Dyalwen ne put retenir un léger sourire en voyant la fillette de rapprocher du bassin et s'asseoir au bord. Elle semblait moins effrayée. Tant mieux. L'idée qu'elle puisse faire peur à qui que ce soit était vraiment trop dérangeante. Aussi, pour tenter de chasser définitivement la frayeur de la petite page, la rouquine tenta-t-elle d'engager la conversation, tout en terminant d'ôter son uniforme. Sans succès. Soit elle ne voulait pas parler de ses leçons… soit elle avait les yeux fixés sur Tisia ? Surprise, la Grise en resta un instant sans voix, tandis que la petite bafouillait.
Ce n'est pas de moi qu'elle a peur. Enfin, pas que.
Mais je suis un Compagnon !
Oui… Recule.
Pourquoi ? Je ne vais pas lui faire de mal !
Recule, c'est tout. Reste derrière moi.
Tisia, perplexe, obtempéra toutefois, et fit un pas en arrière.
Dyalwen, comme Tisia, avait du mal à concevoir qu'on puisse avoir peur d'un Compagnon. Bon, il fallait reconnaître qu'elle avait déjà du mal à comprendre qu'on puisse avoir peur d'un cheval. Elle, elle avait grandi au milieu des équidés, et son père l'avait juchée sur le dos de l'un d'eux presqu'avant qu'elle ne sache marcher. Mais ne pas partager la crainte de la fillette n'enlevait rien au fait qu'elle existait. Après tout, les chevaux passaient leur temps à s'effrayer de tout et rien. Et, lorsqu'un cheval avait peur de quelque chose, il ne servait à rien de le brusquer. C'était un coup à ce qu'il panique, essaie de fuir, se blesse ou blesse ceux autour. Il fallait y aller en douceur. Placer un référent de confiance, homme ou équidé, entre l'effrayé et l'objet de sa frayeur pour lui montrer qu'il n'y avait rien à craindre. La rouquine ne savait pas si ça marchait pareil pour les enfants, mais elle n'avait pas d'autre idée. Même si elle n'était pas du tout certaine que la petite la considère comme quelqu'un de confiance.
« Elle s'appelle Tisia, commença-t-elle – nommer quelque chose, c'était le sortir de l'inconnu, ça aidait normalement, non ? – de la même voix calme et grave qu'elle aurait utilisé pour rassurer un poulain paniqué. Elle ne te fera pas de mal. »
La Grise posa une main sur le nez du Compagnon, derrière elle, dans l'espoir d'illustrer ses propos et de prouver qu'il n'y avait pas de raison d'avoir peur.
« Elle a envie de se baigner, elle a chaud, elle aussi, mais on peut aller dans un autre bassin, si tu veux. Comme ça, tu gardes celui-ci pour toi toute seule. »