« Si, je peux faire un peu mal. Mais pas plus qu’il faut, oui. J’im… immobilise. Je bloque les mouvements… » Elle sourit. Liane était Empathe, et même avec la meilleure volonté du monde, il lui serait difficile de se "battre si y a un méchant". « On peut se battre sans faire mal, avec les mots, l’esprit, pas les épées, tu comprends? »
Pluiechantante doutait que la petite fille comprenne réellement ce qu’elle essayait d’expliquer. Mais cela n’avait aucune importance. Elle s’en souviendrait, et en grandissant, y songerait naturellement.
Alors qu’elle ôtait sa robe, Liane s’inquiéta du sort qu’elle réservait à son déguisement du jour.
« Oui, tu regardes, j’emballe pour prendre la robe chez moi. »
Adapter cette robe lui prendrait beaucoup de temps, mais elle ne doutait absolument pas du résultat. Il lui faudrait se procurer des coupons de soie assortie et de nouveaux galons. Il lui faudrait aussi étudier attentivement les robes de cour pour avoir leur silhouette dans l’œil et être capable de modifier correctement la forme de la sienne.
Liane, enthousiaste, était ravi de l'aider, comme toujours.
« Tu aimes, oui… Moi aussi. »
Alors qu'elle fouillait dans les coffres, Liane s'était précipité, comme magiquement attirée, vers un sac rempli de figurines qui émerveillèrent tant l'enfant qu'elle revint avec un gigantesque griffon dans les bras. Pluie ne sut que répondre à sa demande de conserver l'objet.
« … » Elle réfléchit quelques instants. Cet objet-ci était bien trop encombrant pour passer inaperçu dans la chambre de la fillette. Il faudrait donc négocier avec la nourrice… « Tu cherches un trésor pour la nourrice, oui, et pour ta maman. Comme ça, tu peux garder, je pense… Mais tu fais attention, oui. C’est fragile. Mais moi je prends pas, oui. Pas un trésor pour moi. Trop… dur, immobile. »
Difficile d’expliquer dans une langue étrangère que la petite statuaire déplaisait à Pluiechantante. Elle trouvait cela à la fois kitsch et encombrant. Sans parler de l’aspect légèrement angoissant de ses regards vides pointés en permanence sur soi. Elle préférait les coussins, les couvertures, les mobiles.
Pluie avait été interrompue alors qu’elle ouvrait le coffre, elle regarda donc enfin son contenu. Avec un sourire, elle commença à soulever des coupons de tissus de toutes les couleurs, principalement rouge écarlate et vert intense. Elle mit deux coupons rouges de coté et continua à chercher. Finalement, au fond, elle aperçut du tissu blanc. Avec peine, elle tira une pile de coupon d’un blanc un peu grisé par la poussière.
« Viveplume. J’ai trouvé. J’ai pris aussi du rouge, oui. Pour faire un robe à Lila… et peut-être on peut faire un cadeau à ta maman? »
Elle se redressa et secoua sa chevelure blanchie par la poussière. Elle rassembla la robe et les coupons. Il était temps d’aller faire un peu de couture.
« Liane. On monte, oui. On va coudre. Tu prends tes trésors. On revient, oui, une fois. »