Fitz regarda l'homme, la tête de coté. Aucune expression, laissant planer un silence, comme si tout cela n'était que banalité.
"Avec tout le respect que je vous dois Hérault, j'ai beau faire parti de l'armée je ne reçois mes ordres que de deux hommes. Et aucun des deux n'est présent à l'heure qu'il est. Qui plus est mon travail est justement de dire qui est en sécurité ou ne l'est pas. Et même si j'ai confiance en vos capacités de combattant, Hérault ou simple troufion, aujourd'hui, aucun de vous n'est en sécurité. Si vous voulez tant rester, alors qu'à cela ne tienne, je resterai aussi j'ai été engagé pour cela. Je suis prêt à mourir ici sur place pour vous protéger. Mais mon travail est de faire en sorte que vous restiez en vie. Vous ne voulez pas prendre ma recommandation en compte, soit, dans ce cas là je ferai mon rôle. Comme tout soldat de votre armée, je crèverai sur le champ de bataille le sang au clair, pour votre gloire et votre vie. Mais surtout ne vous avisez pas de décider qui est en sécurité ou ne l'est pas. Ca c'est mon job, et si pour le mener à bien, je dois immédiatement rendre mes galons de lieutenant pour avoir osé vous parler, alors sachez que je le ferai sans aucun état d'âme. "
Oui bien sur il y avait le protocole, et tout le blabla de la hiérarchie, et tagadatsointsoin. Mais Fitz était aussi intéressé par ca, qu'une prostituée d'un bordel de bas étage par la vertu des prêtresses. Mercenaire, enfant esclave qui s'était enfui pour la terre promise pour voir la liberté de ses propres yeux, il n'avait accepté le rôle de lieutenant que pour deux hommes: Le profond respect qu'il avait pour Beltran, et la foi qu'il avait dans la futur régence d'Arthon. Il se moquait royalement de savoir qui était Hérault, noble ou dieu seul sait encore quel caste, alors que lui même était le jouet d'une déesse il n'y croyait pas, alors franchement les Hérault et toutes leurs histoires, pour lui c'était du chinois.
Fitz ne faisait confiance qu'en les hommes qu'il avait pu voir en action, tout le reste pour lui ce n'était que des paroles de politiciens qui ne menaient qu'à envoyer des hommes comme lui sur le champ de bataille, regarder mourir des garçons qui n'ont même pas l'âge d'être père. Ils n'étaient pas du même monde.
Resserrant sa prise sur sa hache, il s'approcha d'une rambarde pour y prendre un poste de garde, lançant une dernière phrase au Hérault.
"Je comprends votre peine, et je la ressent, mais aujourd'hui plus que jamais, si vous baissez votre garde ne serait-ce qu'une minute, alors croyez-moi: Hérault ou pas, vous êtes mort. "
Il savait ce qui allait leur tomber dessus, il avait vu les sbires du sombre, il avait vu les cadavres qu'il laissait. Cela faisait des années que Fitz était sur les routes, et il en avait appris une seule chose:
Noble, Hérault, fermier, ou soldat, tous, une fois tranchés en deux ont la même couleur de sang, et deviennent le même type de cadavre pourrissant au fond des fossés.
Alors qu'il s'éloignait Eoghan l'attrapa par le bras.
"Tellement de choses depuis le retour des missions, nous sommes au bord de la guerre, et il ne faudra que peu de temps avant que notre pays ne soit envahi de toute part. Pas seulement par des humains, mais aussi par une force inconnue, une force mise au service de la terreur et de la violence. Et franchement si j'étais un ennemi du futur pouvoir en place, crois-moi, en tant que guerrier, c'est aujourd'hui que j'attaquerai. C'est la première règle en terme de stratégie militaire, attaquer lorsque l'ennemi est faible et désorganisé".
L'homme jeta un œil à l'attroupement de Hérault.
"Et je pense qu'il n'y a pas plus faible et désorganisé que nous aujourd'hui même. Mon ami, si je dois perdre mon poste aujourd'hui, et botter quelques culs de Hérault, pour leur sauver la vie, alors je le ferai avec plaisir. "
Il adressa un de ses fameux clin d’œil malicieux au mage, tout en lui adressant un franc sourire.
Au moins on ne pourrait pas dire qu'il n'avait pas fait son travail. Son regard se perdit un instant dans le ciel, contemplant les nuages qui passaient sur Valdemar, tout semblait si paisible, monde insouciant du destin qui se jouait devant lui. Lui il avait vu des choses, il savait que la mort viendrait que beaucoup ne se relèveraient pas. Et que lui même avait d'ailleurs de forte chance d'y rester, dans cette mission suicide pour sauver un monde qui ne l'avait jamais réellement respecté et accepté.
Étrangement Fitz souriait. De ce sourire malsain de l'homme qui sent le sang et que ca met en joie. En tête une seule pensée.
"C'est une superbe journée pour le début d'une guerre"