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Messages - Aaron Greystoke

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1
Il ne faut guère de temps pour que de nouveaux assaillants ne tentent de franchir leurs barricades, et le Blanc reprend son petit manège de flèches, non sans une pensée lourde pour ceux qui lui sont chers, son amant, Enju, Estevan... et plus lourde encore pour les deux anciennes grises sous sa tutelle, devenues Hérauts confirmés à présent, pour lesquelles il craint, Keryne et Enora. La première flèche qu'il tente d'envoyer vers un ennemi ne fait que le blesser (Télékinésie sur D 1D10 : 6) et n'entame guère sa progression, mais Aaron poursuit sur sa lancée et l'attaque à nouveau : la seconde flèche lui ouvre le coeur et il s'effondre au sol sans vie (Télékinésie sur D 2 1D10 : 8).

Il avise alors Jehanne aux prises avec le dernier envahisseur encore debout et poursuit son attaque envers lui, vise l'oeil de l'assaillant sans mal (Télékinésie sur C 1D10 : 10 - je te laisse décider de la ou les conséquences positives ?).

Alors la voix de Taver retentit dans l'esprit de Raïna.

On a une attaque sur le Collegium des Mages. Laissez la deuxième ligne prendre en charge les barricades et remontez fissa. Vous pouvez emmener vos frères d'armes non héraldiques.

Elle fit suivre à son Lié l'information importante aussitôt, et le visage déjà fermé du Héraut s'assombrit davantage. 

Aaron ! Taver vient de nous alerter ! Le Collegium des Mages est attaqué. Vous devez vous y rendre, tous. Laissez les barricades à la deuxième ligne !

Le Collegium des Mages. Manuchan. L'angoisse l'étreint davantage encore, et Aaron se tourne alors vers Jehanne, après un coup d'oeil à leur barricade pour l'instant calme.

- Le Collegium des Mages est assailli. Nous devons laisser la barricade à la seconde ligne et le rejoindre immédiatement, fait-il gravement, lui laissant le soin de diriger les soldats sous sa charge : ils lui font confiance, il l'a bien vu. Et les contacts sociaux n'ont jamais été son plus grand fort, encore moins à cet instant que d'ordinaire. Il ne fait qu'exposer les faits, avec un calme froid né de l'appréhension, prêt à chevaucher Raïna jusqu'au Collegium.

2
Le sourire qu'Enora lui adressa à son approche encouragea Aaron, qui s'installa sur son assentiment face à elle.

"Bien sûr que vous pouvez. Comment allez-vous ? Qu'elles rumeurs se propagent en ce moment à la cour ?"
"Ah..." fit le Héraut du Sénéchal avec un sourire. "Je ne suis pas la personne la plus à même de vous tenir au courant des derniers ragots, je ne m'y entends guère. Mais je vais bien, je vous remercie..."

Il n'avait aucune honte à avouer ne pas se tenir au courant des racontars qui se propageaient toujours comme une traînée de poudre dans les couloirs.

"Et vous, comment vous portez-vous ?"

Ce n'était pas de ces questions banales qu'on pose sans vraiment en attendre la réponse : il cherchait sincèrement à savoir comment sa pupille allait, depuis le temps. Il y avait bien longtemps qu'il n'avait pu s'entretenir avec elle, et cherchait à renouer le contact. Quand bien même les liens sociaux n'étaient pas vraiment son plus grand fort, loin s'en faut.

3
Quand l'annonce avait été faite, Aaron avait gardé le visage grave, ne laissant que peu entrevoir le tumulte qui agitait ses pensées. Et tout avait été préparé au mieux pour limiter l'avancée des assaillants, malgré les rebuffades des propriétaires alentour de la grande place, guère enchantés de voir leurs portent barricadées de la sorte. Mais leur mécontentement était un bien maigre prix à payer pour tenter de lutter contre l'invasion.

Assigné à l'une des  barricades, Aaron gardait le visage fermé par l'appréhension. Sans doute que ces barrages ne tiendraient pas infiniment, ils le savaient tous. Mais ils se devaient de les maintenir aussi longtemps que possible, et l'attaque imminente faisait monter la tension chez chacun. Autour de lui, les soldats sous le commandement de Jehanne lançaient quelques blagues pour détendre l'atmosphère, et quand bien même il s'efforce de ne pas faire trop bande à part, le Blanc ne parvient pas à se dérider. Mais même leurs traits d'esprit se raréfièrent avec le temps, avec l'approche du combat.

Les archers sur le toit furent les premiers à intervenir, tandis que le tocsin retentissait dans toute la ville. Les envahisseurs hurlaient le nom de leur dieu en chargeant la grande place, les barrière proches du tribunal s'embrasèrent soudain, peu avant que les volées de flèches ne se retrouvent suspendues dans les airs. Le Héraut serra les dents. Et bientôt quatre assaillants vinrent escalader leur barricade, et Jehanne et ses ombres s'élancèrent à leur attaque, avec une aisance née de l'habitude qui défit bientôt deux adversaires.

L'un deux se trouva même déstabilisé par le corps sans vie d'un des siens lui tombant dessus, et Aaron, aussi concentré que possible, profita de l'effet de surprise pour ramener une flèche perdue dans son dos et la mouvoir avec force de sorte qu'elle vint lui transpercer le corps (Télékinésie 1 1D10 : 8 ). Il tenta de renouveler la manoeuvre sur le dernier assaillant, mais ne bénéficia pas de l'effet de surprise cette fois et l'autre dévia la seconde flèche (Télékinésie 2 1D10 : 6), il ne s'attendait cependant pas à subir une seconde attaque coup sur coup et le second projectile fit mouche (Télékinésie 3 1D10 : 7).

4
La conversation trop longtemps repoussée d'Aaron avec Manuchan avait soulevé un point que le Blanc avait, là encore, trop longtemps délaissé. S'il s'était enquis par lettres ou par ouï-dire du bien-être d'Enora, il n'avait guère eu l'occasion de s'entretenir avec elle en personne et de lui renouveler l'assurance de son soutien. Pourtant, l'histoire de la jeune blanche l'avait touché davantage qu'il ne le lui avait laissé entendre, et il s'inquiétait toujours sincèrement de sa situation personnelle, tout autant que de celle de Keryne, devenue Héraut à part entière au cours des dernières années écoulées.

Seulement Enora était Flèche, et souvent par monts et par vaux. Il lui fallut donc attendre son retour à Haven pour pouvoir mettre en application la décision qu'il avait prise de passer un moment en sa compagnie. Son retour à Haven et un moment de calme qu'elle pût s'octroyer et qui coïncidât avec son propre emploi du temps chargé. Et le temps du déjeuner sembla opportun : il la vit se diriger vers le réfectoire et pressa à son tour le pas pour la rejoindre. Lui-même n'avait pas déjeuné et il était bien temps de subvenir à ce besoin primaire. Ainsi, à la suite de la jeune femme, il pénétra dans le réfectoire et se dirigea résolument vers elle une fois son assiette emplie.

- Bonjour Enora, fit-il simplement en l'approchant. Puis-je ?...

Il désigna d'un geste la chaise face à elle, souriant aimablement à la jeune Héraut dont il se sentait responsable, attendant son accord pour s'installer.

5
Il n'aimait pas se sentir aussi vulnérable, aussi... Faible. Pourtant c'était loin d'être l'idée juste, simplement une dérive de son attitude habituelle. Il ne se montrait que peu expressif, ses sentiments envers Manuchan mis à part, et laisser ainsi couler d'amères larmes n'était pas pour lui plaire. Là dans les bras du mage, il avait l'impression d'être à nouveau ce petit enfant maltraité, et ça n'avait rien d'agréable.

Le Maître des Vents accrocha son regard pourtant comme il s'excusait presque d'avoir laisser ses pleurs s'exprimer, et il y lut ce qu'il avait besoin d'y voir, et nulle pitié débordante qu'il eût du mal à accepter.

-   « Ce n’est pas grave de pleurer, tu sais ? je n’aurais probablement pas attendu si longtemps. J’espère juste que, quelque part, ça t’a fait du bien et si tu le souhaites, plus tard, nous pourrons en parler. Sauf si tu ne le veux pas. »

Le Blanc hocha sobrement la tête. Le temps des aveux aussi maigres fussent-ils était passé pour lui, et il ne souhaitait pas s'éterniser sur le sujet. Il n'en avait pas la force. Pas ce soir en tous les cas. C'était déjà une belle avancée pour lui que d'avoir évoqué brièvement ce qui lui était arrivé. Il se concentra donc sur son Compagnon, dont la présence était une bénédiction de chaque jour à ses côtés, et comme chaque fois qu'il en était témoin, la proximité entre son amant et la céleste créature lui réchauffait le coeur. Le geste affectueux du professeur sur le chanfrein de Raïna n'y échappait pas et le remerciement muet qui y était associé lui valut un coup de tête affectif de l'animal.

Vint alors le temps des soins à prodiguer à sa monture, et Aaron y passa peut-être un peu plus de temps que d'ordinaire, cherchant dans sa proximité et celle du Mage conjointes le réconfort dont il savait avoir besoin. Puis après une dernière caresse affectueuse, le cheval se sépara de son Lié, le laissant volontairement auprès de l'élu de son coeur pour les laisser regagner les Collegia.

6
"Vous voulez des vacances?!"

La surprise était visiblement de taille, vu la réaction plutôt vive - et inhabituelle - du Héraut du Roi. Il fallait bien admettre qu'Aaron n'était pas vraiment habitué à faire ce genre de demande, et s'il resta relativement stoïque, il devait bien admettre ne pas savoir ce que cette stupeur signifiait.

Alemdar se leva pour sortir un dossier, son dossier, et le feuilleta avant de lever à nouveau le regard sur lui. Presque impassible, le blond attendit la suite.

"Savez-vous depuis combien de temps vous n'avez pas pris de vacances, Aaron?"

Ah... C'était donc ça... le Héraut du Sénéchal resta quelque peu songeur, cherchant dans sa mémoire la date exacte desdites vacances, et se contenta de répondre ainsi :

- Depuis la dernière fois qu'Aranell m'en avait imposées...

Il ne voyait aucune raison de taire une information qui figurait certainement dans son dossier. Et s'il n'avait pas la date exacte en tête sur le bout des lèvres, le fait qu'elles datent d'avant la mort du précédent Héraut du Roi donnait un ordre d'idée sur le temps passé depuis ses dernières vacances.

"Vous voulez aller à Rethwellan? Allez à Rethwellan. Sans uniforme par contre. Et j'aurais du mal à me passer de vous plus d'une saison."

Il était quelque peu surpris que les choses se passent aussi... facilement. A quoi s'était-il attendu ? Il n'en savait trop rien, mais il connaissait sa position, et le devoir qui lui incombait, et ne s'attendait pas à ce que sa requête soit si aisément acceptée. Ca l'arrangeait cependant grandement de ne pas avoir à argumenter outre mesure, et il hocha sobrement la tête.

- Sans uniforme, bien entendu. Je ne l'entendais pas autrement. Et je serai de retour au plus tôt.

Avant qu'une saison complète se soit écoulée, assurément. Le trajet jusqu'en Rethwellan et retour entamerait évidemment le délai imparti, mais il ne pensait pas avoir besoin de passer plus de deux décades dans le pays de son amant. Il imaginait d'ailleurs être de retour avant la fin d'une saison, mais qui savait ce qui les attendait ?

- Je vous remercie, ajouta-t-il sincèrement.

Le voyage était important pour le Mage qui partageait sa vie, alors il l'était tout autant pour lui, et savoir qu'il pouvait partir serein n'était pas anodin. Même si ses pensées vagabonderaient très certainement vers son devoir et l'inquiétude risquerait fort de le gagner à mesure que le temps passerait au loin...

7
Quand Alemdar avait été élu, la pilule avait été difficile à accepter pour Aaron. Le voir prendre la place d'Aranel n'avait pas été une étape facile à franchir, mais force lui avait été d'admettre, avec le temps, que le Héraut du Roi remplissait parfaitement son rôle. Et c'était tout ce qu'il était en droit d'attendre de sa part. Ca n'empêchait pas que sa désapprobation évidente quant à sa relation avec Manuchan le dérangeait, bien qu'il s'efforçât de laisser leurs divergences d'opinions personnelles de côté pour assumer leurs fonctions respectives comme ils le devaient. Il n'en restait pas moins que leurs relations restaient froides, seulement mues par leurs devoirs.

Etait-ce d'avoir à formuler une requête inhabituelle face à cette personne qui ne lui attirait aucune sympathie ? Ou les souvenirs ravivés par sa conversation la veille avec son amant ? Voilà que face à la porte du bureau de son supérieur, il commettait un premier impair en omettant de se présenter en premier lieu. Il se morigéna mentalement et ferma les yeux pour se recomposer un masque neutre le temps que la porte s'ouvre devant lui.

"Oui, Héraut Aaron? Que me vaut l'honneur de votre visite?"

Sur l'invitation d'Alem, Aaron prit place face à lui, droit comme un i, voire quelque peu raide, et ne tourna pas autour du pot : ils allaient généralement droit au fait et se contentaient du strict nécessaire, il ne voyait aucune raison de faire autrement.

-   « Pardonnez mon intrusion, je n'ai guère coutume de venir formuler telle requête. Mais je souhaite prendre quelques vacances pour me rendre en Rethwellan. »

En conséquence de quoi, il lui faudrait s'absenter plusieurs décades, à l'évidence... Mais le Héraut du Sénéchal ne comptait pas s'éterniser dans le pays voisin, quand bien même il accédait à la demande de son amant : celui-ci savait quelles étaient ses fonctions, et il reviendrait assurément les assumer assez rapidement...

8
Il avait besoin de soutien pour évoquer ce qui, malgré les années, restait un traumatisme dont il ne se remettait pas complètement. Les blessures infligées par son tuteur avaient marqué son corps autant que son esprit, et s'il avait grandi et s'en était largement détaché, elles laissent toutefois leur marque sur lui. En ressortait qu'il refusait catégoriquement de les évoquer, d'ordinaire, car leur souvenir restait douloureux. Il n'en restait pas moins que les taire ne les effaçait pas, elles étaient toujours là, dans un recoin de sa mémoire. Alors il serrait la main de Manuchan dans la sienne en évoquant ces douloureux souvenirs, à peu de mots. Il en avait toujours été avare, après tout.

Et si pour le Mage, les révélations semblaient soudaines, elles avaient occupé les pensées du Héraut pendant une bonne partie de la journée, et il s'était convaincu qu'il était temps de les partager - enfin - à l'homme dont il partageait la vie. Est-ce qu'il avait honte ? Il n'en était pas très sûr. Mais il souffrait encore à les évoquer, ces sévices, c'était la seule certitude qu'il avait à cet instant, et quand son amant vint se blottir contre lui, il le serra dans ses bras, enfouissant sa tête au creux de son épaule. Jamais sans doute ne s'était-il montré aussi vulnérable.

-   « Tout va bien mon amour…. Nous sommes là. »

C'était, à cet instant, tout ce dont il avait besoin. Quelque part, il y avait toujours cet enfant qui ne comprenait pas ce qui lui arrivait, qui souffrait en silence, et que Raïna avait sauvé. Là dans les bras de Manuchan, il était de nouveau cet enfant, et pour la première fois depuis de longues années, il s'autorisa à verser d'amères larmes, entouré des deux êtres les plus chers à son coeur.

Lorsqu'elles se tarirent après de longues minutes, il s'écarta légèrement du Maître des Vents, et passa une main quelque peu tremblante sur son visage. Il n'aimait pas se montrer ainsi, mais s'il y avait bien deux créatures face auxquelles il pouvait se le permettre, c'était bien le Mage et son Compagnon.

-   « Ce n'était pas que je ne te faisais pas confiance ou quoi que ce soit de ce genre », reprit-il finalement, « mais.. j'imaginais bien que ça finirait ainsi... »

Et ce n'était, à l'évidence, pas une démarche qu'il faisait aisément. Et visiblement, il était déjà pressé d'y mettre un terme, comme il se tournait vers la céleste monture à leurs côtés pour écarter les souvenirs douloureux.

-   « Si nous nous occupions de toi, maintenant ?... »

La démarche était évidente : il souhaitait passer à autre chose.

9
1ère décade d'été 1485

C'était bien beau de promettre qu'il allait faire la demande à ses Supérieurs pour accéder à celle de Manuchan, c'en était une autre que d'en faire la démarche effective. Les relations entre Alemdar et Aaron n'avaient jamais été que purement professionnelles, et si le blond pensait que le Héraut du Roi appréciait sa dévotion à son devoir, il était évident que celui-ci n'appréciait guère sa relation avec le Mage. Il ne s'en cachait pas vraiment, tout comme le Héraut du Sénéchal ne se cachait guère de son aversion pour son intolérance. Les relations entre les deux hommes restaient donc froides, malgré leur capacité à mettre cette inimitié de côté pour le bien de Valdemar.

Et jusqu'alors, Aaron n'avait jamais eu à formuler de demande particulière, qui pût le mettre en porte-à-faux face à l'autre Blanc. Il n'était pas dans ses habitudes de manifester d'exigence particulière, et malgré les conseils de Pluiechantante, il restait bien en peine de prendre du temps pour lui autrement que ses nuits auprès du Maître des Vents ne le lui permettaient, aussi se trouvait-il assez embarrassé de demander ce congé exceptionnel nécessaire au voyage qu'il envisageait avec son amant. Il avait promis, cependant, d'aller poser la question, et se trouvait donc devant le bureau d'Alemdar, inspirant profondément avant d'y frapper deux coups secs à la porte.

- Héraut Alemdar, auriez-vous une minute à m'accorder ?

Guère plus, il ne comptait pas vraiment s'étendre sur les motivations de sa requête, encore moins faire durer cette entrevue davantage que nécessaire.

- /* Tout ira bien... */ le rassura mentalement son Compagnon.
- /* Pourvu que tu dises vrai... */

Il n'avait aucune envie de devoir présenter des excuses à Manuchan pour ne pas être en capacité de l'accompagner.

10
C'était devenu quelque chose d'habituel, que Manuchan accompagnât Aaron auprès de Raïna, mais que le Héraut délaissât ses fonctions pour un voyage de convenance était bien plus extraordinaire, et Aaron ne fut guère surpris de voir la stupeur se peindre sur les traits de son amant. Pour autant, il restait sincère : il accompagnerait le Mage si son devoir ne lui imposait pas de rester. Il y avait des lustres qu'il n'avait pas demandé congé, et la fatigue accumulée aurait tôt fait d'avoir raison de lui. Son Compagnon ne lui avait-il pas déjà à maintes reprises conseillé de prendre du repos ? C'était sans doute l'occasion rêvée de le faire, le Blanc savait que sans obligation d'un autre ordre, il serait bien en peine de cesser de se dévouer à sa cause de son propre fait.

-   « En ce cas, je te laisse gérer les formalités de ton côté, pour ma part, cela ne devrait pas être trop compliqué mais il faudra tout de même que je me prévoie une monture adéquate et je compte sur ton aide pour savoir tout ce qui sera nécessaire à un tel voyage. En tant que héraut, tu dois certainement en savoir plus que moi sur le sujet. »

Le blond hocha simplement la tête, avant de rendre son baiser à celui qui partageait sa vie. Quand leurs lèvres se séparèrent, il laissa la main du Maître des Vents glisser dans la sienne, et resserra son étreinte sur elle.

-   « Tu veux partir maintenant pour le champ ou tu préfères qu’on reste encore un peu ? »
-   « Je ne crois pas me tromper en affirmant que Raïna se montre quelque peu impatiente... »

En réalité, il était tout aussi impatient qu'elle. Passer du temps avec sa moitié n'était pas qu'une requête du cheval blanc, mais bel et bien une nécessité pour lui aussi. Un moyen de se ressourcer. Une des seules pauses qu'il s'octroyait, de même que ses nuits en compagnie de l'homme à la mèche blanche qu'il guidait déjà au dehors de ses appartements. C'était ces moments dont il avait besoin pour se donner à fond ensuite, dans sa tâche. Conversant de tout et de rien sur le chemin, Aaron ne délaissa la main de son amant que pour venir flatter l'encolure de son Compagnon, à peine parvenu au champ. Dans un geste tendre qui ne laissait aucun doute quant à l'affection entre l'homme et sa céleste monture, il vint poser son propre front sur le chanfrein de Raïna, les yeux clos, pour quelques instants d'une communion simple avec celle qui l'avait élu, il y avait bien longtemps à présent. Il avait besoin de son calme, et de sa force, aussi, pour aborder le sujet qu'il repoussait depuis trop longtemps.

Alors seulement se tourna-t-il vers Manuchan et lui tendit-il à nouveau la main avant de reprendre la parole, après avoir inspiré profondément - un geste qui ne laissait que peu de doute quant à l'imminence d'une conversation difficile.

-   « Il y a bien longtemps que je t'ai promis que je t'expliquerai... » commença-t-il, cherchant toujours ses mots bien qu'il se soit répété en boucle depuis la matinée qu'il accomplirait sa promesse le jour-même. « Il est plus que temps que je tienne cette promesse, n'est-ce pas ?... »

Raïna pencha la tête pour venir la poser sur l'épaule de son élu, lui assurant son soutien muet. Aaron détourna pourtant le regard, comme les souvenirs affluaient, avec un peu trop de vivacité.

-   « J'étais encore enfant quand j'ai reçu les blessures qui ont laissé ces cicatrices qui barrent mon dos... Enfant, et orphelin. Le tuteur à qui on assigna ma garde était... disons particulièrement strict... Et sa fille, d'une espièglerie sans pareille... Mais je ne savais pas lui dire non... et je la suivais dans ses bêtises... et ça se terminait... comme ça... »

Il n'avait pas besoin de montrer les marques sur son dos, le Mage les connaissait par coeur. Il n'avait pas besoin non plus de se plonger dans son regard pour savoir que ses prunelles ocres brillaient sans doute un peu trop.

-   « L'élection de Raïna m'a sauvé... littéralement... C'est... C'est aussi pour ça que mon rôle me tient particulièrement à coeur. Tu comprends ? »

11
-   « Tu veux que je vienne avec toi ou vous préférez restez seuls tous les deux ? »

Son amant blotti dans ses bras, Aaron garda le silence un instant, le temps que son Compagnon ne réponde de lui-même à la question posée. Et sans grande surprise, il l'entendit lui adresser dans sa tête un /* Nous sommes un */ sans équivoque.

- Si tu as envie de te joindre à nous, tu es le bienvenu.

Après une journée d'enseignement, il pouvait avoir davantage envie de se reposer, mais le Blanc supposait qu'il aimerait tout autant rester en sa compagnie, tout comme il n'était pas pressé de se passer de la sienne. Et Raïna appréciait le contact du Mage, et, comme elle venait de le souligner, n'envisageait pas un instant de les séparer. Au cours des quatre années qui venaient de s'écouler, elle avait plus d'une fois manifesté son approbation de leur relation - à commencer par le coup de pouce qu'elle leur avait donné tout d'abord - et acceptait parfaitement la présence du Maître des Vents lorsque son Elu venait la rejoindre.

Cela étant, les songes de son amant ne lui échappaient pas totalement, et il posa la question directement, s'inquiétant de le voir quelque peu préoccupé.

-   « Préoccupé… C’est un grand mot. Disons que j’ai un projet dont je souhaitais te parler, mais je ne veux pas non plus t’embêter avec…»

Son regard plongé dans les lacs gelés qui lui faisaient face, il attendit la suite.

-   « En fait, j’ai envie de retourner dans mon pays natal… En Rethwellan. Pas pour m’y installer rassure toi. Simplement, retrouver cet air, ce paysage, ces gens et peut-être même mes parents. Je ne sais même pas s’ils sont encore en vie. Peut-être que je m’en veux un peu finalement de ne pas être revenu vers eux. »

Aaron hocha la tête. Pour sa part, s'il lui était donné la possibilité de connaître ceux qui l'avaient mis au monde, ne serait-ce que de converser avec eux une fois, sans doute qu'il le fît avec joie... quoi qu'il craignît l'impact d'une telle rencontre, après toutes ces années d'absence. Manu, lui avait connu les siens, grandi avec eux. Et depuis nombre d'années à présent, ne les avait pas revu. Il comprenait ce besoin de revenir sur ses terres natales, bien qu'il ne les partageât guère : les siennes n'apportaient pas d'heureux souvenir...

-   « Viendrais-tu avec moi ? »
- Si ma présence n'est pas requise à Haven, bien sûr. J'irai poser la question demain si tu le veux...

Il ne voyait aucune raison de refuser d'accéder à la demande de son amant, pour autant que ses services ne fussent pas réquisitionnés. Mais tous savaient comme il était dévoué à Valdemar, et il ne comptait ni les heures, ni les jours à son service. Quelques vacances exceptionnelles ne seraient peut-être pas une mauvaise idée...

/* Bien au contraire... */
- Et Raïna a l'air de valider ton projet... fit-il en souriant davantage.

L'affection de son Compagnon pour son amant était plus qu'appréciable, et après toutes les années où elle avait rejeté les personnes qui avaient pu lui tourner autour ou dont il avait pu s'éprendre, il se surprenait encore, parfois, à en être étonné.

12
-   « On ne peut mieux, je sors de mes cours comme tu t’en doute. Il faudra peut-être qu’on songe un jour à s’établir dans des quartiers communs pour nous éviter tous ces déplacements. »

Le blanc hocha légèrement la tête. Ses appartements lui manqueraient, c'était un fait. Il y avait passé tellement d'années qu'il concevait avec peine de s'établir ailleurs. Pour autant, il ne rejetait pas l'idée. Le côté pratique de la chose ne lui échappait pas, et il ne pouvait nier qu'officialiser davantage leur relation en partageant un logement commun avait de quoi le séduire. Mais ça n'empêchait un brin de nostalgie de s'immiscer en lui face à l'éventualité de quitter la pièce qui l'entourait.

- Il faudra sans doute qu'on y réfléchisse oui...
-   « Et toi, comment s’est passée ta journée ? »
- Bien. Je n'ai pas eu le temps d'aller voir Raïna encore, mais ça a été...

/* Un tort qu'il faudra songer à réparer... */
/* Je ne l'entendais pas autrement ma douce. */

Un sourire flotta sur ses lèvres comme il clôturait son échange mental avec sa moitié en le résumant à son amant.

- ...et il faudra que je passe par le Champ des Compagnons avant la nuit, donc...

Le Mage connaissait à présent suffisamment la relation du Héraut avec son Compagnon pour deviner l'intervention de cette dernière. Et le blond ne s'en cachait pas le moins du monde, de toute façon. Raïna faisait partie de lui, de sa vie, de son être, autant que sa fonction elle-même ou sa relation avec le Maître des Vents.

Un baiser chaste vient effleurer ses lèvres avant que son amant ne blottisse son visage au creux de sa nuque comme il aimait si bien le faire, et Aaron posa sa tête sur celle de Manuchan en un geste tendre qui lui était tout aussi coutumier.

- Tu as l'air songeur... finit-il par laisser entendre, sans toutefois se laisser aller à épier les émotions de l'homme qu'il aimait. Quelque chose te préoccupe ?...

La tentation restait assez grande, pourtant, mais il maintenait ses boucliers dressés, de sorte à ne pas s'immiscer dans les ressentis du professeur. Il gardait ça pour d'autres moments plus intimes, lors desquels il usait parfois un peu trop de son Empathie. Et la question n'était pas complètement anodine, par ailleurs. Lui-même songeait à cette promesse faite il y a bien longtemps à présent, et qu'il espérait parvenir enfin à tenir : celle de dévoiler enfin les origines des blessures qu'il gardait secrètes depuis toutes ces années. Ca n'irait pas facilement, mais il ne voulait plus garder cette part d'ombre tapie quelque part entre eux. Il ne savait pas trop encore comment il relaterait la chose, il ne savait pas, surtout, comment il y réagirait, mais il ne voulait plus se taire plus longtemps. Quand bien même rouvrir la blessure ne serait pas sans douleur, il en était conscient.

13
La Taverne de Haven / Re : [Scénar] Le début de la fin
« le: 25 mars 2020, 20:48:04 »
Allez... trêve de tergiversations, Aaron est à la disposition de Valdemar, comme de bien entendu ^^

14
La Taverne de Haven / Re : Discord du forum
« le: 25 mars 2020, 15:29:01 »
Je n'aurais pas dit mieux que mes consoeurs au-dessus  ^^

15
Le temps filait à une vitesse folle, et Aaron avait parfois l'impression de le voir lui échapper. Mais si l'Orbe n'avait pu être sauvée, les dernières années ne lui laissaient pas que le goût amer de la défaite, et sa relation avec Manuchan n'était pas étrangère à son bien-être. Oh ! Il y avait parfois eu des écueils, et le caractère sanguin du Mage face à son obstination à ne rien dire de son passé n'avait pas toujours permis d'éviter les heurts, mais ils avaient toujours su se retrouver, quand bien même le blanc n'avait toujours pas réussi à se résoudre à faire la lumière sur ce qu'il gardait secret.

Non pas qu'il n'ait pas confiance en son amant, bien loin de là. Il savait pouvoir s'y fier les yeux fermés. Mais les souvenirs avaient été mis sous clef il y a bien longtemps, et il n'était pas très heureux - pour ne pas dire complètement réfractaire - à l'idée d'en déverrouiller la porte. Et ça avait parfois assez mal tourné entre eux, comme poussé dans ses retranchements, il avait fini par laisser la conversation s'envenimer et hausser le ton lui aussi.

Il se souvenait particulièrement de la seule fois où Raïna avait parlé directement à l'enseignant alors tout récemment nommé. Le ton était monté, comme il refusait, une fois de plus, de répondre aux questions concernant les cicatrices qui barraient son dos, se bornant chaque fois à répondre qu'il ne voulait pas en parler. Les évoquer ravivait les blessures, et il n'était pas prêt à les rouvrir complètement. Et sa propre douleur psychique devait suffisamment inquiéter son Compagnon, alors, pour qu'elle s'immisce dans la dispute et s'adresse à l'homme à la mèche blanche directement.

- Arrête, je t'en prie, Manuchan, avait-elle laissé filtrer d'un ton plaintif.

Jamais auparavant elle n'avait entrepris telle démarche, et elle ne l'avait pas réitérée par la suite. Il avait fallu qu'elle jugeât que la situation prît une tournure par trop nocive pour qu'elle se résolût à agir de la sorte. Et peut-être était-ce alors la seule chose qui eût pu désamorcer le conflit. Estomaqué, Aaron était resté une seconde interdit, avant de prendre son manteau et de quitter en trombe ses propres appartements. Plus tard, il avait retrouvé son amant, pour lui présenter des excuses pour son emportement, et lui promettre qu'un jour, il lui parlerait, quand il s'en sentirait prêt.

Ce jour n'était pourtant pas encore arrivé, et il en ressentait par moments un certain remords.

Et puis les affaires du Royaume reprenaient toute la place, et il n'y pensait plus trop. Ou seulement dans ces phases de semi-éveil, à la lisière du sommeil, dans les bras de celui qu'il aimait.

Il achevait de retranscrire quelques notes quand la porte de son appartement s'ouvrit, et n'eut guère besoin de se retourner pour savoir qui pénétrait dans ce lieu : une seule personne faisait ici comme chez elle, et un sourire illumina ses traits comme il se décidait à faire face à Manuchan, comme à chaque fois qu'il posait ses prunelles ocre sur lui.

-« Bonjour mon amour… »
- Bonjour mon coeur...

Délaissant ses notes, le Héraut s'était levé pour s'approcher de son amant et venir l'enlacer tendrement. Si, aux balbutiements de leur liaison, il osait à peine se rapprocher de lui en public, il avait fait de nombreux efforts de ce côté, et ne ressentait plus de gêne à le prendre dans ses bras en public, bien qu'il gardât une certaine pudeur naturelle. Sa main trouvait plus naturellement la sienne, et il s'autorisait des baisers qui lui semblaient inconcevables au tout départ. Il n'y avait que lorsqu'il devait représenter son poste qu'il se montrait quelque peu plus distant, mais il avait appris à laisser le costume de Héraut du Sénéchal de côté autant qu'il le pouvait, pour le bien de leur relation.

- Comment vas-tu ? lui demanda-t-il avant de déposer un tendre baiser sur ses lèvres, ravi de voir son attention détournée des parchemins pour la soirée.

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