8e décade d'automne 1485Geliandras commençait à avoir sérieusement le mal du pays. Heureusement, on lui avait accordé une permission pour le Solstice d'hiver, ce qui lui permettrait de faire un peu de tourisme et de se changer les idées. Ce qu'il aurait voulu par dessus-tout, c'était rendre visite à sa belle, laissée au pays. Mais il savait que c'était impossible… il ne pouvait déserter son poste juste parce qu'elle lui manquait. S'il revenait en abandonnant ses camarades, elle perdrait tout respect pour lui.
La troupe grandissait à vu d’œil, ce qui ne laissait pas de surprendre Geliandras. Habituellement, on licenciait à l'approche de l'hiver, mais sieur Westmark semblait au contraire rassembler le maximum d'hommes. C'était étrange, mais Geliandras ne s'en plaignait pas. Il n'aurait pas à fabriquer des paniers pour se nourrir, cet hiver.
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2e décade d'hiver 1486Les recrutements avaient été mis en pause pendant le solstice. Beaucoup d'hommes étaient retournés dans leur famille et les autres avaient organisé des festivités entre eux. Geliandras avait apprécié sa petite excursion en solitaire, même si cela l'avait pas mal fatigué. Il savait qu'il aurait dû profiter de cette période pour se reposer. À la place, il avait écumé la région et profiter pour s'intéresser à la culture locale.
Il était fasciné par les Hérauts. Dans un village, il avait pu voir l'accueil chaleureux qu'on leur réservait. Ils étaient des représentants de l'ordre, mais ça n'empêchait pas les villageois de les traiter avec respect voire affection. À en écouter son employeur pourtant, Geliandras s'en était une image plutôt défavorable. Il les avait pris pour les représentants d'un système obsolète et qu'il convenait de changer. Évidemment, si sieur Westmark disait cela, c'était qu'il devait avoir de bonnes raisons. Et Geliandras aurait bien aimé les connaître.
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6e décade d'hiver 1486Geliandras était maintenant considéré comme un membre important de la troupe de sieur Westmark. Ses conseils avisés, énoncé dans un valdemaran lent et scolaire, lui avaient valu une reconnaissance pleine et entière de la part du noble. Il avait accès à de nombreuses informations sur le recrutement, les stocks, le matériel et avait fait connaissance avec l'entourage de son seigneur.
Il adorait sa nouvelle position. Grâce à elle, il était libre d'organiser sa journée comme bon lui semblait. Il avait même le temps d'envoyer des lettres à sa belle, restée au pays! Depuis sa promotion, il ne s'occupait plus de l'entraînement des nouveaux arrivants; on avait confié la mission à quelqu'un de moins qualifié. Car il était dommage de gaspiller le temps si précieux de Geliandras, alors qu'il était bien plus utile ailleurs. Du coup, il passait le plus clair de son temps seul, à organiser les troupes, les stocks et à mettre sur pied des stratégies que ses subordonnées testeraient avec les recrues. Ne lui manquait finalement qu'une information pour saisir pleinement la situation: pour quelle guerre préparait-il tout cela?