Auteur Sujet: Souvenir de Bleue, Nuance de Grise  (Lu 1142 fois)

Fabuliste

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Souvenir de Bleue, Nuance de Grise
« le: 01 avril 2020, 20:55:17 »

Braden de Bordebure - Officier militaire à la retraite, en charge des nouvelles recrues - Grand père de Dyalwen.

La rumeur court vite à Haven. Encore plus à la Cour.  Il lui fallut cependant bien deux jours pour attendre les oreilles réfractaires aux ragots de Braden.

Comment ça, sa petite fille avait été élue? Dyalwen? Élue? Qu'est ce que c'était que cette mascarade? Et puis il s'était renseigné. Et on le lui avait confirmé. Oui, elle avait été élue. DEUX JOURS PLUS TÔT.

Le soir de ce deuxième jour, il se rendit donc à l'appartement de sa petite fille pour mettre ça au clair.

Il toqua à la porte.



Après deux jours (et deux nuits) à profiter pleinement de la compagnie de Tisia, Dyalwen avait fini par retourner à sa chambre. Enfin, à y retourner pour autre chose que juste se débarbouiller et se changer, quoi. En fait, elle avait même prévu d'y dormir cette nuit. Ou, plutôt, Tisia l'avait envoyée se coucher dans un vrai lit. Soi-disant que les écuries, c'était fait pour les Compagnons avant tout.

La nouvelle Grise contemplait donc sa chambre en réalisant qu'elle allait devoir tout ranger pour déménager quand on toqua à la porte. Elle n'était pas encore en tenue de nuit, heureusement, et elle n'avait donc aucune raison de ne pas aller ouvrir.

« Ou... Grand-père ?! »



"Dyalwen... Tu n'as rien à me dire?"



« Je... »


La question était rhétorique, hein, elle s'en doutait bien. Et Grand-père arrivait à la faire se sentir fautive, comme d'habitude. Elle sentit l'interrogation de Tisia dans son esprit et redressa le menton. Non, elle n'avait pas honte !

« Je t'ai fait passer le message par Dubhán. »



"Le message n'est pas arrivé..."

Et Duhban allait entendre parler du pays...ne pas lui dire que sa soeur avait été élue? Vraiment?



« Ah... »

Oups. Dubhán n'avait rien dit. Il avait dû oublier au fond d'un livre. Et elle venait de le dénoncer. Merde.

« Il était à la bibliothèque quand je le lui ai dit... »


Et, connaissant Dubhán, Grand-père comprendrait, hein ? Elle devrait argumenter plus. Plaider la cause de son frère, pour que Grand-père ne lui tombe pas dessus. Mais, effectivement, elle avait quelque chose à dire. Et elle offrit un sourire encore un peu incrédule à son aïeul.

« Elle s'appelle Tisia ! »



Mouais. Ce rat petit de bibliothèque...

Mais quand Dyalwen lui offrit son petit sourire en coin timide, le coeur de l'austère grand-père, tout gonflé de fierté patriotique, fondit:

"Bravo ma fille! Il faut t'en montrer digne, maintenant!"



Entendre des félicitations dans la bouche de Grand-père, c'était... c'était... Inhabituel. Au mieux. Ça collait avec l'impression d'irréel et d'euphorie qui ne cessait de l'accompagner partout depuis deux jours. Mais la recommandation suivante fit descendre le petit nuage de plusieurs pieds. Parce que c'était là tout le problème, justement. Elle, digne d'être Héraut ?

Tu l'es, affirma sans hésiter Tisia au fond de son esprit.

C'était étrange comme le Compagnon semblait parfois sûr d'elle. Plus que son Élue, pour le coup.

« Tisia dit que je le peux... Mais ça me fait un peu peur. »

Aussitôt, elle se mordit la lèvre. Elle n'aurait pas dû l'avouer. Et surtout pas à Grand-père qui, lui, n'avait jamais peur de rien !



L'auguste grand-père posa une main rassurante (ou qui se voulait rassurante) sur l'épaule de sa petite fille.

"Si Tisia le dit, il n'y a aucune raison d'en douter. Mais tu vas devoir redoubler d'efforts dans tes études. Tu ne travailles plus juste pour toi, ou pour Bordebure, mais pour le pays. Pour bien le servir. Je veux être fier de toi. Encore plus que je ne le suis ce soir."



En d'autres temps, Dyalwen aurait pu se demander si elle avait un jour travaillé pour elle. Pour le domaine, oui, pour sa famille, oui, mais pour elle ? Mais de toute façon, la question n'était pas là. La fierté de Grand-père, c'était quelque chose... Mais le poids qu'il venait de mettre sur ses épaules aussi. Travailler pour le pays. Comment pourrait-elle être à la hauteur ?

« Je ne te décevrai pas, » émit-elle , en espérant avoir l'air plus convaincue qu'elle ne l'était réellement.

Elle déglutit puis décida de changer de sujet.

« N'en veux pas à Dubhàn, hein. Je crois qu'il ne m'a pas crue. »



Braden était un bon soldat, mais il n'était pas forcement très doué avec les gens, ses petits enfants en particulier. Il ne vit pas le manque d'assurance de sa petite fille.

Il lui tapota deux fois l'épaule et enleva sa main.

"Ne t'en fais pas pour lui, nous allons nous expliquer."

Non, ce n'était pas rassurant pour le pauvre frère de Dyalwen. Pas du tout.

"Je te laisse vaquer à tes occupations. Étudie bien."

Et le vieil homme se retira, dignement comme il se devait.



« Attends, Grand-père ! »

Ce n'était ni très digne, ni distingué, ni rien du tout, mais Dyalwen poursuivit son aïeul qui s'en allait. Elle ne pouvait pas le laisser aller passer un savon à son frère, hein.

« S'il te plaît, ne fâche pas Dubhàn. Il a beaucoup de travail avec le bibliothécaire, tu sais. Et puis, je suis sûre qu'il ne m'a pas crue. Il ne voulait sans doute pas te déranger pour rien. »

Même s'il n'aurait eu qu'à venir au Champ des Compagnons pour voir qu'elle disait vrai. Mais, en même temps, elle ne souvenait plus des mots qu'elle avait utilisés... Peut-être qu'elle n'avait pas été claire.



Il attendit. Il écouta. Il secoua la tête.

"C'est entre ton frère et moi. Il aurait dû transmettre le message, qu'il soit vrai ou pas. Maintenant, c'est moi qui vais lui transmettre un message. Mais c'est honorable de ta part d'essayer de le protéger. Tu as bien la fibre héraldique."



« Mais... »

La fibre héraldique ? C'était elle qui venait de dénoncer son frère, c'était de sa faute s'il allait se prendre un savon... un peu qu'elle essayait de rattraper sa bêtise. Mais Grand-père était plus têtu qu'une mule et elle savait qu'elle n'avait aucune chance de le faire changer d'avis. Peut-être pouvait-elle essayer de changer de sujet ?

« Tu ne veux pas venir voir Tisia ? »

Je ne suis pas sûre que ce soit efficace, émit Tisia, sceptique. Et tu rentreras dormir dans ton lit quand même, je te préviens.



"Je viendrais la voir demain. Ou après-demain. J'ai bien l'intention de la rencontrer! Mais j'ai à faire ce soir. Bonne nuit, ma chérie."

Diversion... ratée! Le vieux soldat offrit un sourire fier à sa petite fille et reprit son chemin.
« Modifié: 01 avril 2020, 20:58:59 par Fabuliste »