- Ça s'annonce dur... maugréa le jeune homme pour lui-même...
La journée avait pourtant si bien débutée... Debout avant même le milieu de la nuit, il avait calmement quitté la petite clairière où il campait en compagnie d'Elazur. Le tenant en bride, il avait traversé le bois en direction des plaines, saluant la nature vivante et luxuriante qui l'entourait. Certes il pleuvait, mais le son des goutes lourdes qui battaient les feuilles tout autour de lui était particulièrement apaisant... Il emplissait sa tête d'un crépitement qu'on eu cru digne de certaines fêtes de villages, entre les tambours et les artifices... Mais avec la douceur et la mesure propre à cette belle dame nature... Le jeune homme et sa monture ne goutaient à la liberté civile que depuis quelques semaines seulement, et ils ne se lassaient pas de ces moments de calme...
Enfourchant son ami équidé, il avait traversé au clair de lune les plaines en direction de Haven, qui serait leur premier contact avec la civilisation depuis des mois déjà. Ils venaient tout juste de quitter les fronts du Nord de Shonar, et leurs glaciales montagnes qui gèlent jusqu'à l'âme des guerriers les plus valeureux...
C'est donc dans le soleil levant que Kalaïd et son destrier pour seul compagnon arrivèrent près de la noble citée.
C'est à la traversée d'un simple bois que les choses se corsèrent.
Alors qu'il trottait calmement, Elazur marqua un brutal arrêt. Se redressant sur sa selle pour éviter la chute, le jeune homme jeta un rapide coup d'oeil alentour, mais ne vit rien.
- Qu'est-ce que tu nous fais mon grand ? chuchota-t-il en caressant le flanc de son ami. Qu'est-ce que tu as senti ?
Kalaïd le savait, il connaissait sa monture depuis des années déjà. Il sentait le danger qui lui faisait frissonner la crinière et tourner la tête à droite et à gauche. Il n'avait pas attendu plus longtemps pour que sa main glisse discrètement sur le manche de son épée.
Mais rien ne se présentait à lui. Pas un son, pas de mouvement...
Pas un son... Voilà qui était étrange... Pas un son ne lui parvenait, pas même celui du vent dans les arbre... L'air était lourd, l'atmosphère semblait presque chargée d'électricité...
Ne voulant pas rester plus longtemps immobile, il activa sa monture. Il n'eut pas beaucoup de chemin à faire malheureusement. Semblant sortir de nulle part, une dizaine de silhouettes encapuchonnées, vêtues de vêtements amples et noir de la tête aux pieds se retrouvèrent sur le chemin. Ils étaient partout autour de lui brandissant leurs lames et se précipitant vers lui.
Elazur avait vécu un précédent de ce type quelques années auparavant sur un champ de bataille, qui lui avait laissé une balafre d'une vingtaine de centimètres en travers de la mâchoire, et une autre plus discrète sur la partie droite du poitrail. Probablement avait-il ressenti la même oppression que ce jour là... Toujours est-il que la panique s'emparant de lui, il se cabra d'une manière magistrale en poussant un hennissement violent, mélange brutal de peur et de colère. Le premier effet fut de stopper nette la charge des assaillants face aux sabots de l'animal fouaillant l'air.
Cela aurait put être très secourable à Kalaïd, s'il n'avait pas été en train de brandir son épée de la main droite et de sortir sa dague longue de la gauche. Ne pouvant se retenir, le jeune homme roula le long de sa selle, et se retrouva à genoux derrière sa monture qui galopait déjà quelques mètres plus loin...
Se relevant lentement, il toisa ses ennemis du regard, et évalua très brièvement la situation tandis que les hommes en noirs se repositionnaient autour de lui, prêts à faire usage de leurs lames. Ce qui l'amena à une évidente conclusion...
- Ça s'annonce dur... maugréa le jeune homme pour lui-même...
Il n'eut guère le loisir de faire plus d'humour. Deux de ses nouveaux amis se décidant à passer à l'assault, ils se précipitèrent vers lui, assénant chacun un coup de leurs côtés respectifs, l'un en revers et l'autre en coup droit. Agissant par instinct, Kalaïd para avec chacune de ses deux armes, sa dague pointe vers le ciel, et son épée pointe vers le bas. Il n'eut qu'à laisser glisser l'attaque portée contre son épée le long du fil de lame et d'un geste du poignet redresser son arme pour qu'elle vienne se placer dans le creux du cou de son adversaire. La tête encapuchonnée roula rapidement sur le sol... Mais Kalaïd ne la regardait pas. De sa dague, il avait déjà abaissé la lame de l'autre homme, et la coinçait dans la garde de son arme. Dégageant ainsi son flanc gauche, enfonça la pointe de son épée en travers de ses cottes. La silhouette encapuchonnée tomba à genoux tandis que le jeune guerrier laissait sa lame sortir de son corps, et lui assénait un violent coup du tranchant sur le sommet du crâne. Un immonde bruit de craquement se fit entendre, tandis que le sang jaillissait... Avant que le corps n'ait touché le sol, le jeune homme était déjà en garde, la dague en avant, l'épée haute au-dessus de sa tête...
- Ça s'annonce très dur même...