Kalaïd réussit à tirer un demi sourire au capitaine. Certes si on ne connaissait pas les guerriers de la déesse aux yeux étoilés, y'avait de forte chance qu'on ne comprenne pas ce qu'ils étaient. Il se souvenait d'ailleurs de sa première rencontre avec An'dra. Le fameux soir où il fut marqué. Comme quoi tout le ramenait à cet instant étrange.
- Les Kal'enedral. Ce sont des guerriers particulièrement impressionnants et efficaces, même pour moi. Et vu qu'ils sont eux même liés à une déesse il a été décidé que cela serait une bonne idée que j'aille apprendre à contrôler les pouvoirs qu'Aanor m'a donnés, à leur côté, afin de pouvoir accomplir la prophétie.
Il leva les yeux au ciel... La prophétie. Depuis que tout avait été décidé pour lui, Fitz avait cette désagréable sensation de ne plus avoir le contrôle sur rien. Il était devenu inestimable, outil de destruction qu'il fallait placer, ou déplacer à la guise. Mais surtout, que l'on devait protéger, et c'est cette partie là qui l'énervait le plus.
Les paroles de Kalaïd il les connaissait, il se les était lui même ressassé, et pourtant elles continuaient à sonner creux. Il n'arrivait pas à trouver de réconfort dans l'idée qu'il n'avait fait qu'obéir. Fitz pensait qu'il aurait du trouver une solution, un moyen d'aider, d'agir, d'être là. Mais non.
- Les ordres sont les ordres n'est-ce pas ? Mais dis moi, comment je vais pouvoir regarder ce qu'il reste de mes hommes en face, en sachant que pendant qu'ils perdaient leurs camarades au combat, moi j'étais au chaud dans un lit avec ma femme ? Comment leur ordonner de mourir pour moi, si pendant qu'ils étaient dans la boue, je profitais de la chaleur d'un feu ? ses mains se serrèrent encore plus sur le manche de sa hache Ha ca, je sais parfaitement maitriser ce "don" qui m'a été fait, mais en attendant, je n'ai été capitaine que par titre et pas par les actes. Et tu le sais autant que moi: un soldat se juge par sa présence sur les champs de bataille, pas par ses belles paroles.
Il ne se sentait plus capable de leur donner des ordres, qui était-il pour en avoir le droit ?
- Non Kal, toi et moi on sait bien, qu'il est compliqué en tant que soldat d'obéir aveuglement à un homme qui n'a pas partagé de tranchée avec nous, qui n'a pas sué au combat, qui n'a pas son lot de blessures. Ho oui j'ai appris à maitriser cette malédiction, mais.... Ce n'est pas moi tu comprends? Je suis taillé pour mourir sur un champ de bataille, pour me battre au coté de mes frères, pour verser mon sang pour le camarade à mes côtés. Pas pour être protégé comme si j'étais je ne sais quelle pucelle de la cours apeurée avec ma tasse de thé et mon animal de compagnie bien au chaud au milieu de ses coussins.
Il soupirait. Certes il avait déjà mentionné tous ses doutes avec Feuille, pourtant c'était différent, elle n'était pas un camarade de combat, elle ne savait pas ce que c'était que cette envie, ce besoin, de faire son du, de s'offrir au combat, comme on s'offre à une femme. Entièrement, totalement, et sans compromis.
- Ne t'en fais pas pour le blasphème, si je suis aussi important pour elle qu'elle a bien voulu nous le faire croire, cette déesse absente, me pardonnera bien un écart de langage. il adressa un clin d'oeil à Kalaïd Je n'ai toujours pas pu voir ma compagnie tu sais ? Je ne sais pas quand ils arriveront. Ils étaient loin dans le front, tu sais que j'en avais fait une compagnie spécalisée dans les opérations de sabotage, et de destruction. Je ne sais pas combien vont revenir, combien sont encore en vie, et comment je pourrai affronter leur regard quand ils seront là.
Quelques années auparavant il n'aurait jamais imaginé diriger des hommes. Aujourd'hui ces quelques bougres qu'il avait lui-même choisi était une de ses plus grande fierté. Et il avait peur de les affronter comme un enfant qui a cassé le vase le plus cher de la maison n'ose pas regarder son père.
- Le roi a convoqué tout le palais, il a annoncé que Rafalentha était de retour sur le trône et que la guerre était terminée. Quant au reste je n'en sais pas plus, je suppose qu'ils attendent que toute les troupes soient rentrées avant de nous donner nos nouveaux ordres. Je suppose qu'il restera quelques escarmouches de rebelles refusant d'admettre la défaite, mais les mots ont été prononcé: la guerre est finie, tout est terminé.
Regardant autour de lui, il détailla chaque chariot, chaque reste, chaque paquetage.
- As-tu perdu beaucoup d'hommes ?