'accueille elle.
Il se présenta alors, Rafael, comme un réfugié politique, puis ordonna que les villageois soit amener et nourris. Ina laissa les villageois être amener, soulager qu’eux au moins serait sauf. Elle n’avait pas entaché son honneur en usant de sournoiserie pour voir ses protégés retourné de l’autre côté de la frontière. Elle reporta alors son attention sur l’homme, qui titillait sa mémoire. Rafael n’était pas un nom Rethwellanais… Elle l’observa plus attentivement, soudain devenu méfiante. Ses manières et son accent était comme le siens, noble, raffiné, plus encore qu’elle ne l’avait jamais été. Cherchant pourquoi elle sentait au fond de ses tripes qu’elle devait découvrir qui il était, ressentant qu’elle allait passer à côté de quelque chose d’important, elle n’écouta pas vraiment ce qui se dit ensuite. Elle resta silencieuse, puis soudain, la lumière se fit dans son esprit. Elle l’avait aperçu une fois, quand elle avait été nommée écuyer, à la cérémonie officielle… le prince Rafalentha!
Alors qu’auparavant elle était ouverte, calme et polie, elle changea du tout au tout, elle devint louve furieuse. Elle ne réussit qu’à grande peine à ne pas empoigner le prince, à ne pas le toucher, s’avançant soudainement vers lui pour être à un cheveu de lui, ses yeux dans les siens, leur visage si proche qu’elle aurait pu lui frapper le crane avec le siens si tel avait été son intention.
« Toi! C'est à cause de toi cette guerre et toutes ses souffrances! Si tu avais pris tes responsabilités on n'en serait pas là! Tu aurais dû prendre l'Épée! Mieux aurait valu un tire au flanc comme toi que l'homme qui dirige notre pays aujourd'hui! »
Elle n'avait même pas conscience d'être repassé à sa langue maternelle, ni que des larmes perlaient à ses yeux, sans heureusement se mettre à couler, tant sa colère et sa détresse devant tout le gâchis de sa vie et de celles des innocents de son pays. Que n'avait-il pas pris ses responsabilités et monté sur le trône?
« Tu veux savoir pourquoi j'ai déserté!? Parce qu'on m'a demandé de battre et piller ces gens avant de les livrer à la justice sommaire des officiers pour trahison parce qu'ils n'ont pas voulu aller se battre sans formation contre un pays qui était notre alliés il n'y a pas si longtemps et qui le serait encore si tu ne nous avais pas abandonné! »
C'était sans doute injuste de l'accuser ainsi, mais toute la frustration, la peur et les horreurs qu'elle avait contenues en elle depuis le début de la guerre s'étaient cristallisées en colère quand elle avait compris qui il était. Ses yeux flamboyaient de frustration, tout son corps était tendu comme un arc et pourtant elle n'avait pas touché au prince, elle avait eu assez de retenues et de contrôle pour ne faire usage que de parole. Elle savait qu'elle n'avait plus aucune chance de recevoir l'asile après son explosion de rage, mais elle n'avait pas pu se contrôler à ce point. C'était tout simplement trop. Les gens de son pays souffraient, versait leur sang parce que l'Héritier n'avait pas eu le courage de monter sur le trône.