Auteur Sujet: [Scénario][Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...  (Lu 6658 fois)

Pluiechantante

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Fin de la 4e décade 1481 - Bureau de Riannon

Suite à sa discussion avec le Commandant Beltran, Pluiechantante avait décidé d’aller parler sérieusement à Riannon. Jusqu’à présent, leurs conversations n’avaient été que de brefs mots échangés dans un cadre de porte ou au détour d’un couloir. Or la Kestra’chern, depuis sa conversation avec Beltran, était préoccupée et inquiète. Il y avait dans toute cette histoire quelque chose qui lui échappait. Quelque chose d’essentiel. Cependant, elle ne parvenait pas à mettre le doigt dessus. Mais elle était certaine que Riannon aurait la réponse à toutes ses questions. Non que Pluiechantante espère sincèrement que la Barde se montre coopérative. Mais elle saurait lire entre les lignes pour découvrir l’ampleur du problème - à défaut de découvrir quelle était la nature dudit problème. Toute Barde qu’elle était, Riannon restait un être humain, et Pluie se targuait d’être une experte en comportement humain. C’était, après tout, son métier. Son vrai métier. Être la "tatie" de Liane n’était qu’une autre facette de sa vocation.

Pour affronter une femme telle que Riannon, Pluiechantante avait besoin de toutes ses armes. Aussi avait-elle pris grand soin de se coiffer correctement le matin; elle avait noué ses cheveux en un chignon flou mais artistique, d’où jaillissaient ses multiples parures, plumes, perles, mèches tressées de fils colorés. Elle avait attentivement choisi sa tenue: un large pantalon d’un gris clair tirant sur le lilas resserré aux chevilles, relativement sobre, et une magnifique tunique d’un indigo profond, aux manches resserrées elles aussi, décorée de broderies gris argenté au col et aux poignets. Elle avait mit la boucle d’oreille trouvé avec Liane, puis avait assorti avec soin onze autres boucles et clous d’oreilles, afin de la mettre en valeur. Elle avait aussi accroché le bracelet à sa cheville avant d’enfiler de souples mocassins de cuir. Elle avait ensuite tracé un fin trait de khôl sur ses paupières. C’était en femme qu’elle venait parler à Riannon, non en nounou, ni en étrangère amusante. Elle était sérieuse, aussi sérieuse que Pluiechantante K’Leshya pouvait l’être.

Se sentait prête, Pluiechantante se dirigea vers le bureau de Riannon, où elle était certaine de la trouver à cette heure. Alors qu’elle se préparait à frapper à la porte, un serviteur l’avertit qu’on avait entendu des cris la veille, dans la suite de Riannon, et qu’elle était probablement de très mauvaise humeur. Pluie haussa les épaules avec un sourire. Elle n’avait pas peur de la colère de cette femme. Les cris, loin de l’impressionner, la faisaient souvent rire.

Les coups qu’elle frappa à la porte raisonnèrent donc de son assurance et de sa volonté de tirer les choses au clair, une fois pour toutes. Elle attendit à peine que Riannon manifeste sa présence pour entrer et soigneusement fermer la porte derrière elle.

« On doit parler, oui… »

Son ton était très éloigné de celui qu’on lui connaissait habituellement. Et il n’augurait rien de bon.
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Riannon

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Re: [Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #1 le: 30 avril 2014, 14:41:51 »
La journée avait très mal commencé pour Riannon. La veille, alors qu'elle passait enfin un moment avec sa fille au moment du coucher, elle avait été interrompue par l'arrivée intempestive de Beltran de Greenhaven. Il avait exigé de lui parler malgré l'heure tardive et la conversation n'avait pas bien tourné du tout. L'homme l'accusait de ne pas le mettre au courant des choses importantes. Il savait, pour les Dons de sa fille, ainsi que pour les terreurs de l'enfant. Il remettait en cause leur arrangement à propos de son investissement dans la vie de Liane. Malgré les refus de Riannon, Beltran avait promis de s'occuper beaucoup plus de sa fille et l'avait menacée de la reconnaître officiellement. Le ton avait monté. Beltran et Riannon, tous deux habitués à manipuler les gens par la froideur, avaient fini par craquer et les hurlements avaient fait trembler les serviteurs encore dans le coin. Riannon s'était même emparée d'une dague et avait menacé le Capitaine, qui n'avait pourtant eu aucun mal à la désarmer. Affolée par une réaction si excessive, Riannon s'était calmée et avait accepté des compromis en attendant qu'ils puissent de nouveau en discuter. Une fois Beltran parti, la Doyenne s'était effondrée devant sa cheminée et avait longuement sangloté. Jusqu'au moment où Liane s'était glissée dans ses bras avec l'intention de la consoler. Riannon s'était reprise et avait conduit la petite au lit, mais elle-même avait cherché le sommeil vainement des heures durant. Au petit matin, quand sa servante vint la réveiller, la Barde n'était pas dans un état reluisant. Elle s'était levée avec un mal de tête persistant, le nez bouché et avec un manque de sommeil évident que même ses tentatives de maquillage n'avaient pas entièrement camoufflée. Liane avait fait une crise ensuite en refusant de manger son petit-déjeuner, et Riannon s'était enfuie à son bureau pour ne pas s'énerver contre la pauvre enfant, la laissant à la garde inquiète de sa nourrice.

Incapable de se concentrer sur ses papiers, Riannon abandonna rapidement son bureau pour aller rejoindre l'un des fauteuils devant la cheminée éteinte. Avec tendresse, elle sortit sa harpe de sa protection et s'échauffa doucement les doigts en faisant des gammes. La musique la calma et elle se laissa emporter dans une semi-transe alors qu'elle se lançait dans la composition d'un nouveau morceau. Elle s'interrompit brusquement, de nouveau de mauvaise humeur, quand quelqu'un frappa à la porte. Son "oui?" n'était guère amical. Son caractère ne s'améliora guère quand une inconnue se glissa dans le bureau sans y être officiellement invitée. Riannon se leva brusquement et délaissa sa harpe pour se dresser devant Pluiechantante. Cette dernière venait d'affirmer qu'elles devaient parler. La Barde le supposait bien, car sinon elle espérait bien que cette femme ne serait pas entrée de cette manière dans son bureau.

Une seconde elle dévisagea l'inconnue. Puis soudain, elle la reconnut. C'était la Kestra'chern qui avait pris Liane sous son aile. Celle qui était allée tirer Beltran du flou artistique parternel qui lui allait pourtant si bien jusque là. La femme qui déguisait Liane en Héraut et la laissait ramener des choses étranges du fin fond du Palais. Celle qui arrivait à empêcher l'enfant de se venger de tous ceux qu'elle n'aimait pas.
Riannon reconnaissait la valeur d'une telle protectrice. Mais son coeur de mère se serrait à l'idée qu'une autre femme lui vole la vedette dans le coeur de sa fille. Et après l'esclandre de Beltran, Riannon n'avait pas - mais alors absolument pas- envie de discuter avec cette Pluiechantante. Mais comme on ne lui laissait visiblement pas le choix, elle inclina vaguement la tête pour saluer son interlocutrice et dit:

"Puisque je n'ai visiblement pas le choix. Beltran m'a dit que vous risquiez de passer."

Riannon n'était pas d'humeur à faire des courbettes et la froideur de son ton était perceptible. Ses mains tremblaient légèrement alors qu'elle se forçait à les desserrer. Elle observa effrontément son invitée forcée. Coiffée, maquillée, drapée dans son charme exotique - alors qu'elle-même était banale, les cheveux vaguement tressés, les traits tirés et elle-même engoncée dans un uniforme de Barde pourpre légèrement trop grand pour elle car elle avait perdu beaucoup de poids. Encore un point qui ne jouait pas en sa faveur.
Mais malgré tout ce qu'elle pouvait reprocher à son interlocutrice, Riannon restait Riannon. Et Riannon faisait attention aux détails, comme le choix de la langue.

"Je comprends un peu le Kaled'a'in mais je préférerai le valdemaran ou le tayledras. Vous voulez me parler de Liane je suppose?"

Elle n'invita pas la Kaled'a'in à s'asseoir et resta elle-même debout, signifiant par là qu'elles n'avaient pas le loisir de s'étaler sur des détails inutiles.
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Pluiechantante

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Re: [Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #2 le: 30 avril 2014, 15:18:00 »
Pluiechantante détailla son interlocutrice. Malgré sa ferme résolution de se montrer froide et distante, elle ne put empêcher son cœur de se radoucir à la vue de la femme qui se tenait en face d’elle. Avait-elle si mauvaise mine la dernière fois qu’elle l’avait vu? Et Pluiechantante n’avait alors pas remarqué la perte de poids manifeste de Riannon. Elle s’en inquiéta. Ce n’était jamais bon signe.

La Kestra’chern sentit son exaspération - artificiellement entretenue depuis la veille - fondre doucement. Elle était incapable de rester fâchée. Et elle constatait que la Barde n’allait pas bien. Elle sentit une vague de culpabilité lui refroidir les entrailles. Puis le bon sens reprit le dessus. Elle avait eu raison d’aller parler à Beltran, et sa présence ici ce matin était parfaitement justifiée. D’autant plus si Riannon avait des problèmes.

Pluiechantante ne put empêcher un sourire amicale de venir fleurir sur ses lèvres.

« Je parle en Valdemaran. Je parle mieux. Et j’ai l’habitude de dire les choses avec cette langue. Pas le choix. »

Elle inclina la tête sur le côté, comme pour mieux deviner le meilleur angle d’approche. Elle savait qu’il y avait un problème. Elle savait aussi que la relation houleuse entre Beltran et Riannon était mauvaise pour Liane. Elle se doutait que Riannon allait mal. Mais comment aborder tout cela sans risquer de provoquer une tempête?

Pour une fois, Pluiechantante, Kestra’chern de son état, décida qu’elle se moquait que ses paroles fassent hurler son interlocuteur. Le patient n’était pas Riannon - pas encore  - c’était Liane.

« Je gère Liane, oui. Je vois les problèmes. Beaucoup de problèmes. Je commence par le mauvais, comme ça le bon calmera la tempête. »

Elle prit quelques instants pour formuler clairement son discours, ou au moins aussi clairement qu’elle en était capable. Un jour, se dit-elle, elle craquerait et ira se faire implanter la langue locale comme Sourcedésert l’avait fait. Un jour.

« Premier problème. Les bébés ça se fait à deux. Les enfants ça a donc deux parents. Même si tu aimes pas Beltran, c’est le papa de Liane. Il doit savoir. C’est facile de le laisser de côté. Mais si tu punis Beltran comme ça, tu punis Liane aussi, oui? Elle a besoin de son papa. Je peux pas remplacer sa maman, et pas son papa. Tu dois pas laisser tes problèmes de coeur toucher Liane. Pourquoi dans ce pays vous êtes pas capables de gérer les vieilles histoires d’amour? Chez moi, pas autant de problème. On s’aime, on fait un enfant, on se sépare parfois, mais les parents restent les parents. Si Liane a pas son père maintenant, elle va casser le lien. Et plus tard, son père sera pas vraiment son père oui, plutôt un ami, un oncle, une connaissance, tu comprends? Je comprends que Beltran est ob… obtus. Carré. Pas très… souple? Il a peur des Dons. Je comprends aussi. Mais pas lui expliquer, c’est méchant, et mal. Et pas le laisser la rec… euh… dire que c’est sa fille c’est méchant pour lui, mais pour Liane aussi. Viveplume est jalouse, parce qu’elle peut pas danser avec son père. Parce qu’elle a pas euh… la même autorisation d’être avec Beltran qu’une simple Héraut. Tu comprends la souffrance? Oui. Tu es Barde. Tu comprends. Alors pourquoi tu vois pas ici? Tu as tes souffrances, oui. Je vois. Tu perds du poids, c’est un signe. Tu as la peau blanche oui. Tu es malade dans ton coeur sans doute. Triste? Préoccupée? La guerre peut-être? La famille? Je sais pas. Je suis pas dans ta tête. Je suis pas ta Kestra’chern. Je suis pas sûre que tu laisses entrer, de toute manière… pas moi. Mais il y a un autre ici. Ombrerêve oui. Il a appris avec mon clan… »

Elle s’interrompit pour reprendre son souffle, ayant débité sa tirade quasiment d'une traite, et aussi pour permettre à son interlocutrice de s’exprimer, se préparant mentalement à se faire hurler dessus, voire refouler hors de la pièce. Mais Pluiechantante ne se laissait pas si facilement impressionner, et elle n’avait aucune intention de bouger. Habillée et parée comme elle l’était, elle avait l’impression d’avoir revêtu la plus épaisse des armures, celle de l’inébranlable confiance en soi.
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Riannon

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Re: [Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #3 le: 30 avril 2014, 17:50:45 »
Riannon s'empêcha de frissonner. Ses barrières n'étaient pas aussi fortes qu'elles auraient du l'être et l'exaspération que Pluiechantante ressentit un moment effleura la Doyenne qui se braqua. La sensation disparut et la jeune femme fut incapable de saisir plus d'émotions, donc elle resta sur le qui-vive, braquée contre l'intrusion. Cette étrangère s'imposait à elle dans son propre bureau, et c'était elle qui avait le culot d'être exaspérée? Cette situation était réellement insoutenable.

Inexplicablement, un sourire venait d'apparître sur les lèvres de Pluiechantante lorsque Riannon lui offrit le choix de la langue. Fatiguée, la Doyenne se sentit plus sûre d'elle alors que la Kestra'chern choisissait de rester au valdemaran. C'était évidemment la langue que la Barde maîtrisait le mieux et le terrain serait sans doute moins glissant ainsi. Elle savait bien pourtant qu'elle aurait besoin de toutes ses armes pour empêcher cette intruse de s'imiscer dans sa vie - et elle était consciente de ne pas être en état d'opposer des arguments rationels alors qu'une partie d'elle réclamait de l'aide. Le conflit interne était si rude entre la haine qui la consumait et l'inquiétude pour son entourage, enrobée d'une bonne dose de honte, qu'elle ne pouvait empêcher ses mains de trembler légèrement malgré ses efforts pour paraître froide et distance. Elle ne rendit pas son sourire à Pluiechantante et lui fit signe de continuer, le visage de pierre.

Au début du discours, Riannon garda le contrôle de soi. Oui, elle savait que Liane avait des problèmes. Elle était là lors de ses cauchemars. Elle l'entendait parler toute seule pendant ses jeux. Pire, elle sentait les angoisses de son enfant et n'arrivait pas à les calmer. La Doyenne savait également que depuis que Pluiechantante s'occupait de Liane, les angoisses avaient diminué et les jeux étaient devenus plus enfantins et légers. Jusque là rien de nouveau.
La suite était plus embêtante. Les arguments de Pluie, Riannon les avait entendu la veille. Se les voir répétés la mit en colère. Un muscle de sa joue frémit mais aucun autre signe extérieur ne fut visible. Elle laissa pourtant la Kestra'chern continuer sans l'interrompre. L'envie de menacer l'intruse d'un couteau comme elle l'avait fait avec Beltran la tourmenta un instant avant que la honte ne l'envahisse à cette idée. Quelle idiote! Empathe et prête à blesser quelqu'un... Pire, Empathe, consciente des problèmes de son propre enfant, et incapable d'intervenir. Un trou noir se forma au creux de son plexus solaire. Elle allait craquer. Puis le froid l'envahit et la haine, la honte, tous les sentiments refluèrent jusqu'à être quasiment indiscernables. Le masque tint bon.

"Beltran m'a parlé de votre... conversation." fit froidement la Barde. "Liane est ma fille et je décide de ce qui est bon pour elle. Beltran n'est pas bon pour elle. Il est terrorisé par ses Dons et il la mettrait en danger. Liane a assez à gérer pour ne pas être confrontée à ça."

Elle était de mauvaise foi... et elle le savait. Mais qu'une étrangère s'imisce dans ses décisions maternelles la blessait au plus haut point. Les compromis qu'elle avait accepté de faire la veille au soir revinrent la hanter, et malgré elle, elle avoua:

"Beltran a promis de ne pas la reconnaître pour le moment. Il tiendra sa promesse. En échange il a le droit de venir la voir quand il le désire à condition de rester discret. Je ne l'éloignerai plus de Liane mais il n'a aucun droit et les décisions la concernant me reviennent. Même celle de lui faire percer les oreilles." précisa-t-elle sans trop savoir pourquoi c'était si important à ses yeux.

D'un ton charriant de la glace, elle ajouta:

"Mes problèmes personnels ne vous concernent pas. Un Kestra'chern ne pourrait rien pour moi de toute façon."

Aveu contraint et forcé. Le froid continua à prendre sa place, paradoxalement brûlant, dans le corps de Riannon, comme un corps étranger conquérant une place déjà acquise. Cette chose qui engluait l'esprit de Riannon ne ressemblait en rien à la Riannon qui avait pris ses fonctions de Doyen il y a quelques années. Ni même à la Riannon qui jouait pour son enfant endormie. C'était l'implacable Riannon qui venait de renvoyer un ménestrel à la guerre. Qui avait menacé de tuer son ancien amant. Qui s'écartait volontairement de Liane. Une seconde, une vague de honte déferla, franchissant les barrières. Une lueur brilla dans le regard de la Barde. Peut-être un appel à l'aide. Puis elle fut refoulée et Pluie se trouva de nouveau face à un mur de glace au regard implacable.

"J'ai entendu vos critiques à propos de mes relations avec Beltran. Autre chose? Sinon je vous prierais de me laisser à mon travail."

Sous-entendu "certains ici ont un vrai travail".
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Pluiechantante

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Re: [Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #4 le: 30 avril 2014, 18:51:40 »
Pluiechantante avait dû s’habituer, en venant vivre au Palais, à ce que ses interlocuteurs possèdent de solides barrières, et à ce que son Empathie, d’habitude si utile pour lire les âmes, lui soit inutile. Elle était donc devenue un peu négligente quant à ses propres boucliers, ne voyant guère l’utilité de les maintenir solidement levés alors que d’autres le faisaient déjà. Elle fut donc surprise quand elle fut submergée par une vague de haine, d’inquiétude et de honte. Les émotions étaient si fortes qu’elles donnèrent la nausée à Pluie, qui continua de parler, parler, parler pour absorber le trop-plein d’émotions.

Au fur et à mesure de son discours, Pluiechantante sentit le froid émaner de la femme. Un froid… étrange. Un froid angoissant. Depuis quand le froid était-il devenu une émotion? Mais il était si intense qu’il semblait figer les autres émotions dans une attente éternelle, comme un paysage figé par la neige.

Pluie frissonna. Mais bien vite la mauvaise foi de la Barde fit monter sa propre température, et sa douceur printanière s’opposa à l’intrusion. Elle ne s’énerverait pas. Deux Empathes incapables de maîtriser leurs nerfs risquaient d’emporter tout le Collegium avec elles.

« Tu peux décider oui. Mais tu peux pas décider de ce qui est bon pour elle. Ça, y a que le temps qui dit, si c’est bon… Et moi je sais que c’est pas bon. Beltran aime Liane. Il a accepté les Dons, même si il comprend pas, même si il a peur. Avoir de l’inconnu, c’est normal. C’est humain. Affronter sa peur, c’est grandir.»
Elle fit la moue. « Il a le droit de l’aimer, oui. Ou même ça tu refuses? Et Liane aime Beltran. C’est son papa. Elle est Empathe. Tu peux pas la priver de ce lien. Il est là malgré que tu veuilles pas. Tu peux rien faire. Empêcher qu’il est là, tu vas faire souffrir Liane. Et c’est ce que tu veux pas… »

Riannon repoussa violemment la discrète main que Pluiechantante lui avait tendu. Pourtant, elle était persuadée qu’au contraire, un Kestra’chern, mais même n’importe quel humain prêt à l’écouter pourrait l’aider. Mais dépassé un certain stade de douleur, toute aide semblait insupportable, et la guérison impossible.

Inquiète de l’état de Riannon, elle se laissa à nouveau contaminer par celle-ci. Le froid était devenu brûlant, tellement brûlant. Relevant en partie ses boucliers, Pluiechantante constata quelque chose d’étrange, d’inquiétant. C’était comme si ce froid possédait Riannon, comme s’il était une entité distincte, un être à part entière fait de glace, de haine, de terreur, de violence, de vide, de regrets, de remords, de renoncements. Quelque chose recouvrant tous les doux sentiments, l’amour, la joie, l’espoir, le courage, le contentement, la vie, tous ces sentiments qu’elle opposa à ce froid, les diffusant puissamment autour d’elle, comme un vent pur et frais pour chasser cette noirceur.

Pluiechantante était une Empathe expérimentée, sachant précisément comment utiliser son Don pour soigner. Elle s’efforça d’imaginer qu’elle chassait ce froid, qu’elle le repoussait. Elle refusait l’image que Riannon renvoyait. Ce n’était pas la vraie image. Pas le vraie Riannon. Ce n’était plus la mère de Liane. Ce n’était plus la doyenne. Ce n’était même plus une femme. C’était une souffrance telle qu’elle s’était cristallisée en glace. Une souffrance que Pluiechantante, maintenant qu’elle avait connaissance de son existence, chercherait sans relâche à détruire… non à apaiser, à guérir.

Chaque Kestra’chern souffrait d’une blessure intérieure profonde et secrète qui l’avait poussé à embrasser cette profession. Cette blessure était si intime pour la plupart d’entre eux que nul n’imaginait même son existence. Pluiechantante connaissait donc la souffrance. Malgré la légèreté de ses pas, la gaieté de son rire, la douceur de son sourire, elle portait une plaie qui jamais ne guérirait.

A cet instant, c’est dans cette plaie qu’elle puisa sa force. Parce qu’elle était devenue Kestra’chern pour que les autres n’aient pas à souffrir de telles blessures. Parce que cette meurtrissure la rendait plus attentive à la terrible souffrance de la femme debout en face d’elle. Comment soigner la souffrance sans la côtoyer étroitement, chaque jour?

Une larme coula sur la joue de la Kestra’chern. Puis une autre. Mais son visage, lui, restait immobile. Elle pleurait. Mais ce n’était pas elle qui pleurait. C’était… c’était… elle ne savait plus. Elle pleurait simplement. Incapable d’articuler un mot, parce qu’elle bataillait férocement contre le froid brûlant de Riannon, et que cela lui coûtait une énergie immense.

Pluiechantante n’avait pas entendu Riannon lui parler. Elle était figée dans son combat. Seules roulaient, régulières, les larmes d’une autre.
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Riannon

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Re: [Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #5 le: 01 mai 2014, 09:28:45 »
Une partie de Riannon savait pertinamment qu'elle diffusait ses émotions un peu trop fort, et c'est cette partie qui fut soulagée que le mur de glace se mette en place. Elle ignorait si tous les Kestra'cherns étaient Empathes mais il y avait de fortes chances que cette femme soit au moins capable de lire les signes du corps si elle n'était pas ouvertes aux signes d'émotion pure. L'autre partie de Riannon se recroquevilla sous l'attaque du froid et toute veilléité d'appeler à l'aide ou au moins de s'exprimer, s'expliquer, disparut. Face à Pluiechantante, le bloc de glace était bel et bien en place. Incapable de s'ouvrir à son Don comme elle l'aurait fait dans d'autres circonstances, Riannon resta coincée dans son propre esprit, ne ressentant pas ce que la Kaled'a'in opposait à sa froideur. Extérieurement, tout semblait normal. Enfin, si ce n'est qu'une femme qu'elle connaissait à peine s'était décidée à juger sa vie et ses décisions.

Evidemment, la partie recroquevillée de Riannon reconnaissait la justesse des arguments de Pluiechantante. La Barde était une mère aimante, qui se souciait du bien-être de sa fille, qui passait ses nuits à lui chanter des berceuses lorsque les cauchemars la réveillaient, qui s'inquiètait à chaque fugue, ... Elle savait bien que Beltran manquait à Liane et que la petite rêvait que son père s'occupe d'elle comme il le devrait. Elle le savait. Mais autoriser Beltran à trop les fréquenter c'était mettre en danger ses secrets. Déjà que Liane semblait en savoir trop sur eux, Riannon ne pouvait se permettre que le chef militaire de Valdemar se rende compte de quelque chose. Mais elle était si épuisée...
Pluiechantante mit le nez de Riannon sur ce qui clochait. Bien sûr que Liane était Empathe, elle aurait dû le savoir depuis le début. Mais à se couper de tout derrière son mur de glace, Riannon se bouchait les yeux de la même manière que Beltran. Elle ne voulait pas savoir que ce Don était plus qu'à peine éveillé chez sa fille - qu'il était efficace et même fort. C'était trop dur pour elle. Et Pluiechantante avait raison. Riannon ne supportait pas de voir sa fille dans cet état. Elle aurait tué pour la consoler. Sauf qu'au train où ça allait, elle tuerait pour de vrai - et elle ne pourrait le supporter.
La Barde ne put répondre au discours de la Kestra'chern. Les mots se bloquaient dans sa gorge alors que le froid finissait de s'installer. C'était brûlant, coulait dans ses entrailles comme un feu glacé, ne laissant la place à rien, même pas les larmes. La honte et l'amour rejoignirent la musique derrière la pression immense de la glace. Un sursaut les fit déborder une seconde - le regard de Riannon brilla, humide.

De nouveau prisonnière de la glace, elle remarqua tout de même que sur le visage désormais calme de Pluiechantante, des larmes brillaient. Elles roulaient sur ses joues comme des joyaux liquides. Riannon - la Riannon perdue dans le froid - sentit que quelque chose s'opposait à ses barrières glacées. C'était des choses qu'elle n'avait pas le droit de ressentir. Chacun des sentiments que lui opposait Pluiechantante avaient été étouffés par la glace et celle-ci les combattait presque d'une volonté propre. Lentement cependant, le froid s'émoussa. De l'intérieur, la Barde luttait contre lui.

Riannon recula d'un pas, et se retint au dossier du fauteuil. Elle chercha son souffle et d'une voix étranglée prévint Pluiechantante:

"Partez. Partez, je ne veux pas... Je ne veux pas vous faire de mal. S'il vous plait."

Sa voix se brisa. Elle luttait - mais pas contre Pluiechantante. Son peu d'énergie la laissait impuissante face à sa prison glacée, mais avec l'aide extérieure de la jeune femme, elle avait une chance de pouvoir ébranler les fondations. Le froid baissa légèrement et Riannon s'engouffra dans la première brèche qu'elle put trouver. Sa culpabilité balaya tout, entrelacée à sa honte, sa peur et son impuissance. Elle n'eut que le temps de répéter:

"Partez! C'est dangereux pour vous. S'il vous plait. Partez." Puis d'ajouter: "Prenez Liane. Prenez la et partez."

Le visage de la Barde se crispa sous l'effort. Des gouttes de sueurs perlaient à son front. Les traits de la jeune femme se déformèrent comme si elle allait pleurer. Le regard était celui d'une femme perdue. Puis la glace reprit sa place malgré le vent chaud mental qui venait le balayer. Moins épais, moins abrupt, mais encore et toujours plus fort que sa victime. Ce froid était composé de violence et de haine, tellement exacerbées qu'elles en semblaient aiguisées. Elles enfermaient leur victime en se nourrissant de sa honte et de sa culpabilité - nourrissant à leur tour la peur et les mauvais sentiments. Installée profondément dans l'esprit de la Doyenne, la glace prenait des nuances sombres et gluantes, refusant de céder devant l'intervention de la Kestra'chern.
Pourtant, cette "chose" avait été prise au dépourvu et la vraie Riannon avait réussi à faire surface un instant. Un très court instant. Assez pour que la douleur qui la tenaillait devienne insoutenable pour quiconque pouvait la recevoir.
Le visage de nouveau de marbre, Riannon désigna la porte, cette fois d'un geste automatique, comme sans voir son interlocutrice:

"Nous n'avons plus rien à nous dire. Partez. Je dois préparer mon cours."

Au fond d'elle pourtant, ce qui restait de la vraie Riannon sanglotait à en fendre le coeur d'une pierre, enfermée dans la spirale glacée. Sur le bras de la Doyenne, alors que la manche remontait automatiquement, une large cicatrice encore rouge fendait la peau blanche.
« Modifié: 01 janvier 1970, 01:00:00 par Guest »

Pluiechantante

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Re: [Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #6 le: 01 mai 2014, 10:45:50 »
Les mots de Pluiechantante semblèrent ébranler un instant seulement la glace en face d’elle, et elle vit les yeux de Riannon prendre un instant vie sous l’effet d’une larme. Avait-elle touché quelque chose?

Opposant le meilleur de son cœur à ce froid si intense, elle eut comme une vision: les deux femmes, séparées par un épais mur de glace, grattaient, tapaient, attaquaient, pour peut-être parvenir à se rejoindre. Leurs mains étaient en sang. Et ce sang, chaud, brûlant, attaquait la glace. Il se mêlait aux larmes pour tenter d’entamer l’épaisse carapace. Puis soudain, une percée. Pluiechantante revint à la réalité. Riannon l’implorait de s’en aller…

Dans l’image mentale qu’elle avait maintenant de la scène, Pluiechantante voyait la mince ouverture qu’elles étaient parvenues à créer se refermer. Mais à travers elle, elle sentit la culpabilité, la honte, la peur, l’impuissance. Elle tenta à son tour de transmettre quelque chose, de donner à cette femme un peu de sa lumière intérieure. Elle s’imagina sortant de son cœur une larme brillante de lumière, sentant l’herbe, les fleurs, la pluie d’été, l’amour, la joie. Elle l’enveloppa de toute sa certitude, de sa confiance, et de sa rage de vivre. Puis, elle lança son joyaux à travers la petite ouverture. Elle espérait que peut-être un peu de sa force serait parvenue à Riannon, et qu’ainsi, ensemble, elles pourraient abattre cette glace. A cet instant, il était impossible pour Pluiechantante d’imaginer que cette barrière de glace put être une construction volontaire. Pour elle, elle était la conséquence d’un cœur malade.

Elle chercha à maintenir l’ouverture par tous les moyens, l’attaquant de ses larmes, de son cœur. Mais Riannon, derrière, ne semblait plus capable de se battre.  La Barde hurla une dernière fois avant que la glace ne répare ses blessures et les coupe à nouveau totalement l’une de l’autre.

La Kestra’chern ne put s’empêcher de frissonner, choquée par les paroles de la Barde. Riannon était malade. Terriblement malade. Elle se savait dangereuse. Mais pour qui? Elle sentit le froid revenir. Mais elles l’avaient affaibli. Un peu. La violence et la haine étaient tellement fortes…

Pluiechantante était en sueur maintenant. Son visage s’était terni, ses lèvres avaient blanchi. Elle était fatiguée. Mais Riannon prononça les mots dont Pluiechantante avait besoin. Elle sentit la force lui revenir. C’était dangereux? Et alors? Avait-elle quelqu’un qui l’attendait? Non. Avait-elle une quelconque importance dans la marche du monde? Non. Alors elle était la personne toute désignée. A choix, elle préférait guérir Riannon et permettre à Liane de grandir heureuse. Même si cela devait la blesser elle.

Elle sentait encore et toujours la honte, la culpabilité, la peur, tout ces sentiments qu’elle s’efforçait de chasser au quotidien. Et puis il y avait la douleur. Une douleur tellement forte que Pluiechantante la reçut comme un poignard dans les entrailles. Elle en avait la nausée. Une terrible nausée. Peut-être, oui, peut-être n’aurait-elle pas la force de résister?

Et Riannon… non. Et l’être de glace la congédia…

A cet instant, son orgueil, qu’elle refoulait à tout instant, et sa fierté, qui la poussait à relever tous les défis, furent attisés. La vision du bras lacéré de la femme fit flamboyer son regard, renforçant encore sa résolution.

« Non. »

Puis elle fit quelque chose qu’elle n’avait jamais fait. Quelque chose qu’un Empathe puissant pouvait faire, mais qu’il espérait ne jamais avoir à tenter. Elle eut une brève pensée pour tous les Empathes des Collegia. Elle espérait que tous avaient leurs boucliers solidement ancrés.  Elle pensa tout particulièrement à Liane, cherchant un moyen de la protéger de ce qu'elle allait tenter. Elle regarda Riannon, captant son regard. Puis elle sourit, du sourire le plus franc, le plus généreux, le plus doux, le plus vrai dont elle était capable. Les larmes continuaient à perler aux coins de ses yeux, elles roulaient sur ses joues, marquaient un bref temps d’arrêt sur l’arrête de sa mâchoire, puis tombaient sur le sol, rythmant ce moment.

Elle saisit le bras de Riannon, d'une manière qui empêchait la femme de se dégager. Et laissa totalement tomber ses barrières. Toutes. Elle se sentit nue, vulnérable. Mais elle était résolue. Jamais elle ne pourrait retourner à sa vie maintenant qu’elle avait conscience de la souffrance de cette femme. Comment lui demander une chose pareille? Et Pluiechantante ne renoncerait pas. Son orgueil ne pourrait le supporter. Sa fierté en serait à jamais ternie. Et son inébranlable confiance en elle se fissurerait en profondeur.

De toute son âme, de tout son cœur, elle s’attaqua à ce mur froid. La joie était comme une pioche, l’espoir une masse, le courage un poinçon. La douleur en face était telle qu’elle ne pouvait lui résister qu’en lui opposant des sentiments plus forts encore. Elle fit de son amour pour Liane l’outil le plus puissant. Cet amour était encore renforcé par sa blessure la plus profonde, cette blessure que Riannon avait maintenant sous les yeux. Cette blessure qui aiguisait tous ses outils. Elle était préparée à se battre jusqu’à l’épuisement total. Elle ne renoncerait pas. Jamais.

Totalement ouverte à Riannon, les mots étaient devenus inutiles. Elle fit clairement comprendre à l’être de glace que cette confrontation ne s’achèverait que lorsque l’une des deux femmes tomberait à terre, d’épuisement… ou morte.

Étrangement, une douce mélodie flottait dans l'air. Une berceuse, un air tendre de son enfance. Elle l'avait apprise à Liane... était-ce donc elle qui chantait? Ou simplement le cœur de Pluie?
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Riannon

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Re: [Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #7 le: 01 mai 2014, 12:06:11 »
Riannon se mourrait. Enfermée depuis des lustres dans sa tour d'ivoire mentale, elle ne pouvait plus respirer et s'embourbait dans toutes les horreurs qui la poussaient vers le noir intérieur. Ecorchée vive dans son propre esprit, prisonnière de la glace, elle n'avait plus que la force de mettre en garde Pluiechantante avant de rendre les armes. Elle savait qu'une fois le mur de nouveau en place, il la forcerait à appliquer sa violence sur toute personne s'approchant de trop près. Lors d'accès de conscience, alors que le masque se brisait momentanément pour lui rendre son intégrité quelques heures, Riannon avait tenté de se tuer. Mais là encore, le froid l'avait saisie et rattrappée, lui refusant jusqu'à cette échapatoire. Froidement, calmement, elle avait recousu elle-même ses blessures et personne n'en avait rien su. Mais la Barde voulait mourir. Elle n'existait plus en tant que Riannon, uniquement comme ce monstre qui trahissait tous ses proches et ses idéaux.

Ce qui l'emprisonnait semblait avoir une vie propre. Alors que la petite Riannon mentale se recroquevillait à l'intérieur des murs gelés, le froid sembla réagir comme une entité séparée à l'attaque chaleureuse de Pluiechantante. Joie, chaleur, larmes, tout semblait attaquer l'intégrité de la barrière... Mais chaque avancée était regagnée par le froid à peine ébranlé. Pourtant une brèche apparut et Riannon s'y projeta pour mettre en garde la Kestra'chern qui s'obstinait. Elle ne désirait réellement pas la blesser et redoutait de tout son coeur de le faire malgré elle - esclave du froid et de la haine. Cette brève ouverture laissa à Pluiechantante l'infime possibilité de transmettre sa force à Riannon sous forme d'un rayon lumineux qui la toucha au coeur, à peine dévié par le mur de glace qui reprenait sa place. Une seconde, la Barde reçut le cadeau lumineux de la Kestra'chern. Une seconde, l'être recroquevillé sous la glace se rappela la lumière, la joie, la chaleur d'un soutien, l'embrassade de son enfant, et la promesse d'un futur. La seconde suivante, le givre l'engloutissait de nouveau, balayant tout espoir.

Crispée sur son fauteuil, le front désormais ruisselant, Riannon reprenait le masque de glace qui était le sien depuis si longtemps, trompant tout son entourage. Mais Pluiechantante n'était plus dupe et son obstination à harceler les barrières de Riannon semblait renforcer le combat intérieur de Riannon. Elle avait pu prévenir l'étrangère alors que jusque là, elle n'avait fait qu'entretenir l'illusion qu'elle était encore elle-même. C'était un énorme progrès. Son appel à l'aide s'était certes formé de toute la douleur et l'horreur qu'elle entretenait, mais quelqu'un savait désormais. Pluiechantante aurait dû fuir. Riannon-de-glace savait que quelque chose clochait. La Kestra'chern n'aurait pas dû être en mesure de s'appercevoir à quel point les blessures étaient nécrosées. Elle n'aurait jamais dû s'approcher assez. Riannon-de-glace ordonna à l'intruse de partir. Elle tressaillit, comme attaquée physiquement, lorsque la Kaled'a'in lui opposa un non ferme et définitif.

Le sourire de Pluiechantante fit se crisper encore plus la main de la Barde sur le dossier du fauteuil. L'autre bras désignait la porte. Le contact soudain de sa peau glacée contre celle, brûlante, de Pluiechantante fit hurler Riannon d'une manière qui n'avait rien d'humain. Physiquement, le contraste n'était pas si grand mais intérieurement, alors que Pluiechantante abaissait toutes ses barrières, la douleur fut un moment insoutenable. Riannon hurla jusqu'à ce que l'air lui manque. Puis elle se mit à haleter, prise de grandes vagues de frissons.
Pluiechantante attaqua de toute son âme le mur de glace qui tuait à petit feu celle qu'il possédait. Joie, espoir, courage et amour s'opposèrent à la peur, le désespoir, les mensonges et la haine. Pendant une éternité, la glace gagna, avalant la force de la Kestra'chern comme s'il s'en nourrissait. Puis une faille apparut. Fine, quasiment invisible.

Riannon entendit une mélodie à l'intérieur d'elle-même. C'était une musique qui ne lui appartenait pas. Sans savoir pourquoi, elle saisit quelques mots dans une langue qu'elle ne maîtrisait pas, et elle fut certaine que c'était Liane - ou Pluiechantante? - qui traversait l'immensité glacée pour la toucher. Consciente qu'on se battait pour elle, l'avatar blessée de la Barde reprit un peu de force. Elle s'accrocha au filet de musique pour se rassembler. Il fallait qu'elle tente d'aider. Il fallait qu'elle se batte.

Le corps de Riannon tremblait de plus en plus. Soudain, son bras se détacha du fauteuil et s'accrocha à Pluiechantante comme à une bouée de secours. Les yeux fermés, pâle comme la mort, Riannon respirait à peine. Quand la musique se glissa dans la brèche, les larmes se mirent à couler. Elles étaient étrangement chaudes sur les joues glacées de la femme. Un hoquet la prit et elle chercha désespéremment de l'air.

La glace cessa de se renforcer autour du coeur de Riannon. Quelques brèches supplémentaires apparurent. Riannon tentait de toute son âme d'accéder à la main tendue de Pluiechantante. Elle crut une seconde réussir, puis la glace changea d'approche. D'encerclante, elle se fit pressante et s'aiguisa pour attaquer Pluiechantante. Des tentacules de glace rampèrent vers l'être mis à nu qui l'attaquait. Riannon pleurait à chaudes larmes, sans bruit.

"Non, non, non..." croassa-t-elle. "Non."

Elle tenta de se dégager de l'étreinte de Pluiechantante, refusant que celle-ci soit confrontée à la même horreur.

Une petite voix résonna alors dans l'esprit de la Barde et dans celui de Pluiechantante. Ce n'était pas du valdemaran mais la pensée était plus que claire. Je t'aime maman. La voix mentale de Liane se joignit à la musique qui émanait de Pluiechantante. Petite chose terriblement fragile, elle appelait pourtant sa mère avec force et se mêlait à la chanson de la Kestra'chern comme elle voulait aider. Cela ne dura qu'une seconde car l'enfant n'avait aucune maîtrise et largement pas assez de forces. Le contact disparut brusquement. Mais cela suffit pour que Riannon passe un "bras" mental à travers la brèche et se saisisse de ce qu'elle "voyait" comme Pluiechantante pour s'y raccrocher aussi fort qu'à son bras réel.

"Au secours." chuchota-t-elle.
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Pluiechantante

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Re: [Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #8 le: 01 mai 2014, 13:41:07 »
Au moment où elle toucha Riannon, celle-ci se mit à hurler. Encore et encore. Comme si la glace elle-même criait sa haine. Puis, tout devint blanc, de ce blanc douloureux qui s’incrustait durablement sur la rétine, et qui effaçait le monde. Pluiechantante, totalement découverte, nue, ne put que laisser la douleur la traverser. Elle crispa davantage la main qui tenait Riannon, par réflexe plus que par volonté de la retenir encore. Puis petit à petit, la pièce réapparut.

La Kestra’chern avait l’impression de s’attaquer à un roc, une montagne de glace. Mais ne disait-on pas que la foi pouvait les mouvoir? Elle se jetait à cœur perdu dans la bataille, sans retenir ses coups. Elle n’écoutait pas son corps, qui s’épuisait à fournir à son esprit les ressources nécessaires à cette lutte. Elle n’était plus qu’une lame d’émotions aiguisée par la fierté, la fureur, la certitude. Elle avait dit à Liane qu’elle ne se battait jamais, qu’elle se contentait de maîtriser l’adversaire pour l’empêcher de lui faire du mal. Et pourtant, en cet instant, elle attaquait férocement l’être de glace.

Mentalement, elle chantonnait la berceuse de son enfance. Elle ne savait pas si elle s’était mise à chanter car elle avait entendu cette mélodie, ou si la musique venait d’elle dès le départ. Elle aurait dû y penser plus tôt. Riannon était Barde, si quelque chose pouvait l’atteindre, c’était bien la musique. C’était une chanson qui évoquait le bruit des vagues, l’odeur de la mer, la forme des nuages, la chaleur des pierres. Fermant les yeux, Pluiechantante visualisa son pays, sa ville. Elle sentait l’odeur du sel, le soleil chaud sur son visage.

Il lui semblait maintenant qu’une faille était apparue dans la glace. Elle la sentait plus qu’elle ne la voyait. Mais oui… elle voyait Riannon rassembler son courage, essayer de se battre avec elle. La voix de Pluiechantante se fit plus ferme alors qu’elle recommençait inlassablement la petite berceuse. Elle entendait, comme un écho, la petite voix de Liane derrière la sienne. L’imaginait-elle?

Soudain, Riannon s’accrocha à elle de toutes ses forces. Pluiechantante, affaiblie par sa lutte, mit quelques instants à retrouver son équilibre, puis à reprendre une position stable, confortable. Heureusement, la Barde ne pesait presque rien, et la Kestra’chern aurait pu la porter dans ses bras. Puis, enfin, Riannon pleura, et étrangement, les larmes de Pluiechantante s’arrêtèrent de couler. Elle la serra doucement contre elle.

Le mur maintenant se fendillait. Riannon tentait de sortir, de s’évader. Mais la glace n’était pas prête à la laisser partir, et s’attaqua à Pluiechantante, totalement vulnérable sans ses boucliers. Elle sentit des lianes s’enrouler autour de ses jambes, de ses bras, des lianes couvertes de piquant acérés, des lianes glacées, des lianes apportant avec elle le froid de la mort.

Pluiechantante empêcha la femme de partir, alors que celle-ci cherchait à fuir pour tenter vainement de la protéger. Il était hors de question qu’elles reculent maintenant. Chantant toujours, elle s’efforça de faire fondre ce qui l’attaquait. Elle souffrait, son corps était épuisé, mais elle ne renoncerait pas.

Soudain, Liane fut là. Elle parla… quelle langue était-ce donc? Elle donna sa force à Pluiechantante, son immense soif de vie. Puis sa présence disparut. Riannon aussi sembla reprendre courage. La Kestra’chern la vit passer un bras à travers la glace, elle sentit le cœur de la Barde se tendre vers elle. Elle l’attrapa, le tenant aussi fermement que qu’elle serrait le corps de cette femme.

Puis, une voix faible l’appela à l’aide.

Pluiechantante se déchaîna alors, cherchant à agrandir encore et encore l’ouverture, pour délivrer Riannon. Soudain, elle se sentit chuter, et le sol dur rencontra ses genoux. En tombant, elle entraîna l’autre femme, mais elle l’empêcha cependant de se blesser en la soutenant totalement.

La glace profitait maintenant de sa faiblesse pour l’entraver dans sa lutte. Non… elle avait encore de la force. Elle avait de l’énergie… Elle ne pouvait échouer. Elle n’avait pas le droit…

« Dame, prête-moi ta force! » hurla-t-elle.

Penser à la Déesse ramena le calme dans son cœur. Certes, elle était épuisée, le combat était éprouvant. Mais elle y arriverait. Elle le savait. Elle sentait à nouveau sa douce chaleur intérieur, cette petite flamme qui jamais ne s’éteignait. Elle la voyait, brillant clairement devant ses yeux. Elle la nourrit de tout ce qui était doux en ce monde, le rire de Liane, l’odeur de la pluie, la sensation de l’herbe sous les pieds, le goût du miel, les étoiles infinies piquetant le ciel. Elle se sentit à nouveau  forte et inclut Riannon dans la lumière de sa flamme.

Elle cligna soudain des yeux, revenant à la réalité. Elle était assise sur l'épais tapis, devant le fauteuil de la Barde. Elle sentait dans sa chair les blessures mentales qu'elle avait reçu. Doucement, elle leva la main et caressa lentement les cheveux de Riannon, chantonnant toujours légèrement.

D'une main sûre et rassurante, elle lui prit le visage entre les mains, la regardant droit dans les yeux. Riannon, si pâle, en larme, défaite, meurtrie...

« Je suis là. » Quelle langue avait-elle donc parlé? Elle n’en était plus certaine maintenant.

Puis elle fit ce que tout Kestra’chern dans sa situation ferait, elle l’embrassa doucement sur les lèvres. C’était un baiser doux, tendre, généreux. Un baiser dont la durée exacte ne pouvait être estimée tant l’importance du moment le rendait éternel. Un baiser d’amour, de compréhension, de réconciliation. Mais un baiser dénué de toute charge sexuel. C’était le baiser du soigneur à son patient. Avec ce baiser, ce contact si intime, Pluiechantante laissa jaillir hors d'elle tout ce qui la rendait vivante, tout ce qui donnait pour elle à la vie son inestimable valeur.
« Modifié: 01 janvier 1970, 01:00:00 par Guest »

Riannon

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Re: [Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #9 le: 02 mai 2014, 11:28:35 »
Riannon était épuisée. Le manque de sommeil, les longues batailles intérieures qui échouaient toutes, le poid du masque à porter, la maladie et les attaques de Pluiechantante avaient épuisé le peu de forces qu'il lui restait. Elle n'aurait jamais cru qu'elle puisse crier si fort - mais elle n'en pensa rien puisqu'elle s'entendit à peine même lorsque sa voix se brisa et s'éteignit. Epuisée, persuadée qu'elles n'avaient aucune chance face à la glace, la Barde faillit renoncer et se laisser aller. Puis Pluiechantante trouva la seule chose qui pouvait encore la toucher. La musique se fraya son chemin jusqu'à l'esprit recroquevillé de Riannon et elle retrouva miraculeusement assez d'élan pour tenter une fois de plus de s'opposer à ce qui la possédait. Elle sentait bien que de l'autre côté du mur, l'étrangère jetait toutes ses forces dans la bataille et faisait réagir la glace. Serait-ce suffisant? Elle en doutait, mais elle ne perdait rien à essayer. D'ailleurs, si cela tournait mal, tuer Riannon - ou se laisser mourir - serait déjà une victoire en soi contre la glace.

Mais Riannon ne pouvait pas laisser Pluiechantante mourir à sa place. Quand elle comprit que la glace ne cédait pas de terrain mais réagissait en attaquant à son tour la Kestra'chern, Riannon paniqua. Cette femme ne méritait pas de mourir - car elle doutait que la Glace se contente de la soumettre à son tour. Les bras de givre rampaient déjà sur le corps mental de la Kaled'a'in, laissant des blessures qui furent visiblement également sur le plan physique. Sachant que le seul moyen d'épargner Pluiechantante était de rompre le contact et de l'expulser du lien, Riannon tenta de s'arracher à l'étreinte de la soigneuse. Sans force, elle n'y parvint pas lorsque Pluiechantante refusa d'abandonner et la maintint contre elle. Un moment, la Barde lutta contre elle sans résultat. Le chant de la Kestra'chern ne faiblit pas et soutint encore une fois la femme qui voulait abandonner. Et Liane rejoignit le combat - une seconde, guère plus- renforçant la motivation des deux femmes qui l'aimaient le plus au monde. Au lieu d'exacerber la jalousie que Riannon n'avait pu s'empêcher jusque là d'éprouver pour celle qui la remplaçait auprès de la petite, cela eut le don d'accorder les actions de la mère avec celles de Pluie. Elles avaient un but commun qui les empêchait de céder. Dans un effort surhumain, Riannon passa le bras par la brèche ouverte dans le mur de glace par la chaleur de l'autre femme. Saisie fermement par sa sauveuse, elle se tendit pour s'efforcer de passer entièrement, appelant au secours. Elle ne pouvait plus rester là. Il fallait qu'elle sorte.

Physiquement, Riannon ne ressentit rien quand elle se retrouva au sol collée contre la Kaled'a'in. Elle était concentrée sur ses tentatives mentales pour échapper à la glace. Celle-ci n'attaquait plus seulement Pluiechantante mais tentait de ramener Riannon à l'intérieur en l'entourant de nouveaux tentacules glacés. Riannon n'entendit pas l'appel à la Déesse mais elle vit clairement la Pluie psychique se démener de plus belle pour les libérer. La chaleur commençait à prendre le pas sur l'univers glacé qui les entourait. Pluiechantante semblait briller dans cet univers blanc et gris et sa lumière commença à inclure Riannon. Cette dernière jeta ses dernières forces dans la bataille, consciente que c'était sans doute sa dernière tentative.

Quand elle ouvrit les yeux, elle rencontra le regard de Pluiechantante. Elle était sereine, l'air épuisé mais lumineux. Elle dit quelque chose que Riannon ne comprit qu'au ton et à la douceur de la voix. Le baiser tendre que la Kestra'chern lui administra la ramena définitivement dans le monde réel. Devant ce dernier assaut d'émotion pure, à l'intérieur de Riannon, une digue se brisa. La glace éclata en morceaux. Ces morceaux se plantèrent profondément dans l'esprit de la Barde et blessèrent également la Kestra'chern. Mais une fois la douleur diminuée, le résultat était là. Le mur de glace avait été abattu. Mis à nu, l'esprit de Riannon montrait clairement des signes d'attaque, des cicatrices mal soignées, des blessures à vif. Une ombre glacée planait toujours sur elle mais elle semblait vaincue et faible, ne survivant que dans les éclats du mur plantés dans la chair mentale de la jeune femme.

Riannon prit une grande goulée d'air. Et éclata en sanglots longs et douloureux, appuyée contre l'épaule de Pluiechantante.
Il faudrait qu'on l'aide à reconstruire ses barrières, que quelqu'un empêche la glace de reprendre sa place et qu'un Guérisseur soigne son corps autant que son esprit. Mais pour le moment, Riannon et Pluiechantante pouvaient célébrer une victoire et c'est bien la Barde et non son double glacé qui pleurait à fendre l'âme contre sa sauveuse.
« Modifié: 01 janvier 1970, 01:00:00 par Guest »

Thalyana

Re: [Scénario][Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #10 le: 02 mai 2014, 11:47:50 »
Thalyana n’avait pas eu énormément de travail ce matin-là. Et c’était heureux, car elle n’avait pas énormément dormi la nuit précédente, ayant dû répondre à une urgence très tôt ce matin-là. Elle avait fait le tour de ses patients dans le quartier réservé aux gens « instables », puis était allé s’installer dans une petite salle de consultation en attendant d’avoir du travail. Avec ses patients mentalement malades, elle devait garder ses barrières solidement levées, et même en ajouter de supplémentaires pour protéger son bébé. Elle profitait donc maintenant d’être seule dans une pièce pour ne garder qu’un minimum de barrières relevées.

Soudain, elle se retrouva dans un maelström d’émotions intenses. Une très forte résolution d’abord, puis un mélange de joie, de courage, d’espoir et d’amour qui fleurait bon l’été, les arbres, la pluie… Elle dressa immédiatement un bouclier autour de l’esprit de son enfant et se précipita hors de la salle de consultation. D’autres Guérisseurs avaient passé la tête dans le couloir pour comprendre d’où venait la perturbation.

« Je vais voir… »

Ces émotions lui rappelait indubitablement quelqu’un, mais qui? Comme toutes les émanations de l’Esprit, les émotions possédaient l’empreinte propre de la personne qui les émettait. La pluie… non… l’odeur de la pluie. Alors qu’elle sortait de la Maison de Guérison, marchant et courant à moitié, elle hocha la tête avec conviction. La pluie… c’était probablement Pluiechantante. Elle ne la connaissait pas bien, mais des émotions qui sentaient comme la pluie provenaient forcément d’elle.

Thalyana devait jouer avec ses barrières, en les gardant à la fois suffisamment relevées pour ne pas être trop affectées par les émotions dégagées, mais aussi suffisamment perméables pour lui permettre de localiser leur provenance. Cela lui donnait un air absent alors qu'elle parcourait rapidement les couloirs de la Maison.

Une fois dans la cour, elle s’arrêta, écoutant brièvement son Empathie. Si en matière de projection, le Don de Thalyana était simplement bon, en matière de réception, il était très puissant. C’était ce qui avait perturbé son enfance entière. Les yeux fermés, elle tourna sur elle-même. Là-bas. Les Bardes.

Elle reprit sa course, bousculant des étudiants sur son passage, coupant à travers les parterres, prenant le chemin le plus court possible. En entrant dans le Collegium des Bardes, elle dut ajouter une nouvelle couche à ses barrières. La perturbation venait définitivement de là. Elle se précipita, inquiète. Elle sentait maintenant de la douleur, puis de l’épuisement…

Elle tourna dans un couloir, emprunta un escalier, tourna, tourna, puis arriva dans un couloir envahi par l’odeur de la pluie. Ici. Elle s’élança, s’arrêta devant une porte. Celle de la Doyenne. Elle blinda ses boucliers et ouvrit la porte, lentement, sans bruit.

Au milieu de la pièce, effondrée sur le tapis, Pluiechantante (elle avait eu raison!) tenait dans ses bras Riannon. Mieux, elle… l’embrassait? Thalyana rougit.

Même avec ses boucliers dressés au maximum, la jeune femme pouvait sentir l’énergie positive que dégageait la Kestra’chern, et l’état inquiétant dans lequel se trouvait la Doyenne. Comment?!?! Comment avait-on pu passer à côté d’un tel malêtre?

En praticienne spécialisée, certes depuis peu, en Guérison de l’Esprit, elle savait qu’elle ne pouvait déranger Pluiechantante, et qu’elle ne devait surtout pas toucher Riannon, sous peine de voir le travail de la Kestra’chern réduit à néant. Elle hésita… se mordit la lèvre… puis décida de focaliser son Empathie à elle sur Pluiechantante, en lui envoyant une impulsion minime, quasiment imperceptible. Si elle dosait mal, Pluiechantante, totalement à nu, risquait d’être déstabilisée par cette intrusion.

Thalyana respira lentement, ferma les yeux. Elle pensa lentement dans sa tête, ouvrant une voie vers Pluiechantante: Thalyana (quel goût/odeur/image/sensation avait donc son Empathie à elle?), acceptation, tenir encore un peu, présence, renforcer vite. * Je suis là, je comprends la situation, tiens encore, si jamais je peux te soutenir, j’appelle les renforts. *

Elle referma soigneusement la porte et chercha quelqu’un autour d’elle. Là-bas, une servante inquiète… elle devait posséder un soupçon d’Empathie et s'être trouvée affectée par la scène qui se jouait dans le bureau. Thalyana se précipita vers elle.

« Dépêchez-vous d’aller prévenir les Guérisseurs… demandez Charwin surtout et des gens capables de porter deux femmes. Vite! » Elle renforça encore l’urgence de son propos, espérant ainsi donner des ailes à la femme.

Elle regrettait parfois de ne pas posséder le Don de Paroles par l’Esprit comme certains Guérisseurs. Ce devait être pratique dans ce genre de situation. La seule personne avec laquelle elle pouvait parler sans ouvrir la bouche, c’était Kalaïd, et c’était le Lien qui leur permettait cela. Ce n'était pas vraiment de la Parole par l'Esprit...

Elle revint vers le bureau, ouvrant silencieusement la porte, en se barricadant le plus possible. Les choses avaient bougées. Riannon pleurait maintenant à fendre l’âme sur l’épaule de Pluiechantante. La Kestra’chern, sereine, "contacta" à son tour Thalyana pour lui dire d’entrer, ce qu’elle fit, essayant de se rendre émotionnellement aussi transparente que possible. Elle s'assit à un plus d'un mètre de la porte, en tailleur. Elle ferma les yeux, puis créa une barrière supplémentaire pour entourer les entourer toutes les trois. Elle ne faisait pas souvent ce genre de chose, mais elle n'avait pas vraiment le choix.
« Modifié: 01 janvier 1970, 01:00:00 par Guest »

Pluiechantante

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Re: [Scénario][Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #11 le: 02 mai 2014, 13:12:38 »
Au moment où Pluiechantante embrassait Riannon, elle espérait que ce dernier assaut viendrait à bout de ce mur de glace qui l’emprisonnait. Mais elle ne s’attendait pas à cette brutale explosion qui les blessèrent toutes les deux. Elle sentit, dans son esprit et dans sa chair, des lames de glace s’enfoncer. Elle résista à la douleur, la refusant simplement. Elle aurait tout loisir de se soucier de sa santé plus tard. Riannon, elle qui n’avait pas cette discipline mentale, lui transmit sa douleur, qui heureusement, diminua rapidement. Qu’était-ce donc que ce mur, cette chose? Pluichantante avait d’abord cru qu’il s’agissait d’une construction purement mentale, née de la douleur et de la solitude. Or, elle était persuadée d’avoir été blessé physiquement. Elle sentait le sang gouter à ses poignets…

Soudain, il lui sembla entendre un bruit, très léger, derrière elle. Puis elle sentit une très discrète intrusion empathique. C’était quelqu’un dont la présence appelait l’odeur et le goût de la camomille. Quelqu’un qui était là. Qui allait demander de l’aide. Qui allait les soutenir. Elle n’exprima rien pour indiquer qu’elle avait senti la présence. Elle ne voulait perturber Riannon. Mais elle était heureuse de savoir que si elle s’écroulait (ce qui n’allait pas tarder à arriver) quelqu’un serait là pour s’occuper d’elles deux.

Maintenant que la glace avait cédé, Pluiechantante pouvait voir l’ampleur des souffrances de la femme. Cela devait faire des années qu’elle était enfermée ainsi, qu’elle était lacérée mentalement, brisée, réduite à presque rien. La Kestra’chern ne pouvait soigner maintenant ses blessures. Elle doutait même d’être capable de réparer un jour totalement ce coeur meurtri. Mais elle ferait de son mieux. Quant à l’esprit de la Barde, il nécessiterait sans doute des soins constants pendant plusieurs dizaines pour retrouver un semblant d’intégrité. Mais ce travail-là serait effectué par d’autres, par ces Guérisseurs possédant le Don de soigner l’Esprit. Ils étaient rares… mais ici, au Palais, au moins trois exerçaient.

Leurs lèvres se séparèrent… et Riannon éclata en sanglots sur son épaule. Pluiechantante l’enlaça doucement, lui caressant calmement les cheveux. Maintenant qu’elle était revenue à la réalité, elle pouvait sentir plus distinctement dans sa chair les attaques mentales qu’elle avait subi. Son corps entier la faisait souffrir, elle avait l’impression d’être tombée dans un buisson d’épines acérées. Son corps commençait à trembler…

A nouveau, une odeur fraîche et pure, celle de la camomille, sembla repousser les assauts du monde extérieur. C’était une odeur si familière dans ce pays… une odeur si discrète, si… ohhh… la petite Guérisseuse, c’était donc elle. Pluiechantante sourit mentalement. Elle fut cependant légèrement perturbée par une très petite zone blanche dans leur environnement direct. Thalyana excluait volontairement une partie d’elle hors de ce cercle. Elle était donc enceinte. Quelle folie d’être venue dans cet état! Elle reconnaissait bien là l’acharnement des gens qui vivaient sur cette colline.

C’était heureux que la jeune femme ait eu la présence d’esprit de les protéger, car Pluiechantante n’avait même plus la force de recréer ses propres barrières. Elle était donc incapable de barricader Riannon. Elle était même incapable de se relever. C’était sa seule fierté qui l’empêchait de se laisser aller dans le néant bienheureux de l’inconscience… la fierté, et la crainte de voir son travail anéanti si elle rendait trop vite les armes.

Le temps s’écoula lentement. La petite Guérisseuse était immobile, physiquement tant qu’empathiquement, et n’existait dans la pièce que par sa barrière. Pluiechantante caressait  doucement Riannon, chantonnant par moment, la rassurant par des mots dans toutes les langues qu’elle connaissant, trop fatiguée pour se rappeler laquelle était la bonne. Riannon pleurait, encore et encore, vidant son corps de toute cette eau que la glace avait laissée en fondant.
« Modifié: 01 janvier 1970, 01:00:00 par Guest »

Riannon

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Re: [Scénario][Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #12 le: 03 mai 2014, 17:49:27 »
Riannon n'était plus que l'ombre d'elle-même. Ses dernières forces étaient passées dans le combat contre la glace et les Dieux seuls savaient comment elle tenait encore assez le choc pour pouvoir sangloter contre Pluiechantante. Son univers mental était souillé, en lambeaux, ses barrières étaient inexistantes, et malgré le combat, les éclats de glace survivaient - ainsi que certains sentiments très sombres. Alors que les sanglots commençaient à s'estomper, la culpabilité et l'angoisse remontaient.

A peine consciente que Thalyana les avait rejointes dans la pièce et que les secours arrivaient, Riannon s'accrochait à Pluiechantante comme à une bouée de secours. En sécurité dans les bras de sa sauveuse, elle tentait de refaire surface. Elle n'avait pas le droit de céder avant qu'elle ait dit ce qu'elle avait à dire. Ensuite elle pourrait mourir. Son envie de disparaître grandissait avec le besoin d'exprimer sa culpabilité.
Quand Pluiechantante commença à trembler, Riannon tenta de se reprendre. Elle se rendit alors compte que quelqu'un protégeait la pièce d'une barrière et qu'elle ne sentait que Pluie et une étrangère près d'elle. La voix de Pluiechantante finit par l'atteindre. Elle ne comprenait pas tous les mots mais cela n'avait aucune importance. La musicalité du ton était suffisante pour lui donner quelque chose auquel se raccrocher pour ne pas disparaître.

Un long moment plus tard, les sanglots laissèrent place à des larmes plus calmes. Riannon prit plusieurs grandes respirations, comme si elle sortait d'une apnée prolongée. Elle s'écarta doucement de Pluiechantante et d'une voix rauque et incertaine, elle parla. Au début les mots buttèrent sur ses lèvres, refusant de sortir, puis elle se força malgré sa fatigue, sa culpabilité brûlante presque physiquement audible:

"Le Roi. Il faut prévenir... le roi. J'ai... Les secrets. Le roi..."

Puis son regard brilla, plein d'angoisse et de colère:

"Liane. Il faut protéger Liane!" Elle  hoqueta: "Liane... touchée... Beltran..."

Elle sentit le noir remonter de sa poitrine compressée. Des lumières dansèrent devant ses yeux. Elle tenta de répéter une dernière fois quelque chose ressemblant à "prévenez le Roi" avant de se sentir toute molle, sans force, et que le voile noir s'abaisse devant ses yeux.

Tremblante de fièvre, Riannon se laissa engloutir par l'ombre, espérant ne jamais avoir à se réveiller. Au moins dans cet univers éteint, la douleur était loin et les conséquences de ses actes également.
« Modifié: 01 janvier 1970, 01:00:00 par Guest »

Pluiechantante

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Re: [Scénario][Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #13 le: 03 mai 2014, 18:42:50 »
Les étoiles dansaient devant les yeux de Pluiechantante, et ses oreilles bourdonnaient. Elle flottait dans un état second, bercée par les larmes de Riannon, à peine consciente. Elle se demandait à quel point elle était blessée. Allait-elle mourir? Et Riannon, allait-elle mourir aussi? Elle espérait que non. Liane avait besoin de sa mère. Et malgré tout, Pluiechantante n’avait pas envie de mourir maintenant. Elle voulait connaître la fin de l’histoire, voir Riannon guérie, Liane épanouie. Si elle mourrait maintenant, ce ne serait pas si grave, mais elle partirait frustrée à la rencontre de la Déesse.

Elle avait maintenant terriblement froid. Était-ce à cause de sang qui ruisselait? La tapis était moite sous ses genoux. Combien de sang avaient-elles perdu? Dans un coin de sa tête, Pluiechantante s’en voulu de s’être mis dans cet état. Elle avait des rendez-vous programmés… elle ne pourrait sans doute pas s’y rendre. Il faudrait qu’on les avertissent. Et Sourcedésert? Quelqu’un irait-il la prévenir que Pluiechantante était au plus mal, et qu’elle avait besoin d’elle?

Les sanglots de Riannon commencèrent à se calmer, ramenant la Kestra’chern à la réalité. La Barde essayait de parler, de lui dire quelque chose. Pluiechantante fit de son mieux pour enregistrer ses paroles avant de la rassurer d’un ton doux:

« Oui… on dira… »

Riannon s’inquiétait elle aussi de Liane. Pluiechantante, qui ne percevait plus sa présence à cause du bouclier, ne pouvait lui demander de la rassurer. Mais elle répondit avec conviction:

« Liane va bien. Beltran est là. Sinon la nourrice, oui. »

La Barde chercha encore à parler, répétant qu’il fallait prévenir le Roi. Puis elle perdit connaissance.

Le poids de Riannon évanouie dans ses bras ôta à Pluiechantante ses dernières forces. Elle s’effondra sur le tapis, serrant toujours Riannon. Puis après une brève pensée à Liane, elle se laissa sombrer dans le silence apaisant de l’inconscience.
« Modifié: 01 janvier 1970, 01:00:00 par Guest »

Thalyana

Re: [Scénario][Riannon/Pluie] Ce n'est pas la mère à boire...
« Réponse #14 le: 03 mai 2014, 19:05:15 »
Le sol sur lequel était assis Thalyana n’était pas très confortable. Et ce fait était continuellement signalé à sa tête par ses genoux. Elle soulagea mentalement la douleur tout en restant au maximum focalisée sur ses boucliers. Cela lui demandait une concentration énorme, preuve qu’elle manquait d’entraînement. Il faudrait qu’elle demande à pratiquer plus souvent. On ne savait jamais quand telle ou telle compétence pouvait se révéler indispensable.

Pluiechantante, assise devant elle, renvoyait un mélange particulier de sérénité, de douleur, de joie et d’appréhension très légère. Thalyana avisa les tâches de sang qui s’étaient formées sur les vêtements des deux femmes. Que s’était-il donc passé ici? Il était évident qu’elles ne se les étaient pas infligées entre elles, car leurs habits étaient intacts. Il était impératif que les Guérisseurs arrivent au plus vite. Une flaque sombre brillait sur le tapis, et elle faisait craindre le pire à Thalyana.

En portant son attention sur Riannon, elle eut un bref sentiment de déjà-vu. Certes, il ne s’agissait pas exactement de la même chose, mais elle reconnaissait dans l’esprit de la Barde un peu de la chose qu’elle avait maintenant affrontée par deux fois. C’était à la fois très semblable et très différent. Quoi qu’il en soit, il était heureux que ce fut une Guérisseuse de l’Esprit qui soit arrivée à la première. Elle comprenait maintenant un peu mieux les implications de la scène devant elle. Pluiechantante avait réussi par sa seule volonté (car elle ne possédait absolument pas de Don de Guérison de l’Esprit, à peine un soupçon de Guérison simple), a briser l’étau d’une construction mentale. Thalyana était impressionnée.

Soudain, Riannon parla. Il fallait prévenir le Roi? Avec ce qu’il venait de se passer, il était évident qu’il serait prévenu au plus vite. Quant à Liane, elle n’avait aucune idée de qui elle pouvait bien être. Beltran? Riannon et Beltran? Mais… Beltran ne voyait-il pas une apprentie Héraut?

Thalyana chassa ces questions de son esprit, essayant simplement de bien mémoriser les paroles de la Barde qui s’était maintenant évanouie. Pluiechantante chancela à son tour. Et soudain ce fut le vide dans son bouclier.

A ce moment-là, elle entendit un « toc-toc » empathique. Les Guérisseurs étaient arrivés et attendaient derrière la porte. Elle se leva très lentement, se concentrant pour garder son bouclier en place et alla leur ouvrir.

« Que quelqu’un me remplace pour le bouclier… en maintenir trois différents à la fois, c’est trop pour moi… »

Alder, qui était venu avec Charwin et trois apprentis, eut un mouvement de la tête réprobateur alors qu’il regardait son ventre, mais déploya son propre bouclier autour des deux femmes. Thalyana laissa le sien disparaître, ne gardant que son bouclier habituel et celui qu’elle avait érigé autour de son bébé.

« Je crois que c’est un autre cas… » annonça-t-elle en regardant Charwin droit dans les yeux. « Il faut prévenir le Roi et le Capitaine Beltran. »

« Ainsi que la seconde de Riannon. Je doute qu’elle puisse assumer ses devoir avant longtemps. » ajouta Charwin, d'un ton las.

Thalyana sortit dans le couloir, laissant ses collègues travailler. Il était évident pour tout le monde que sa journée à elle était finie. Un quart de marque plus tard, on sortit les deux femmes, chacune portées par deux Guérisseurs, pour les amener à la Maison de Guérison. Thalyana les accompagna jusqu'à l'extérieur du bâtiment. Déjà une petite foule d’étudiants et de servants s’était formée au bout du couloir. Les rumeurs les plus folles semblaient circuler parmi les gens du Collegium. Épuisée, Thalyana n’eut pas le courage d’aller y mettre un terme. Que ces imbéciles racontent ce qu’ils veulent, elle s’en moquait, ne souhaitant de deux choses: manger et Kalaïd.

[RP CLOS]
« Modifié: 01 janvier 1970, 01:00:00 par Guest »