Auteur Sujet: Quand l'amant rencontre la fiancée  (Lu 6608 fois)

Yvelin

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Quand l'amant rencontre la fiancée
« le: 31 juillet 2017, 20:15:55 »
3e jour de la 6e décade de printemps 1485 - Luth d'Argent, auberge

Citation de: Yvelin
Chère Mademoiselle Venelgueste,

Je prends l'initiative hardie de vous écrire. J'espère ne pas avoir franchi les limites de la décence par cet acte.
Je désire vous rencontrer afin que nous ayons l'occasion de nous entretenir de notre connaissance commune et de l'avenir de nos relations. Je sollicite donc par la présente une entrevue avec vous. En effet, il me semble important que nous puissions nous rencontrer et discuter dans des circonstances permettant une certaine franchise, loin des conventions et du décorum attendus dans des occasions plus publiques.
Je vous convie donc à me retrouver le 3e jour de la 6e décade de printemps au Luth d'Argent, à la 4e marque de bougie graduée après midi. Merci de me confirmer votre venue par retour de courrier.

Je vous prie d'agréer, Mademoiselle, mes salutations distinguées.


Barde Yvelin
Yvelin avait envoyé cette lettre la peur au ventre et avait été surpris de recevoir une réponse en retour. Il s'était attendu à être ignoré ou repoussé. Mais Kateerid avait accepté son invitation et il se retrouvait maintenant à l'attendre au Luth d'Argent.

Il jouait avec sa nouvelle boucle d'oreille — un magnifique grenat avec une monture d'or ouvragée offert par Micha pour son anniversaire — et lançait des coups d'œil nerveux à la porte. Il n'était pas certain de vouloir réellement rencontrer la demoiselle en tête à tête. Il avait même le trac. Mais il en avait besoin.

Depuis que Micha lui avait parlé de ce mariage arrangé — et arrangeant — Yvelin avait senti grandir en lui un sentiment qu'il aurait préféré ne jamais éprouver : la peur. Il savait que c'était parfaitement ridicule et irrationnel. Mais il ne pouvait s'en empêcher. Et si Micha découvrait la joie d'être convens avec Kate? Si Kate le détestait et refusait qu'il continue à fréquenter Micha?

Certes, leur relation était encore jeune, et nul ne pouvait prédire si elle durerait. Kate ou pas, ils pouvaient rompre dans les décades à venir. Mais Yvelin était amoureux. Pas d'un amour passionné et déchirant, évidemment. Mais l'attirance purement physique avait été remplacée par autre chose, et il avait fini par réaliser qu'il aimait, un peu au moins, l'artisan. Il ne voulait pas que leur relation s'arrête. Il voulait la voir grandir et s'épanouir. Mais pour cela, il faudrait que Kate l'accepte. Et donc qu'elle l'accepte lui. D'où l'importance de cette rencontre.

La porte s'ouvrit et une fois encore Yvelin regarda le nouvel arrivant. Ou plutôt, la nouvelle arrivante. Gêné, il se leva et attendit que la demoiselle arrive à sa hauteur pour la saluer. La panique prenant le contrôle, il lui fit la révérence typique des Bardes, beaucoup trop formelle pour un tel lieu. Ses lunettes, oubliées dans sa tignasse, tombèrent quand il baissa la tête. Il parvint à les rattraper de justesse, juste avant qu'elles ne se fracassent par terre. Mal à l'aise, il les posa sur la table.

« Mademoiselle Venelgueste, je suis ravi que vous soyez venue. Euh... » Il baissa le regard. « Je suis le Barde Yvelin. Enfin... vous saviez ça.... euh... Je voulais vous rencontrer. Pour vous plaire. Non, pardon. Pour vous parler. Pour pouvoir parler avec vous. Rhaaaaa. » Il pesta contre lui-même. « C'est ridicule un Barde qui ne trouve plus ces mots, ne trouvez-vous pas? »

Il fit le tour de la table pour tirer la chaise afin que Kateerid puisse s'asseoir puis retourna à sa place. Nerveux, il tripotait encore le grenat à son oreille.

« Je... Comment allez-vous? Et votre atelier? »

C'était toujours bien de parler boutique avec un artisan.
« Modifié: 31 juillet 2017, 20:43:28 par Yvelin »

Kateerid de Girier

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #1 le: 31 juillet 2017, 22:39:39 »
Kateerid recevait depuis plusieurs jours un nombre assez conséquent de courrier. Son futur mariage déliait les langues, et elle recevait son lot de félicitation pour ses fiançailles.  Elle n'avait pas prévu ça et fulminait. Quelle perte de temps que de lire tout ça et de devoir répondre !
Elle s'attendait à ce genre de missive en ouvrant la lettre d'Yvelin, et fut plus que surprise. C'était d'un formel ! Ce qui traduisait, chez le jeune Barde, d'un grand embarras, du moins elle le supposait. Elle l'avait rencontré à l'occasion de la fête donnée en l'honneur de la descendance de sa future belle-soeur, et il lui avait donné l'impression d'une jeune homme assez confiant, et doté d'un caractère bien trempé, vu sa dispute avec la Bouttefeu de service.

Micha et elle n'avait pas vraiment discuté de l’idylle entre le Barde et lui. Il pouvait, s'il le voulait. Avant d'être fiancés, ils étaient amis, et elle était prête à l'entendre lui confier tout ce qu'il souhaitait sur sa vie amoureuse. Mais il est vrai que dans ce tourbillon de préparatifs et de ce que ce mariage impliquait, parler de ça était un peu délicat.

Sortir rencontrer Yvelin tombait à point nommé, Kate avait besoin d'air. Il était barde, elle cherchait un barde pour le mariage, cela lui donnait une fantastique excuse pour s'enfuir de chez elle.
Elle fut à l'heure, peu surprise de voir que son rendez-vous était déjà là. Sa grande silhouette se découpait parmi les autres, et elle failli tomber à la renverse quand il se leva. Il était très grand et elle toute petite, cela rendait leur face à face presque comique. Et si on y rajoutait le nombre incroyable de bourdes que fit le jeune homme, manifestement très tendu, elle se retint d'éclater franchement de rire. Cependant, impossible de retenir un mince sourire amusé.

"Ridicule? Un peu oui. Merci."

Elle s'assit, très à l'aise, et prit un air concentré quand il choisit de commencer leur entrevue en parlant affaire. Kate sourit et soupira avant de répondre:

"Mon atelier? Celui de ma mère vous voulez dire? Fort bien je vous remercie."

Elle n'ajouta rien à ce sujet. On ne parlait pas affaire ouvertement. On se contentait de dire que les affaires se portaient bien, voire très bien, merci, on s'en vantait entre confrères, pas plus. Et de toute façon, Kate n'était pas dans le secret des affaires de ses parents. Cependant, finalement, elle précisa:

"D'autant plus que l'atelier Venelgueste s'est allié il y a peu à un autre atelier très renommé. Dont je vois d'ailleurs une très belle pièce à votre oreille !"

Elle ponctua sa remarque d'un franc sourire et fit un signe à l'aubergiste. Celui-ci s'approcha pour prendre leur commande, et une fois parti les chercher, Kate se racla la gorge et déclara:

"Yvelin, je vous appelle par votre prénom, dites-moi si ça vous dérange, mais nous sommes amenés à devenir proches, d'une certaine façon, et pendant un temps indéterminé pour le moment, donc jouons franc jeu.  Donc Yvelin... Je pense que vous avez des questions à me poser. Je suis tout à fait disposée à y répondre dans la mesure du possible, en particulier si cela se déroule de façon... civilisée."

Sous-entendu sans se disputer Micha, sans se faire la guerre.
Kate ne pensait pas qu'il serait du genre à l'attaquer de front, et certainement pas sans le dos. Ca, c'était le genre de Firen. Mais elle restait attentive et prudente. Ce serait peut-être un mariage de paille, mais elle refusait qu'il commence sur de mauvaises bases. Elle était prête à montrer les dents s'il le fallait.

Yvelin

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #2 le: 31 juillet 2017, 23:11:17 »
Kateerid était vraiment minuscule. Il ne l'avait pas remarqué à la fête. Il était trop occupé à dévorer Micha du regard. Et à se disputer avec une Héraut un peu chatouilleuse. Certes Micha était moins grand que lui, mais il était bien plus large, ce qui renforcerait leur différence de gabarit.

Yvelin fut ridicule. Le trac le rendait maladroit (il pensait s'être débarrassé de sa maladresse sur le bateau). Et Kate ne fit rien pour le rassurer. Et abonda plutôt dans son sens quand il se qualifia plutôt de ridicule.

« J'ai toujours eu besoin d'un petit temps d'échauffement. Pour trouver la bonne partition dans ma tête. »

C'était comme si le langage n'était pas une fonction habituelle pour lui. À chaque fois qu'il devait s'exprimer, il lui fallait plusieurs phrases d'essai pour parvenir à articuler une idée cohérente. Il avait énormément travaillé sur ce problème à son arrivée au Collegium. Et il avait fini par renoncer. C'était une partie intégrante de sa personnalité. Il devait d'abord bégayer un bon coup avant de devenir le Barde qu'il était.

Yvelin avait pensé adoucir la jeune femme en lui parlant de son travail. Au contraire, celui donna des armes supplémentaires pour attaquer le jeune Barde. Elle se moqua gentiment en lui parlant de sa boucle d'oreille.

« Ah? Euh... oui. » Il rougit. « Un cadeau... pour mon anniversaire. Je crois que Micha trouvait l'ancien anneau trop simple. »

En recevant ce magnifique présent, il avait eu un bref instant l'image d'une maîtresse couverte de bijoux coûteux. Lui, en maîtresse. C'était, après tout, le genre cadeau qu'un homme offrait volontiers à son amante. Or Yvelin se voyait comme un adulte parfaitement capable de gagner sa vie. C'était sans doute pour cela que l'orfèvre avait attendu son anniversaire pour lui offrir enfin un bijou "digne de ce nom".

La jeune femme coupa court aux questions d'usage en entrant directement dans le vif du sujet. Yvelin apprécia la démarche, même si elle le prit quelque peu au dépourvu. Il comptait progresser lentement, pas après pas. Maintenant, il se retrouvait à devoir expliquer le motif de leur rencontre.

« Des questions? Pas vraiment. À vrai dire, j'espérai surtout vous rencontrer. Vous parler. Apprendre à vous connaître. Avant d'être la fiancée de Micha, vous êtes une amie. Vous le connaissez. Vous faites partie de sa vie. Il me semblait important de vous connaître, afin de mieux le connaître, lui. Et puis, avec le mariage, vous n'êtes plus seulement l'amie dont j'entends parler parfois. Vous allez devenir sa femme. » Il baissa les yeux. « Et de ce fait, vous avez certains privilèges. Comme donner votre avis sur les fréquentations de votre époux. Après tout, même s'il s'agit d'un mariage de raison, le respect entre époux est primordial, et je ne crois pas que Micha ferait quoi que ce soit qui puisse vous déranger. Et je ne voudrais pas non plus m'immiscer entre vous. Ce que vous allez partager, ce sera bien plus que je pourrais un jour rêver de partager avec quelqu'un... »

Yvelin se tut le temps que le serveur dépose leur commande. Il avait opté pour une bière. Non qu'il boive tant que cela, habituellement. Mais l'alcool lui avait semblé un soutien appréciable en cet instant.

« Et donc... depuis combien de temps connaissez-vous Micha? »

Kateerid de Girier

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #3 le: 01 août 2017, 14:48:45 »
"Micha a toujours eu un goût des plus sûr, le bijou vous sied à merveille" complimenta Kate en faisant distraitement tourner sa bague de fiançailles autour de son doigt.
Son bijou à elle était aussi une vraie merveille.

Yvelin sembla pris au dépourvu par sa franchise, ce qui était précisément la raison pour laquelle Kate en faisait preuve. Ménager ses interlocuteurs leur permettait de trop réfléchir à leurs réponses, voir avoir un coup d'avance. Kate n'aimait pas l’hypocrisie et les faux-semblant. Cacher son homosexualité était devenu naturel, mais cela avait demandé du temps. Elle refusait de rajouter d'autres mensonges à sa vie, quand elle le pouvait.

Le Barde lui accordait beaucoup d'importance dans la vie de Micha, un peu trop peut-être, sur certains points. La jeune femme but deux longues gorgées de bière épicée avant de répondre:

"C'est curieux quand on y pense, je me retrouve à parler de mon fiancé avec son... amant. Ah, la Trevale adorerait ça!"

Elle rit en imaginant la reine des ragots mettre la main sur ce secret là. Kate évitait soigneusement la femme d'Owen de Trevale, car celle-ci flairait les cachoteries plus surement qu'un Chirras sent la neige arriver.
Elle se laissa choir sur sa chaise et se balança légèrement puis commença:

"Je ne sais plus depuis combien de temps je connais Micha. Ma naissance, je suppose, nous sommes tous les deux enfants d'artisan de luxe, cela créé inévitablement des liens, même ténus. Mais on ne s'est réellement rapproché que quand j'ai commencé à me former en tant qu'ingénieure. Et c'est lui qui m'a ouvert les yeux sur ma véritable... nature."


Elle fit un sourire de connivence puis redevint sérieuse:

"Micha va devenir mon époux, mais il sera avant tout mon ami. A ce titre, je tiens à ce qu'il soit heureux. Et je sais que cela passera par sa vie amoureuse. Je tiens à l'épanouissement de la mienne aussi, donc nous nous laisseront mutuellement toute la latitude nécessaire, compatible avec nos obligations sociales et conjugales. Je ne compte pas régenter sa vie sexuelle, voire affective, mais je ne laisserai personne le rendre malheureux si je peux l'empêcher. Je parle de cet espèce de minable cafard de Firen, bien sûr."

Elle but une nouvelle longue gorgée de bière et fit un petit geste du doigt en désignant le Barde:

"Vous m'avez l'air d'un gentil garçon, Yvelin, et vous inspirez relativement confiance, mais je me souviens de Firen au début, tout en gentillesse et attention. Je veillerai à ce que ce cas de figure ne se reproduise pas. Si nous en arrivons tous les deux à ce mariage de raison, vous comprendrez bien que nous ne pourrons pas prendre le risque d'un scandale public."


Yvelin

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #4 le: 01 août 2017, 15:31:00 »
« Je n'ai pas l'habitude de porter des choses aussi... chères. » Il jeta un coup d'œil à la bague de fiançailles. « C'est magnifique. Enfin, ça ne me surprend pas. Tout ce que touche Micha devient magnifique. »

Hum... il n'était pas certain qu'il avait choisi là la meilleure formulation. Celle-ci pouvait prêter à confusion. Et il ne pensait pas être devenu magnifique depuis que Micha le touchait. Peut-être son pénis...? Confus, il rougit. Puis il tenta de reprendre le fil de la conversation.

« Vous parlez de Fleur de Trevale? Oui, elle adorerait. D'ailleurs, je l'ai entendu raconter pas plus tard qu'hier que je vendais mes faveurs à une veuve contre des bijoux et de l'argent. Je suis très heureux qu'elle me voie comme un chasseur d'héritage. Plus personne ne trouve étrange que je ne fréquente aucune fille de mon âge. »

Et Liselle trouvait cela très drôle. Yvelin en gigolo, prêt à tout pour séduire ces dames. Elle avait parlé de l'habiller de soie rouge et de nœuds, de le préparer pour sa veuve. Yvelin s'était enfui, craignant qu'elle mette son projet à exécution. Elle l'avait néanmoins rattrapé et lui avait passé un ruban rouge dans les cheveux.

Le discours de Kateerid avait bien commencé. Il sentit la peur disparaître petit à petit. Après tout, pourquoi la demoiselle chercherait-elle à priver Micha de son amant? Yvelin se surprit à pousser un léger soupir de soulagement. Puis elle parla de Firen. Et là, il se raidit. Il aurait pu se récrier qu'il n'était absolument pas comme Firen. Qu'il était un gentil garçon, justement. Qu'il ne ferait pas de mal à Micha. Que lui aussi craignait le scandale. Mais il ne put qu'ouvrir des yeux ronds et articuler vaguement :

« Je comprends, oui. » Il déglutit. Il ne devait pas se laisser impressionner. « Firen est vraiment une sale ordure. En plus d'aimer les jeunes garçons. Enfin... plus jeune que moi. » Il baissa les yeux. Il savait à quel point Micha culpabilisait d'avoir "séduit" un homme aussi jeune. « Vous savez, je suis fils d'artisan moi-même. Mon père... je crois qu'il me tuerait s'il apprenait que je suis shaych. Encore plus vu que... enfin, vous voyez... » Il prit une inspiration. « Selon leurs dires, je ne "joue" pas l'homme. »

Il devint aussi rouge que sa tenue. Comment avait-il pu dire une chose pareille? À une pareille inconnue? Elle était l'amie de Micha, là devait se trouvait l'explication. Il pouvait lui faire confiance. Elle n'allait pas se moquer, nie le trahir. Elle n'allait pas non plus être choquée ou dégoûtée.
« Modifié: 01 août 2017, 15:36:59 par Yvelin »

Kateerid de Girier

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #5 le: 01 août 2017, 15:58:49 »
Le rougissement soudain d'Yvelin suite à sa réponse fut assez parlant pour Kate. Cela lui arracha un reniflement amusé. Il semblait bien accroché, ce Barde !
Mais la rumeur propagée par Fleur était encore plus drôle.

"Il faut toujours savoir employer les talents d'autrui à son avantage ! Surtout dans notre cas je suppose. Pourquoi pensez-vous que certaines de mes promenades avec Micha nous ai emmené si souvent dans le quartier des Nobles ?"


Pour plus tard, Kate comptait sur la discrétion des Nobles shaych qu'elle croisait parfois dans certains lieux. Elle ne trahirait pas leurs accointances, si eux-même se taisaient. C'"était un contrat tacite passé entre tous ceux ne jouissant pas de la liberté d'aimer qui ils voulaient.

Yvelin, stressé, impressionné peut-être, s'enfonçait inexorablement dans des explications et des révélations presque gênantes. Honnêtement, il aura bien eu besoin d'un peu de poudre de Tran pour se calmer. Elle ne voulait pas lui faire peur. Elle claqua la langue et répondit:

"Firen est ce qu'il est et aime profiter de son charisme pour prendre barre sur plus faible, je ne suis pas surprise qu'il aille chercher son plaisir chez les plus jeunes, il me semble que Micha a évoqué Le Page. Tsss... Mais en ce qui vous concerne, ne vous méprenez pas, je ne vous compare pas à cette raclure, je dis juste qu'il existe une infinité de façon de faire souffrir l'autre, et que je serais vigilante. Je ne vous juge pas, comment le pourrais-je ? Que vous préfériez vous soumettre ou non ne rentre pas en ligne de compte pour moi, au nom de quoi? Chacun fait ce qu'il veut, tant qu'il ne descend pas trop bas, comme Firen."

Elle réfléchit quelques secondes et ajouta:

"Je suis surprise que votre père ignore vos préférences, on dit souvent qu'être Shaych aux Collegia est infiniment plus simple."

La fin de sa bière plus tard, Kate continua:

"Ce qu'il faut que vous compreniez, c'est que je serai prioritaire, parce que je serai sa femme, et que le rôle social que cela demande se joue à tous les niveaux. Vous serez, le temps que durera votre histoire, le premier dans son coeur, certainement, mais Micha aura des obligations avec lesquelles vous devrez faire, tout comme moi d'ailleurs, car vous vous doutez bien que ça ne m'enchante pas plus que vous. Ne rêvez pas trop Yvelin, pour ne pas trop souffrir. Je me ferai une règle de vous remettre les pieds sur terre si besoin, tout comme Micha le fera avec moi si je trouve chaussure à mon pied un jour ou l'autre que que cela me monte un peu trop à la tête."

D'un geste de la main, elle commanda une autre bière, laissant le choix ou non à Yvelin de la suivre dans sa consommation. Elle fit tourner les dernières gouttes de sa bière au fond de son verre, en attendant le prochain, songeuse, puis déclara:

"Et vous Yvelin, attendez-vous quelque chose en particulier de ma part?"

Yvelin semblait avoir beaucoup de choses sur le coeur, autant jouer cartes sur table.

Yvelin

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #6 le: 01 août 2017, 18:15:43 »
« Je... je n'arrive pas à m'imaginer être celui qui ferait souffrir l'autre. Je veux dire, entre le bel artisan au corps de rêve et à la popularité sans faille et le pauvre Barde maigrelet et solitaire... on imagine plus volontiers le premier abandonnant le second. » Il rit. « En tout cas, on ne parle jamais du laideron qui aurait fait souffrir le bel homme en l'abandonnant. Ou alors, je n'ai jamais parcouru les bons rayons à la bibliothèque. »

Dans sa relation avec Micha, il avait toujours imaginé qu'il serait celui laissé sur le carreau. Qu'il finirait avec le cœur en morceau. Or Kateerid s'inquiétait qu'il fasse souffrir Micha. C'était étonnant. Pouvait-il vraiment, lui, le Barde pas très beau, maladroit, briser le cœur du séduisant et populaire orfèvre? Il peinait à y croire.

La jeune ingénieure lui fit part de son étonnement, concernant le secret entourant son orientation. Il haussa les épaules.

« Plus facile? Sans doute pour ceux qui sont loin de leur famille, libre de se comporter comme bon leur semble. Moi... on pourrait sans doute dire que je manque de courage. Ou de volonté. Mais mon père... mon père déteste vraiment les gens comme moi. La manière qu'il a d'en parler... l'idée qu'il puisse dire ces choses-là de moi... c'est au-dessus de mes forces. Et puis, il a des rêves pour moi. Enfin, pas pour moi directement — je suis Barde, on ne peut rien y faire — mais pour mes potentiels enfants. » Il soupira. « Nous ne sommes pas très proches, mais je n'ai aucune envie de lui briser le cœur. »

Puis la demoiselle repartit dans une longue déclaration. Plus elle parlait, plus Yvelin la percevait comme une chatte protégeant ses petits. Elle aimait vraiment Micha. Pas d'un amour érotique, évidemment, mais elle s'inquiétait pour lui. Yvelin pouvait l'entendre à travers son discours sur les obligations sociales. C'était son excuse publique, oui. Sauver les apparences. Mais Kateerid semblait vraiment craindre pour le cœur de son ami.

« Le premier dans son cœur... »
murmura-t-il. « J'en doute un peu. » Il déglutit et reprit plus fort. « Je ne "rêve" pas, comme vous dites. Ou alors pas vraiment. Je sais très bien où est ma place. Loin derrière sa famille, son atelier et vous. » Il fit une légère grimace. « Je me suis lancé là-dedans tout en sachant pertinemment que je ne devais rien attendre de sa part. Il a été bien assez clair. Alors non, pas de rêve. En tout cas aucun que je n'encourage.»

Il s'interdisait même d'imaginer que leur relation puisse durer jusqu'à la saison prochaine. Il considérait chaque rendez-vous comme un petit miracle. Liselle lui répétait qu'il était ridicule, et que c'était son manque de confiance en lui qui le poussait à voir les choses aussi sombrement. Lui préférait se dire que c'était au contraire son bon sens et sa prudence. S'il n'avait aucun espoir dès le début, il souffrirait moins, le moment où cette relation prendrait fin. Non?

Il termina sa bière et accueillit la suivante avec soulagement. Puis Kate lui demanda ce qu'il attendait d'elle. Il n'en avait aucune idée.

Il avait voulu la rencontrer pour diverses raisons. Kate allait être la personne la plus importante pour Micha, très rapidement. Il voulait donc la connaître, comme il souhaitait connaître et découvrir tout ce que l'artisan appréciait.

Et il avait besoin de la voir pour pouvoir l'aimer ou la haïr. Les deux en même temps, probablement. Il fit tourner le verre dans sa main, songeur. Puis il observa la demoiselle.

Oui, il serait capable d'apprécier Kateerid. Une fois qu'il aurait moins peur d'elle. Car pour le moment, elle le terrifiait. Pourtant elle était minuscule, et lui, immense. Mais dans ce genre de cas, la taille importait peu. Il était un jeune homme de vingt et un ans, amoureux, inexpérimenté, face à une femme qui avait su faire sa place dans le monde.

«Ce n'est pas trop dur, tout ça, toute cette comédie? Vous n'avez pas peur? Pas de la comédie. Mais du mariage. Et de... ce qui va avec.» Il baissa les yeux, gêné. «Je sais que ça ne me regarde pas.»

Kateerid de Girier

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #7 le: 01 août 2017, 19:31:51 »
"Les livres, tous comme les balades, sont plein de belles histoires mais assez stéréotypées, je dois dire. Vous êtes certainement trop sévère envers vous-même. Si vous ne trouvez rien qui évoque votre cas de figure, chantez-le vous-même!"

Ce serait original d'entendre une telle chanson!

"Je peux difficilement parler du physique des hommes avec de tels superlatifs, mais je suis sensible à la beauté des choses, d'un point de vue artistique je dirai. Je sais que Micha est beau et que nous ferons de beaux enfants. Quant à vous Yvelin, vous êtes tout sauf un laideron."

Qu'il manquait de confiance en lui en amour, ç'en était touchant.

"Il y a peu de personne capable de comprendre ce que vous me dites en dehors Micha et moi, en ce moment même. Encore qu'en ce qui me concerne, les opinions de ma famille ne sont pas si tranchées. Ca ne se fait pas dans une famille d'artisan aspirant à la prospérité, c'est tout. Mais vous voyez à quelles extrémités cela me mène."


Elle les désigna tous les deux, comme pour résumer toute cette folle aventure.
Puis elle prit le temps de la reflexion pour répondre à ce qu'il lui disait.

"Laideron, maigrelet, loin derrière... Je ne parlerai pas à la place de Micha, dont j'ignore l'étendue des sentiments, mais je sais de source sûre qu'il ne vous voit pas ainsi. Vous semblez raisonnable, mais vous avez tout de même pris la peine de vouloir me rencontrer pour parler de l'homme que nous allons partager. Cela ne traduit pas, pour moi, d'un tel détachement. Qui voudrait d'une telle mise au point sans voir à long terme, même en s'interdisant d'y penser ? Ce n'est pas qu'une histoire de fesses, et vu le cadeau que vous a fait mon... fiancé, ça n'est pas ça non plus pour lui. Que l'on le veuille ou non, quand les sentiments s'en mêlent, quels que soient leur profondeur, on s'implique... et on souffre."

Elle lui fit un sourire doux.

"Vous semblez clairvoyant, tant mieux. Au fond, c'est pour vous que les choses seront difficiles, pas pour Micha. C'est lui le chanceux dans l'histoire, car il n'a pas à se cacher de moi de ses aventures extraconjugales que j’encourage. Mais vous, Yvelin, vous serez l'amant d'un homme marié. Et que je donne mon accord ne rendra pas tout ça plus simple pour vous parce que ça ne vous donnera jamais l'occasion d'espérer plus que ce que Micha voudra bien vous offrir. J'espère que vous avez les épaules solides et êtes prêt à souffrir. Je ne suis pas pessimiste et je veux pas vous faire de peine, mais il faut être réaliste. Je veux que vous sachiez que j'en ai conscience aussi."


Sa question le rendit songeur et sa réponse fit rire doucement Kate.

"Je joue cette comédie depuis l'âge où je sais que je préfère les femmes. Ce n'est que le cran au dessus finalement. Mais me faire peur? Oui, un peu."

Elle ne se confia pas plus, pas par manque de confiance, mais par pudeur. Elle en parlerai mieux quand ce serait passé, car mine de rien, elle angoissait. Et ce n'est pas avec l'amant de son fiancé qu'elle allait verbaliser ça. Elle préférait en plaisanter :

"Mais vous savez mieux que moi ce que vaut Micha sur ce plan là, n'est-ce pas? En ce qui me concerne, ce n'est qu'une contrainte contre la promesse de bien plus."

Pensive, elle mordilla l'ongle de son pouce et s'expliqua:

"Je parle du bonheur. J'aspire au bonheur, comme n'importe quel être normalement constitué. C'est pour ça que j'ai choisi Micha quand les Dieux ont eu la bonté de le mettre sur ma route au moment opportun. Micha est un homme bien, généreux, honnête. Je le sais. S'il n'existait pas, j'aurai préféré épouser à défaut un hétéro doté de ces mêmes qualités, lui mentir toute ma vie, et subir le devoir conjugal plutôt qu'un shaych du genre de Firen, parce que je sais que ces qualités sont une bonne base pour être relativement heureux.  Et je m'accrocherai à ce bonheur, parce que vous savez comme moi combien ne pas pouvoir vivre librement sa vie amoureuse est source de peine. J'ai besoin de m'accomplir pleinement dans tous les domaines où j'en ai le loisir, le droit. Contrebalancer le destin."


Elle s'étonnait d'être aussi bavarde, et se justifia en concluant :

"Et si cela impose de vous blesser à un moment ou à un autre, si je n'ai pas d'autre choix, car je ne suis pas cruelle, je le ferais. Le bonheur de Micha est primordial, et le mien aussi. Et il passe avant vous."


Elle but une longue gorgée de bière et haussa les épaules, amusée.

"Mais si nous sommes deux à souhaiter le bonheur de Micha, alors, je crois bien qu'il sera un des hommes les plus heureux du pays !"
« Modifié: 01 août 2017, 19:52:03 par Kateerid Venelgueste »

Yvelin

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #8 le: 01 août 2017, 21:20:46 »
Cette femme était orgueilleuse, c'était certain. Elle était en effet très jolie, même Yvelin pouvait le dire. Mais de là à affirmer que ses enfants seraient forcément beaux... Elle avait sans doute raison, cependant.

Quant à sa propre apparence, il ne se faisait aucune illusion. Il ne serait jamais de ces hommes qui attirent les regards pour leur beauté. Il savait que lorsque quelqu'un se retournait sur lui, c'était avant tout à cause de sa très grande taille. La seule chose qu'il avait pour lui était ses yeux très bleus. Mais personne ne pouvait les voir, cachés qu'ils étaient par ses cheveux et ses lunettes.

« Ne pas être un laideron est très éloigné d'être beau. Je suis ravi de ne pas être repoussant. C'est déjà ça. »

Yvelin pensait au contraire que les gens capables de comprendre sa situation étaient nombreux. Les Shaych déclarés n'étaient pas légion, et il n'était sans doute pas le seul fils d'artisan à devoir mentir à ses parents. Et contrairement à Micha et à Kateerid, il était incapable de faire semblant pour eux.

« Je ne pourrais pas me résoudre à de telles extrémités. Heureusement pour moi, mon statut de Barde me protège. Personne ne peut attendre de moi que je me marrie. On peut m'y inciter fortement, mais j'appartiens à la couronne, avant tout. »

Si Kate pensait le rassurer par son discours, elle se trompait lourdement. Ce mélange de gentillesse et de dureté était particulièrement perturbant pour Yvelin.

« Vous rencontrer me semblait la moindre des politesses. Après tout, c'est avec votre futur époux que je couche. » Il haussa les épaules. « Même si à vous entendre, je ferais mieux de m'enfuir maintenant. Est-ce le but recherché? Si oui, je crois que je préférerais encore que vous le disiez franchement. Je... »

Il avait déjà affreusement conscience de ne pas être à la hauteur, de ne pas mériter Micha. Il ne faisait pas le poids contre elle. Si elle décidait qu'il ne ferait que souffrir Micha, il préférait presque disparaître dès à présent, même s'il sentait son cœur se déchirer d'avoir une telle pensée.

« Il ne vous serait pas difficile d'inciter Micha à se débarrasser de moi. Qu'importe les éventuels sentiments qu'il éprouve à mon égard. » Pourquoi lui disait-il cela? Rêvait-il tant de souffrir? Il reprit, sur le ton de la conversation : « Il suffit de lui dire que vous me trouvez décidément jeune. Et trop amoureux. Quelques remarques pour le pousser dans la bonne direction... » Il la fixa, puis détourna le regard. « Vous êtes bien aimable de me rappeler à quel point je suis jetable. »

Le ton avait été plus amer que prévu. Mais il ne pouvait pas se retenir. Il était venu à ce rendez-vous plein d'espoir, heureux de rencontrer celle qui allait tant compter pour Micha. Et elle ne faisait que de lui renvoyer à la figure sa supériorité, son bonheur à venir, le fait qu'il n'était finalement rien à côté d'elle. Elle était compatissante, mais aussi terriblement cruelle. Et c'était difficile. Difficile de rester civilisé.

Pourtant, il voulait vraiment s'entendre avec elle. Pour Micha au moins. Pour ne pas risquer de le perdre parce qu'elle ne l'appréciait pas.

Il noya ses larmes en devenir dans la bière, retrouva son calme et essaya de reprendre ses tentatives de rapprochement avec la jeune femme. Il ne devait pas lui en vouloir d'exposer la vérité sans fard.

Évidemment, elle ne répondit qu'à moitié. Il savait en posant la question qu'il n'obtiendrait au mieux qu'une réponse partielle. C'était bien trop privé. Mais son commentaire sur les performances de Micha le mit mal à l'aise. Il l'écouta parler, s'expliquer. Il avait envie de rester braqué contre elle. Mais son discours était bien trop sensé pour qu'il puisse ne pas être d'accord. Il sentit son humeur s'adoucir et l'amertume le quitter. La fin de la tirade, par contre, le secoua. Il ne s'était pas préparé à s'entendre dire aussi crûment : je suis prête à te faire souffrir comme une merde s'il le faut. Il dévisagea la jeune femme, un peu perdu.

«Je... je l'espère. Qu'il sera heureux. Avec vous.»

Il baissa les yeux. Puis il se massa les paupières pour cacher les larmes qui, décidément, n'abandonnaient pas la partie. Il tenta de revenir aux déclarations de la jeune femme.

«Vous ne devez pas vous faire trop de soucis. Il est très doux. Et il s'est entraîné. Il sait comment faire, avec une femme. Il a appris. Je suis certain que cela se passera très bien.»

Il but une gorgée de bière.

«Si vous tenez tant à lui, alors dépêchez-vous de dire que vous refusez d'avoir Firen comme Barde. Je l'ai entendu se vanter hier qu'il était certain d'être le Barde officiel du mariage. La mère de Micha adore cet homme, et il ne peut pas lui expliquer pourquoi il ne veut pas de lui. Je peux vous donner quelques noms si cela vous intéresse. Des gens bien, compétents.»

Kateerid de Girier

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #9 le: 02 août 2017, 00:05:41 »
Kate n'avait pas vocation à soigner les complexes des autres. Elle était honnête en disant à Yvelin qu'il était tout sauf laid, mais elle ne pousserai pas ça plus loin. Ce n'était pas de son avis qu'il avait besoin pour s'en persuader.

Quand il lui fit remarquer plus crûment qu'il était là parce qu'il couchait avec son futur mari, la jeune femme lui fit un sourire goguenard. Le reste de son discours l'amusa un peu moins toutefois.
Elle l'avait froissé. Ca ne l'étonnait pas, elle avait l'habitude de pousser les gens dans leur retranchement à cause de sa franchise. Mais elle détestait prendre des gants. Elle devait déjà bien assez se tenir en société, quand elle y arrivait, alors elle ne se forçait pas ailleurs. Ca lui avait d'ailleurs valu un certain nombre d'amitié rompue, ou de relation. Si sa mémoire était bonne, la dernière fois, c'était avec une connaissance qui lui avait demandé ce qu'elle pensait d'un insignifiant fils de baron qui passait devant eux. Elle avait répondu très simplement qu'il devait être de la famille des Askhevron, mais côté cheval, et la jeune femme lui avait répondu qu'elle s'était fiancé avec lui la veille. Oups.

Dans le cas présent, elle arrondi les angles, mais parce qu'elle avait été mal comprise en partie et qu'elle refusait qu'il se fasse une fausse idée d'elle à cause de son interprétation.

"On se calme, on se calme. Vous déformez mes propos. Je sais que je suis directe, et assez sèche, mais je dis seulement ce que je pense, et la vérité. Si elle vous blesse, alors c'est que vous avez encore un travail à faire sur vous, et c'est tant mieux dans un sens que de le réaliser maintenant. Mais jamais je ne ferai ça. Micha a l'air heureux auprès de vous, vous n'avez rien fait de répréhensible, je ne vois pas pourquoi j'irai mettre le bazar dans votre histoire. Je le ferai, je vous l'ai dit, uniquement si cela met en péril l'équilibre de ma vie conjugale et sociale. Si chacun tient sa place, tout se passera bien. Et quant à être jetable..."

Elle haussa les épaules:

"... c'est un mot un peu fort, mais vous ne serez pas vraiment légitime, permanent, vous voyez ce que je veux dire ? Sans vouloir vous offenser."

Même si elle doutait qu'il prenne bien sa remarque ! D'ailleurs, il était déjà pas mal secoué, et visiblement au bord des larmes. Kate était embêtée, elle était allée un peu loin peut-être ? Que dirait Micha s'il savait qu'elle faisait pleurer son amant ? Elle n'avait pas envie de déclencher de conflit alors qu'ils n'étaient même pas mariés encore. Elle ne demandait qu'à bien s'entendre avec lui.
Elle tendit la main pour toucher la sienne, et finalement sa ravisa. Kate n'était pas quelqu'un de très tendre.

"Je place mon bonheur avant celui des autres parce que c'est humain, je ne suis pas un Héraut à me sacrifier pour le premier venu. Mais je vous souhaite, sincèrement, d'être le plus heureux possible dans votre vie, et si c'est Micha qui fait votre bonheur, alors je vous le souhaite à tous les deux."

C'était déjà un gros effort de sa part de se retenir de rajouter un "mais".

Finalement,  il repartit sur le sujet de la sexualité, ce qui permit de faire baisser la pression et changer de sujet :

"Ah? A la bonne heure alors !"

Puis Yvelin évoqua la présence de Firen à son mariage, et Kate le rassura:

"Mon amitié pour Micha n'aurait rien changé à ça. Je refuse que Firen soit le barde de mon mariage. C'est une vipère, un pervers, je ne veux pas de lui. Ma future belle-mère pourra dire ce qu'elle veut, j'ai mon mot à dire, et comme vous l'avez remarqué, je tiens rarement ma langue. Je me tiendrai à une certaine retenue avec elle, je vais entrer dans sa famille, ce qui représente beaucoup à mes yeux, mais sur ce point, je serais intraitable. Nous n'avons pas de Barde officiel chez les Venelgueste, je vais en trouver un rapidement que j'imposerai. Je veux bien des noms oui. Et je pense que Micha devra taper aussi du poing sur la table, qu'il le veuille ou non. Il a le droit de se brouiller avec des hommes sans que tout un chacun devine qu'il a couché avec!"

Elle but une longue gorgée de bière et déclara:

"Je n'ai pas peur de Firen. Je déteste positivement tout ce qui se rapproche du chantage. Je saurai le faire taire, croyez-moi sur parole!"

Elle s'avançait peut-être un peu, mais cela cadrait avec son caractère, et ce qu'elle venait d'expliquer si péniblement à Yvelin. Pour défendre l'honneur de sa famille, native ou maritale, Kate pouvait aller très loin.


Yvelin

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #10 le: 02 août 2017, 08:28:52 »
Yvelin ferma un instant les yeux, se forçant à analyser les mots avec son cerveau plutôt que son cœur.

C'était un problème général de Barde, laisser le cœur penser. Mais c'était aussi ce qu'on leur enseignait. Une musique destinée à frapper les cœurs devait venir du cœur. Certes, ils apprenaient aussi à réfléchir à ce qu'ils découvraient, mais toujours dans un deuxième temps. Là où les Guérisseurs apprenaient à tout rationaliser pour supporter leur job, les Bardes apprenaient à tout intérioriser pour faire le leur.
Enfant hypersensible, il avait toujours été avantagé pour cela. Il avait beau être une grosse tête, il prenait tout à cœur, très rapidement.

Au fond, Kateerid ne lui avait rien dit qu'il ne sache déjà. C'était la manière qu'elle avait eue d'énoncer ces vérités qui l'avait choqué. Trop froide, trop directe, trop tranchante. Elle maniait sa langue avec autant de délicatesse qu'un boucher son hachoir.

« Heureusement que vous n'êtes pas Guérisseuse mentale. Ou Kestra'chern. On peut être direct sans pour autant balancer la vérité à coup de masse. »

Il voyait bien que Kateerid n'était pas sciemment cruelle. Mais la vérité assénée sans précaution était souvent bien plus cruelle que le plus sophistiqué des mensonges.

Quant à l'idée que se faisait la demoiselle de la permanence de son statut à elle, elle fit rire intérieurement Yvelin. Il aurait eu envie de lui faire remarquer à quel point les épouses nobles étaient permanentes... sur le papier. Combien d'épouses se trouvaient délaissées au bénéfice d'une maîtresse? Combien perdaient leur influence sur leur époux sitôt les enfants pondus et leur corps déformé? Combien de couples vivaient séparés alors qu'ils s'étaient si bien entendus, au début de leur mariage? Yvelin en rencontrait tous les jours, de ces femmes qui s'étaient crues toutes puissantes et qui restaient maintenant sur le carreau, seules, à attendre le bon vouloir d'un mari qu'elles ne parvenaient plus à intéresser.

Mais Yvelin ne dit rien de cela. Il était trop blessé et trop peu énervé pour avoir envie de lui faire mal.

« Il n'y a pas besoin d'être Héraut pour placer le bonheur d'un autre avant le sien. Amoureux, souvent, cela suffit. Ou parent. Ou ami. »

Le retour à des sujets moins émotionnels fit du bien à Yvelin qui parvint enfin à reprendre le contrôle de ses glandes lacrymales. Mais il soupira, las, quand il réalisa que Kateerid ne prenait pas la menace que représentait Firen au sérieux.

« Faire taire Firen? Je vous souhaite bien du courage! Même une extinction de voix ne peut faire taire cet abruti. Vous avez peut-être votre mot à dire, mais votre langue tranchante ne pourra rivaliser avec les paroles mielleuses de cet homme. J'imagine sans peine comment il parviendra à faire passer vos exigences pour un caprice de jeune fille. » Il prit une voix légèrement plus aiguë, plus proche du timbre de ténor de Firen. « Comprenez bien, dame De Girier, j'ai souvent vu cela dans ma carrière. Une jeune fille qui éprouve de tendres sentiments pour un Barde. Et lorsque celui-ci la repousse, elle se sent ridicule, bafouée, alors que le Barde a agi pour préserver sa vertu. Et ensuite, la pauvre demoiselle se sent honteuse d'avoir agi de telle sorte, et évite le Barde qui a tout fait pour elle. Elle prétend me détester, mais au fond, elle serait ravie que vous lui fassiez la surprise de ma présence. Elle jouera évidemment les outrées, mais au fond d'elle-même, elle vous remerciera. » Il reprit sa voix normale. « Ou encore. » Puis celle imitant Firen. « Oui, c'est un caprice fréquent chez les futures mariées. Elles doivent quitter leur cocon familial et se voient imposer des changements radicaux dès leur mariage. C'est un moyen pour elles de se donner l'illusion qu'elles ont le contrôle de leur vie. Pour certaines, cela passe par des demandes un peu farfelues. Il ne faut pas céder, sous peine de leur donner un mauvais signal, dès le début. Certes, elle deviendra dame de Girier à son tour, mais vous restez l'unique reine de votre Maison. » Il soupira. « Prenez garde. Exiger ne suffira pas à vous débarrasser de lui. Si vous amenez votre propre Barde, on vous proposera simplement d'employer à la fois le Barde de votre maison et celui de la maison De Girier. » Il but une gorgée de bière. « Quant à Micha, il ne pourra pas réellement dire qu'il s'est brouillé avec Firen. Il n'osera pas. Cet homme le terrifie, à cause du pouvoir qu'il a sur lui. Car dame De Girier demandera le motif de la brouille, et là Micha se retrouvera dans l'incapacité de lui expliquer.» Il fixa la demoiselle dans les yeux. «Le pouvoir d'un Barde tel que Firen repose sur la mainmise presque totale qu'il a sur les opinions de ses "victimes". Avec son air romantique, ses cheveux couleur miel et ses chansons composées pour émouvoir ces dames, Firen est assuré de se mettre n'importe quelle femme dans la poche. Vous avez l'air de penser qu'un Barde attitré n'est qu'un musicien qu'on réquisitionne le moment venu. C'est bien plus que cela. C'est un confident, un ami presque, un conseiller. À travers sa musique, il peut partager ses opinions et chercher à influencer ses auditeurs. Et je ne parle pas là d'un mésusage du Don. Je souhaite convaincre mon auditoire de l'irrationalité d'une future mariée? Je choisis une chanson sur une fiancée un peu folle qui fait des bêtises. Nul besoin d'utiliser le Don, il me suffit de piocher dans le répertoire. Comme beaucoup, dame Kateerid, vous sous-estimez le pouvoir des Bardes. Nous sommes, avant tout, des agents de manipulation de l'opinion.»

Kateerid de Girier

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #11 le: 02 août 2017, 14:34:47 »
La remarque sur son manque de tact lui tira un haussement d'épaule blasé:

"Je n'ai jamais prétendu être le contraire. Le diplomate, chez les Venelgueste, c'est mon père, et il ne m'a pas légué cette qualité."

Elle ne regrettait pas. Elle adorait son père, il avait beau être très souvent dans la lune, c'était un vendeur hors pair, il avait un bagout impressionnant pour faire tourner la boutique et flattait tout le monde sans trop se mouiller. Mais c'est sa mère qu'elle vénérait. Son talent, son énergie, sa réussite. C'était elle, son modèle. Et Laellas avait une langue aussi acérée que celle de sa fille.

"Certainement, c'est bien la raison pour laquelle mon bonheur est lié à celui de Micha et que je suis vigilante."


Elle soupira et ajouta:

"C'est vous qui avez demandé à me rencontrer Yvelin, personnellement, je n'aurai pas fait la démarche. Je trouve ça courageux, et le courage est une qualité importante pour moi."

Le Barde lui expliqua alors qui était vraiment Firen, et Kate écoute avec attention. Elle ne voulait pas mésestimer un danger, quel qu'il soit. Visiblement, Micha lui en avait dit trop peu sur son ancien amant pour qu'elle s'en fit une opinion juste.
Cependant, même si elle devait reconnaître que le portrait qu'en dressait Yvelin l'impressionnait, tant au niveau du caractère de Firen que la façon dont Yvelin arrivait à jouer deux rôles à la fois, elle refusait de se sentir menacée. Elle avait trop d'orgueil pour ça.

"Je ne comprends pas. S'il est réellement comme ça, pourquoi le Doyen des Bardes ne fait rien pour le rappeler à l'ordre ? Ce n'est pas normal !" s'exclama-t-elle, réellement choquée. "Vous parlez de l'influence qu'il a sur ma future belle-mère, très bien, mais il n'en a aucune sur moi, et encore moins sur ma mère. Et croyez-moi, vous ne connaissez pas ma mère. Je n'aurai aucun problème à lui avouer que je ne veux pas de Firen au mariage car c'est un trou du cul manipulateur, et cela suffira pour elle. Un barde ne lui fera jamais croire que je pourrais être sensible à son charme, quand à vouloir m'affirmer, elle sait que je n'ai pas besoin de ce genre de manège. Que faut-il que je fasse, inclure mon refus de l'avoir au mariage dans mon contrat de mariage ? Employer quelqu'un pour le tenir à distance ? J'en suis capable aussi. Aller me plaindre au Doyen? Vous avez son nom ? "

Elle grimaça puis ajouta:

"D'ailleurs, vous le connaissez si bien, qu'est-ce qui le ferait fuir? Sa présence est inéluctable selon vous?"

Yvelin

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #12 le: 02 août 2017, 15:18:10 »
« Un trait que vous partagez avec Micha, alors. Il a beaucoup apprécié que je tienne tête à Firen malgré la situation et notre différence de statut. Il m'a même traité d'impulsif... »

Yvelin faillit rire quand elle s'indigna que personne ne fasse rien concernant le comportement de Firen. Quelle image avait-elle des Bardes? Les voyait-elle comme de doux rêveurs tout justes bons à pousser la chansonnette? Mais les Bardes étaient formés à devenir de véritables manipulateurs en puissance. Certes, ils n'étaient pas censés utiliser leur Don sans raison. Mais le reste des compétences qu'ils acquerraient, ils pouvaient en faire usage, du moment qu'ils restaient dans les limites de la loi. Or, convaincre une dame de vous employer n'était vraiment pas un crime.

« Mais il ne fait rien de répréhensible. Du moment qu'il n'utilise pas le Don, qu'il se contente de sa persuasion naturelle, alors il n'y a rien à en redire. Nous sommes des Bardes, pas des Hérauts. Personne n'attend de nous que nous soyons chevaleresques et nobles. Au contraire, même. Un bon Barde, selon l'opinion générale, n'est-il un homme égoïste, caractériel, qui se consacre tout entier à son art? Nous vivons de notre capacité à nous rendre indispensable, vous savez. »

En tout cas les Bardes comme Firen. Yvelin, lui, comptait devenir un Barde de haut niveau, et vivre de ses compositions et de sa musique, sans jamais avoir à mendier du travail. Être un Barde que tous réclameraient pour leurs fêtes, leurs mariages. Il rêvait même de pouvoir chanter pour le Roi un jour.

Il se força à revenir au sujet présent, même s'il aurait mille fois préféré parler d'autre chose.

« Je ne doute pas que vous saurez imposer votre volonté. Mais je doute sincèrement qu'il l'accepte sans contre-attaquer. Et c'est ce qui me fait peur. » Il soupira. « Si j'étais à sa place, je chercherais à découvrir tout ce qu'il existe de compromettant sur vous. Et ce ne serait pas bien difficile, sérieusement. Ensuite, j'écrirais une jolie chanson que je vous ferais parvenir, jolie chanson qui, si elle arrivait aux oreilles des De Girier, compromettrait votre mariage avec Micha. Car sérieusement, qui prendrait le risque de marier son précieux héritier avec une gouine débauchée? Et j'utiliserais cela pour vous inciter à tolérer ma présence. Voire même à m'inviter au mariage. » Il eut l'air désolé. « Dites-vous bien que si un Barde aussi empoté que moi est capable d'envisager un tel stratagème, Firen pourrait faire bien pire. » Yvelin n'était pas connu pour son talent dans l'élaboration de plans machiavéliques. « Moi, à votre place, je ferais mener une enquête sur les habitudes sexuelles peu ragoûtantes de cet homme. Ainsi vous auriez sous la main de quoi lui rendre la pareille, s'il tentait de vous faire chanter. Il existe évidemment l'option de vous payer un malabar pour aller lui casser la figure. Mais je réprouve ce procédé, et ce serait vraiment dommage, car malgré tous ses défauts, Firen est un musicien talentueux. Et ce serait "tricher", selon notre code de conduite. Firen est juste un connard ordinaire, comme il en existe tant. Il n'est pas plus maléfique d'un autre. Et il peut même se montrer gentil. Mais pas avec Micha. Ni moi, d'ailleurs. »

Ce n'était pas une quelconque forme de générosité qui motivait Yvelin à conseiller la demoiselle. C'était la peur. Lui aussi risquait gros si Firen faisait un scandale au mariage. Car il ne doutait pas que celui-ci le mentionnerait à un moment ou un autre. Il vivait dans l'angoisse permanente que Firen révèle sa relation avec Micha, au détour d'une chanson ou d'une conversation dans le réfectoire. Heureusement, pour le moment, celui-ci n'en avait rien fait. D'ailleurs, Firen semblait plus intéressé à mettre Yvelin de son côté qu'à s'en faire un ennemi. Il n'en était pas certain, mais il avait l'impression d'être juste assez jeune pour être au goût du Barde. Ou peut-être avait-il suscité son intérêt en l'envoyant paître de manière aussi magistrale? Il était difficile d'être certain.

« Et Firen a un avantage sur nous. Il n'a rien à perdre dans cette histoire. »
« Modifié: 02 août 2017, 15:21:53 par Yvelin »

Kateerid de Girier

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #13 le: 05 août 2017, 22:46:14 »
"Il n'utilise pas son Don, fort bien, en attendant, il y a des tas d'escrocs dans Haven qui manipulent des personnes en position... de faiblesse, et qui se font attraper, il y a une justice pour ça, les Hérauts, à la cour de Justice, ou la Garde, selon le statut de la victime. Firen a beau être un talentueux parasite, il faudra bien qu'il réponde de ses actes si cela va trop loin."

Kate prenait de plus en plus au sérieux les mises en garde d'Yvelin. Il était certain que Firen découvrirait ses penchants pour peu qu'il fouille un peu, il suffisait de la suivre un jour jusqu'à ses lieux de rendez-vous favoris.
Même si depuis ses fiançailles elle avait mis ses aventures entre parenthèse, pour ne pas risquer de faire jaser pendant cette période cruciale, il serait facile de tomber sur un de ses anciennes amantes. De fil en aiguilles, en déclarant qu'on voulait trouver quelque chose de compromettant sur elle, l'information sortirai.
La jeune femme frissonna:

"Je déteste le chantage, mais je suis toute prête à le faire chanter aussi, pour voir si la peur influe sur son talent à ce petit prétentieux."

Kate réfléchit quelques secondes pour formuler ce qu'elle avait en tête.

"Et si... Si je trouvais quelqu'un apte à lui faire croire qu'elle tombe sur sous charme, une proie semblant facile, qu'il manipulera, puis qui se retournera contre lui, une fois que ses intérêts seront engagés ? Une bonne arme pour le contrer. Personne n'est au dessus de la loi, et je compte bien qu'il le comprenne s'il se frotte à moi!"

Yvelin

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Re : Quand l'amant rencontre la fiancée
« Réponse #14 le: 06 août 2017, 08:59:59 »
À entendre Kateerid, Firen était une sorte de criminel récidiviste. La dame était-elle encore plus honorable que les Hérauts ou avait-elle grandi à ce point-là protégée des vérités du monde?

« On parle de se faire inviter à un mariage, pas de se faire léguer l'intégralité de la fortune des De Girier. Et il ne fera jamais rien de plus. Même le plus zélé des Hérauts ne pourrait voir là un motif d'arrestation. Et je ne pense pas que Dame De Girier apprécierait que vous la qualifiiez de personne en position de faiblesse. »

Certes, Dame De Girier ne lui avait pas paru extrêmement futée, mais elle ne méritait pas qu'on la traite comme une simplette. Elle n'était, finalement, que ce que la société avait fait d'elle. Il était difficile de le lui reprocher.

Entre Kateerid s'énerver et concevoir un plan pour faire chanter Firen à son tour amusa Yvelin. Elle le voyait vraiment comme un escroc, alors qu'il n'était, aux yeux d'Yvelin, qu'un abruti débrouillard. Savoir utiliser les informations qu'on possédait était loin d'être un crime. Firen ne s'était pas remis de leur rupture et il comptait faire souffrir son ancien amant le plus possible. C'était, malheureusement, très banal et à moins qu'il y ait violence ou menace, personne ne pouvait y voir là un crime.

« Le problème est qu'il ne contrevient à aucune loi! En tout cas pas encore. On ne peut pas dire qu'il fasse chanter Micha, par exemple. Il ne lui a jamais demandé de l'engager en échange de son silence. Tout cela est tacite. Quant à le manipuler... vous pouvez essayer. Mais je ne suis pas certain que cela l'empêchera de révéler la vérité de vous ou Micha, par exemple, s'il se sent menacé. À vous de bien peser vos intérêts. » Yvelin but une gorgée de bière. « Ce serait tellement plus facile si nous n'étions pas contraints au secret. Je pourrais demander de l'aide à des connaissances. Je suis certain que Firen n'oserait pas faire d'esclandre s'il était surveillé de près par un Héraut ou deux. » Yvelin soupira. « Mais pour cela, il faudrait expliquer la situation. Et c'est impossible. »

Micha ne serait jamais d'accord. Il avait tant lutté pour préserver son secret qu'il n'envisagerait jamais de le révéler à quelques personnes choisies, même si cela pouvait l'aider. Y avait-il un moyen d'alerter un Héraut de ses proches? Isabeau était sans doute, comme nombre de nobles et d'artisans, passablement homophobe. Il n'était pas possible d'aller lui en parler à elle. Et Yvelin avait bien trop peur d'elle pour oser lui adresser la parole. Peut-être pourrait-il aller parler à Raimon? S'il manœuvrait bien, il parviendrait à faire comprendre le problème au Héraut sans rien révéler concrètement. Et il connaissait Raimon, pas de manière intime, certes, mais ils avaient plus d'une fois bu des verres ensemble après une soirée musicale. S'il lui expliquait que Firen en voulait à Micha et qu'il comptait saboter le mariage, ce serait sans doute suffisant pour pousser Raimon à agir. Quant aux raisons de cette inimitié, Yvelin laisserait le Héraut tirer les conclusions qu'il voulait. Sur sa propre implication dans l'histoire aussi, d'ailleurs.

Évidemment, il faudrait faire comprendre à Raimon qu'il devrait taire ses sources. Sinon, Yvelin risquerait de perdre les faveurs du bel artisan alors même qu'il cherchait à le protéger et à l'aider.

« Je... je crois que j'ai une idée. Je vous tiendrai au courant. Mais n'en parlez pas à Micha. Je ne voudrais pas qu'il m'en empêche pour me protéger, ou une autre ânerie du genre. »