Valdemar RPG
Autres RPs => Archives => Sujets d'intro => Discussion démarrée par: Riannon le 07 août 2010, 19:24:20
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" Il est mort ! Il est mort !"
Des femmes se mirent à hurler devant la taverne. Un cheval hennit, au bord de l'affolement, et plusieurs fois d'hommes, à la fois interrogatives et inquiètes se mélèrent au bruit ambiant.
Quelques secondes plus tard, la porte s'ouvrit sur un barde portant un gamin dans ses bras. L'enfant, un garçon d'une dizaine d'année, avait la tête ensanglantée et le bras droit tordu bizarrement.
" Il me faut de l'eau chaude, des compresses et des couvertures ! " ordonna Revan, Barde à la barbe blanche, à la première serveuse qui passa, intriguée. "Et qu'on aille chercher un guérisseur au Collegium."
Il claqua la porte de la Taverne d'un coup de pied au nez des curieux, laissant seulement entrer un homme qui triturait son chapeau d'un air désespéré.
"J'suis désolé!" ne cessait de marmonner l'homme d'un air malheureux sans pour autant faire un geste pour aider.
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Thalyana était dans sa toute petite chambre. Assise sur le rebord de la fenêtre, elle reprisait ses bas. Elle ne regardait pas vraiment dehors, mais malgré tout, elle gardait un œil sur l'entrée de la taverne, sur les clients qui entraient.
Soudain, elle entendit des cris. Quelqu'un était mort.
*Ou juste inconscient.*
Elle posa son ouvrage et se pencha dehors. Elle vit un barde, portant un enfant dans ses bras, entrer dans la taverne. Alors, elle se précipita hors de sa chambre, à temps pour voir une des servantes, la petite Mélia, sortir en courant du bâtiment, sans doute pour aller chercher un guérisseur.
Elle descendit les escaliers trois par trois, et sitôt en bas, la patronne de la taverne l'envoya à la cuisine chercher de l'eau bouillante. Du coin de l'œil, Thalyana vit celle-ci se précipiter vers le placard, où l'on rangeait le linge propre.
Arrivée à la cuisine, Thalyana vit que la chance lui souriait. Quelqu'un avait mis à bouillir une grosse marmite d'eau. Elle prit une bassine en fer qui trainait au pied du foyer, et la remplit le plus rapidement possible, à l'aide d'une grande louche en bois. Dans un élan de bonne volonté, elle prit aussi avec elle une petite bouteille d'alcool fort, qu'elle trouva dans un tiroir et quelques plantes séchées, suspendues çà et là, à la fois utile en cuisine et dans l'art des soins, qu'elle avait l'habitude d'utiliser quand elle aidait encore le vieux de son village.
Elle repartit vers la grande salle, quelque peu encombrée. Elle traversa la pièce d'un pas pressé, mais sûr, et déposa sa bassine au pied du barde.
" Un peu d'aide? Chez moi, j'avais l'habitude d'assister le "guérisseur" du village. "
Elle insista sur "guérisseur", pour bien faire comprendre que ce mot était utilisé faute de mieux.
Sans même attendre de réponse, elle entreprit de mouiller les compresses, et de les présenter au barde.
"Comment a-t-il été blessé? Si c'est une chute, il faudrait veiller à ne pas bouger sa tête, et à la maintenir fermement, pour éviter d'empirer une éventuelle blessure à la tête."
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On lui obéit rapidement. La servante appostrophée se dépécha de sortir à la recherche d'un guérisseur, et rapidement une autre servante apparaissait avec les choses demandées par le Barde.
Il avait posé l'enfant sur une nappe, au sol, et s'affairait déjà à chercher le pouls de l'enfant, sourcils froncés. L'autre homme s'était affalé sur un tabouret, l'air de plus en plus catastrophé.
Quand Thalyana déposa l'eau chaude près du Barde, celui-ci ne releva pas la tête mais la remercia à mi-voix.
"Il est encore vivant." dit-il en relevant la tête pour rencontrer les compresses qu'avait préparé la jeune femme.
"Je veux bien de l'aide, merci." répondit-il en commençant à nettoyer doucement la tête de l'enfant. " Cet homme n'a pas pu arrêter sa charette qui a versé sur l'enfant. Tout serait plus simple s'il ne s'était pas cogné la tête contre une pierre."
Le sang qui partait dévoilait justement une profonde entaille allant de la tempe jusque dans les cheveux. Le Barde grimaça.
" Avez-vous déjà vu ce genre de cas? Je propose de nettoyer et bander en attendant le Guérisseur. Et redresser peut-être ce bras."
Puis il regarda Thalyana, interressé, la regardant pour la première fois réellement:
"Vous disiez, à propos de la tête?"
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Thalyana fit une grimace lorsqu'elle découvrit la profonde entaille dans le crâne de l'enfant. Elle espérait de tout cœur que l'os n'était pas fissuré. Elle écouta les remarques et questions du barde, et réfléchit longuement avant de répondre.
" Personnellement, je ne banderais pas la tête tant qu'un guérisseur confirmé ne l'aura pas examiné. Nous pourrions faire plus de mal que de bien. Juste bien nettoyer la plaie... Et garder un linge appuyé doucement sur la plaie. Les blessures à la tête saignent toujours beaucoup. Ce n'est peut-être rien, mais je préfère être prudente..."
Elle examina le bras. Il semblait cassé, mais l'os n'avait pas percé la peau, et il serait facile de le remettre en place.
"Le bras, je peux m'en charger. Mais ce sera douloureux. Enfin, s'il se réveille..." Elle se mordit la lèvre. "Au moins, nous serons sûr que sa tête n'a rien."
Elle entreprit de passer ses mains sur la fracture, pour bien sentir l'os, et comprendre comment il était fracturé. Il suffirait de tirer fort sur le bras, de remettre les os en place et de faire un attelle de fortune.
Le barde, soudain, sembla intéressé par sa première remarque. Elle se concentra avant de répondre, pour bien formuler sa pensée.
" Oui, j'ai appris, on va dire "sur le tas", que si l'on déplace quelqu'un qui s'est cogné le crâne de manière violente, souvent il ne se réveille pas. Alors que si l'on lui tient la nuque, qu'on la maintient bien droite, à l'aide, par exemple, de deux baguettes d'osier, il finit par rouvrir les yeux. Je ne connais pas la raison médicale de ce fait, juste que c'est ainsi... Peut-être que la nuque, si elle est bougée violemment, empêche la tête de guérir. Je ne sais pas pourquoi."
Elle espérait s'être fait comprendre. Elle espérait aussi qu'on ne la prendrait pas pour une paysanne ignare, qui tentait d'attirer l'attention sur elle.
Elle se concentra à nouveau sur le bras. Elle mit ses mains en place, murmura une petite prière, adressée à qui voudrait l'entendre, et tira. On entendit un claquement sec. Elle contrôla l'os. Oui, il semblait de retour à sa place habituelle.
Elle leva les yeux vers l'enfant, espérant que la douleur l'avait peut-être réveillé.
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Le Barde fronça les sourcils en écoutant les paroles de Thalyana. Il arrêta de nettoyer la plaie pour regarder un moment le visage immobile et pâle de l'enfant, puis la jeune femme.
"On va faire comme vous dites. Je finis de nettoyer la plaie, et on posera des linges dessus pour bloquer le sang... Je n'ai guère l'habitude de ce genre de blessures, je l'avoue."
Les ampoules aux doigts, d'accord, mais les enfants à moitié morts... Il la laissa proposer de s'occuper du bras, pendant que lui faisait ce qu'il disait ( nettoyage à l'eau puis à l'alcool, et pose de linges propres) mais n'eut pas le temps de répondre: déjà elle frôlait la blessure et discutait de toutes ces choses étranges qu'apprenaient les guérisseurs et qui leur échappait un peu. Puis elle tira.
Le bras fit un bruit sec. Il était presque correctement replacé mais visiblement encore de travers. La fracture devait être multiple et un éclat devait bloquer la remise en place complète. Le Barde sursauta et plein de colère et d'angoisse gronda:
"Vous auriez pu prévenir ! A tirer de cette manière, votre histoire de tête droite ne tient plus debout ! "
Si le Barde avait eu peur, l'enfant ne bougeait toujours pas, et le Guérisseur n'arrivait pas. L'homme mit sa main sur cellde Thalyana pour adoucir sa réprimande:
" C'était une bonne idée mais la prochaine pensez à prevenir. J'aurais pu le tenir et éviter de bouger autant. Le bras n'a toujours pas l'air totalement normal... Je ne pense pas qu'on doive y retoucher avant le Guérisseur. "
Brusquement, il se tourna vers le coupable qui pleurnichait sur son tabouret:
" Fermez la vous !"
Le silence angoissé de l'auberge devint pesant. Les servantes les observaient de la porte, les rares clients ne chuchotaient plus, on voyait presque la Mort arriver.
Et la porte s'ouvrit enfin. La petite servante précédait un Guérisseur.
"J'l'ai trouvé d'vant chez Dame D'Ormont, et nous v'là..." prévint la jeune fille essoufflée.
Le guérisseur, son bel uniforme un peu froissé, ne prit pas le temps de parler dès qu'il apperçut l'enfant. Il s'agenouilla à al place du Barde qui alla se placer debout derrière Thalyana. Il vérifia la blessure de la tête, puis l'os du bras, avant de donner son verdict.
" Je vais devoir le faire emmener. Qui s'est occupé de lui? J'ai besoin de savoir tout ce que vous avez fait pour continuer à le soigner correctement. Et ce qui s'est passé."
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Thalyana sursauta à la réprimande du barde. Il est vrai qu'elle n'avait pas prévenu, mais il lui avait semblé évident qu'elle allait remettre le bras en place sitôt après en avoir parlé.
"Je... je suis désolée."
Elle baissa les yeux, l'air profondément malheureuse.
" Je... je n'arrive pas à le remettre totalement en place. En tout cas pas seule. Faisons comme vous dites, attendons le Guérisseur. "
La tête toujours baissée, elle se recula légèrement. Elle se sentait coupable. Elle avait agi trop vite, avec trop de précipitation. Elle n'avais pas pris en compte le fait que le barde n'y connaissait rien, qu'il fallait lui indiquer ce qu'elle faisait, car il ne pouvait pas le deviner.
Elle avait peur. Mais elle ne le montrait pas. Elle devait garder son calme, restée concentrée.
Et elle avait honte. Honte d'avoir eut l'orgueil d'essayer, au lieu de simplement faire le minimum.
Elle ruminait de sombres pensés. Dans son village, elle avait toujours été utile, toujours su que faire. Ici, elle se sentait ignorante.
Enfin, la porte de la taverne s'ouvrit. Le guérisseur entra, examina l'enfant, et demanda quels soins avaient été pratiqués.
D'une toute petite voix, Thalyana répondit:
" Nous avons nettoyé la plaie à la tête, avec de l'eau, puis de l'alcool, et simplement fait une compresse avec ces linges. Je n'osais pas bouger la tête pour lui faire un bandage, de peur d'aggraver sa blessure. Quant au bras, je l'ai remis en place du mieux que je pouvais, mais seule, je ne sais pas comment réduire une fracture de cette ampleur."
Elle n'osa pas lever les yeux vers le barde, elle attendait les réprimandes. Elle savait qu'elle aurait pu faire mieux... non, qu'elle aurait dû faire mieux.
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Le Barde n'était pas rancunier mais il était occupé et ne se rendit pas compte de l'état dans lequel il avait mis la jeune femme. D'ailleurs, il se montra plutôt amical avec elle, face au Guérisseur qui venait d'arriver, puisqu'il lui toucha la main amicalement et ne chercha pas à l'enfoncer face au professionnel, lui laissant le loisir de répondre elle-même.
Le guérisseur hocha la tête à ses paroles.
"Pour la tête c'est très bien. Pour le bras..."
Il préféra adoucir ce qu'il allait dire face l'air de la jeune fille:
" Les pressions pour le remettre en place étaient insuffisantes et inégales. On arrangera ça avant que ça ne se ressoude de travers. Rien de grave, c'est surtout la tête qui m'inquiète."
Le barde avait quitté son poste derrière Thalyana et fit signe au Guérisseur qu'il voulait lui parler. Les deux hommes s'éloignèrent, alors que le responsable de tout ce cirque continuait à geindre. La maitresse des lieux, matrone imposante au regard maternel, vint le chercher et l'emmena dans les cuisines où il ne gênerait personne.
La discution dura quelques minutes, le Barde les sourcils froncés, regardant de temps à autre Thalyana. Le Guérisseur restait neutre.
Finalement ils revinrent vers la jeune femme, et le Barde lui sourit. Le Guérisseur resta silencieux une seconde avant de dire:
"J'aimerai savoir d'où vous tenez vos connaissances. Vous accepteriez de m'accompagner au Collegium? Je soignerai l'enfant et vous m'expliquerez tout ceci. Cela vous irait? "
Le Barde fit un signe discret à la jeune femme, semblant la presser d'accepter.
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Thalyana garda la tête baissée. Elle savait que le bras n'était pas encore remis en place, qu'elle n'avait accompli qu'une réduction partielle de la fracture. Jamais auparavant elle ne s'était retrouvée seule face à une fracture de cette importance. Au village, ils étaient toujours les deux dans ce genre de cas. Et ici, dans le stress, elle n'avait pas réalisé l'ampleur de la fracture.
"Je... je n'avais jamais fait ça seule avant. Jamais pour des cas aussi graves. Je pensais que la fracture était simple. Je n'avais pas senti, à cause de l'enflure naissante, sans doute, la deuxième fissure. J'imagine qu'en remettant en place la première fracture, je n'ai fait qu'empirer la seconde... Vous voyez, je n'ai jamais fait ça toute seule."
Sa voix, d'abord tremblante, mais assez ferme, s'était réduite à un murmure.
Elle était terriblement inquiète. Pour l'enfant, d'abord, puis pour elle-même. Elle avait commis une erreur de débutante et le Guérisseur ne manquerait pas de le lui rappeler si elle avait l'audace de se présenter à l'examen du Collegium.
Elle vit soudain que les deux hommes s'étaient éloignés. Elle en profita pour se calmer. Elle inspira lentement, très lentement, puis elle expira. La seconde fois, elle respira plus profondément encore. Elle continua jusqu'à ce qu'elle sente la tension se relâcher sur ses tempes, sa nuque, ses épaules.
Elle se recomposa un visage digne et calme. D'une jeune fille au bord des larmes, elle était redevenue une jeune femme assurée et concentrée.
*J'espère ne pas trop m'être donnée en spectacle. Quelle honte! J'ai fait une erreur, mais ce n'est pas la fin du monde. Elle sera facilement corrigée. Je devrais plutôt surveiller l'enfant pendant qu'ils sont loin. Oui, voilà...*
Elle respira encore une fois à fond, puis se pencha à nouveau vers son blessé. Oui, la blessure était vraiment vilaine. Elle savait que les prochaines heures seraient cruciales...
Elle avait paniqué. C'était très rare. Mais là, devant son erreur, elle s'était sentie anéantie. Elle qui était si fière de ses connaissances, si fière d'aider. Elle avait encore beaucoup à apprendre pour devenir une véritable Guérisseuse, et non plus seulement la soigneuse du village.
Elle concentra toute son attention sur l'enfant. Elle désespérait d'apercevoir un mouvement de paupière révélateur, une légère crispation autour de la bouche, un détail, quelque chose qui lui permette d'espérer que le garçon survivrait.
Soudain, elle eut l'impression qu'on s'adressait à elle. Elle releva la tête, mais n'entendit que la fin de la phrase.
"Plaît-il? Expliquer quoi?"
Elle se concentra pour se souvenir de ce qu'il lui avait dit.
"Vous accompagner? Moi? Oui... oui, bien sûr! Mais... euh... il faut que je demande à la patronne si je peux prendre le reste de ma journée. Si c'est vous qui le lui demandez, elle dira forcément oui..."
Elle rougit, particulièrement gênée.
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Le Guérisseur avait écouté les paroles de Thalyana sans faire de commentaire. Ni visiblement mécontent, ni visiblement content, il avait simplement hoché la tête vaguement, plus concentré sur l'enfant que sur les états d'âmes de la serveuse.
Il finit par s'éloigner avec le barde, et revint bientôt faire ses propositions. L'enfant ne montrait aucune amélioration, sauf peut-être que les tissus sur son front cachaient que l'hémorragie avait cessé juste après le passage du Guérisseur.
Thalyana sembla surprise. Le Barde répéta à la place du barde:
"Allez au Chateau expliquer en détail comment vous avez appris à soigner."
Thalyana accepta finalement et de nouveau le barde intervint:
"Je lui demanderai et je vous promets d'obtenir cette autorisation. Et votre paye." conclut- il pendant que le Guérisseur se détournait déjà pour que quelques hommes l'aident à transporter l'enfant sans trop le bouger et le secouer.
Un brancard fut confectionné, et deux hommes, aidés du Guérisseur, vinrent prendre l'enfant.
"Je suis Johan, Guérisseur de Haven. Allons-y." se présenta brièvement l'homme en entrainant fermement Thalyana par l'épaule.
Il n'avait cure d'être agréable, il était juste pratique. Le Barde fit signe d'au revoir à la jeune femme avant d'aller faire ce qu'il avait promis.
[Thalyana, le Guérisseur refuse de parler tout le long du chemin. Vous arrivez au Collegia, et des gens prennent en charge l'enfant. Mais toi, Johan te fait entrer dans une petite pièce et te fait asseoir sur une chaise, face à une table vide. ]
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Thalyana s'éloigna du blessé pendant qu'on le plaçait sur un brancard. Elle en profita pour aller chercher sa cape, pendue à un crochet, dans le couloir menant aux réserves. Elle s'en vêtit et revint rapidement auprès du Guérisseur. Un soudain accès de coquetterie lui fit regretter de ne pas avoir choisi ses vêtements avec plus de soin ce matin-là, car elle portait une vieille jupe marron et une blouse un peu trop grande, qui dévoilait sa poitrine par moment, moyen sûr d'avoir de bons pourboires.
Tous étaient prêts à partir. Le Guérisseur se présenta et la prit par l'épaule. La jeune fille se présenta.
"Mon nom est Thalyana."
Johan, le Guérisseur, ne fit aucune réponse et n'ouvrit pour la bouche du trajet.
Thalyana eut tout loisir de réfléchir à ce qu'impliquait cet invitation. On allait l'interroger, la questionner, peut-être même la juger. Elle ne savait si elle était contente ou paniquée.
Elle ne leva pas les yeux, plongée dans ses pensées. Par moment, elle devait se souvenir d'avancer, car par habitude, elle s'arrêtait quand ses réflexions devenaient trop ardues, ou trop nombreuses.
Pendant qu'elle marchait, ses cheveux mal attachés lui tombaient dans les yeux et elle devait constamment les remettre derrière ses oreilles. Quand ils arrivèrent enfin au Collegium, elle était complètement ébouriffée. Mais elle s'en fichait. Elle dut se forcer à fermer sa bouche, car elle ressemblait sûrement à un poisson hors de l'eau. Enfin elle entrait dans le lieu dont elle avait toujours rêvé.
Elle remarqua que le garçon fut pris en charge dès leur arrivée. Elle pensait qu'ils continueraient à s'occuper de l'enfant, mais le Guérisseur la fit entrer dans une petite pièce, et la fit s'assoir.
La table devant elle était vide, et elle se demandait ce qu'on attendait d'elle.
" Euh... vous... ce n'est pas vous qui allez finir de guérir le garçon?"
*Quelle horrible phrase. Il va me prendre pour une illettrée si je ne fais pas plus d'efforts.*
Elle leva la tête vers le Guérisseur, attendant une réponse, et pendant ce temps, elle tenta de remettre un peu d'ordre dans ses cheveux.
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Le Guérisseur hocha la tête négativement:
"Je fais les interventions d'urgence et les visites de contrôle en ville. Mes collègues ici s'occupent des patients après la première prise en charge. Et j'ai autre chose d'aussi important à faire actuellement. Asseyez-vous."
Il avait remarqué ses petits tics concernant ses cheveux, tout comme la mise un peu débrayée. Ce n'était pas moche mais bien peu digne d'une femme "convenable" à ses yeux. Pour le prude Guérisseur, la femme n'était qu'une patiente potentielle et non une potentielle compagne ( de lit ou de vie ). Il était bourru, direct, ne prenait de gant avec personne, et n'était surtout pas galant. Elle n'allait pas le séduire. D'ailleurs elle avait l'air trop mal à l'aise pour vouloir séduire.
Il avait désigné la chaise en lui demandant de s'asseoir mais il n'attendit pas qu'elle s'exécute pour poser ses questions:
"Où et comment avez-vous appris à guérir? Quels sont les cas les plus graves que vous ayez eu? Avez-vous des facilités étranges?"
Il restait debout, jugeant Thalyana de haut comme l'aurait fait un juge.
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Thalyana haussa les sourcils. Elle était quelque peu surprise par la tournure que prenaient les événements. Elle s'attendait à un sermon, peut-être des remontrances. Le Guérisseur avait l'air tellement sévère!
Et elle ne voyait ce qu'il pouvait y avoir de plus important que de soigner un enfant.
"Je.. je viens d'un petit village, vraiment petit vous voyez? Il se trouve au sud-est de Haven, perdu dans un petit bois. Le genre d'endroit que les Guérisseurs ne visitent que rarement... Ce n'est pas une critique!" se défendit-elle.
"Nous avons un soigneur local, un rebouteux. "
Le dernier mot était dit sur le ton de la question.
"Enfin, bref. Je ne tenais pas en place. J'adorais apprendre à me battre avec mon père, mes cousins et les autres garçons du village, mais... il est rapidement devenu évident que malgré tout ma volonté, je ne pourrais jamais compenser ma plus faible de musculature, et surtout ma carrure. Un poulet de course, comme dirait mon père. "
Elle rit à ce surnom ridicule. Son visage s'illumina et un air serein s'installa sur son visage. Aussi, elle releva la tête, et regarda enfin le Guérisseur droit dans les yeux. Elle s''excusa d'un petit mouvement de tête pour cette digression bien peu intéressante.
" Et ma mère ne me supportait pas, enfermée avec les autres femmes, à coudre, tisser, filer... Je ne tiens pas bien longtemps sans rien faire d' intéressant. " Elle insista sur ce mot.
" Alors l'Ancien m'a pris en pitié, et a sans doute reconnu que je n'étais pas faite pour ce genre de travaux. Il m'a laissé l'aider, le suivre, apprendre par l'observation. Tout ça sans me reconnaître officiellement comme son apprentie..."
Elle remua le bout du nez. Elle était concentrée, plongée dans ses souvenirs.
" Et puis, un des bûcherons du village s'est blessé. Par la faute des deux petits crétins du village. Il s'apprêtait à fendre une belle bûche, et ils l'ont pris par surprise, poussant des hurlements ridicules. Malheureusement, le bûcheron ne les avait pas vu arriver... Il a raté sa bûche, et s'en entaillé la jambe jusqu'à l'os. J'étais là, à quelques mètres de lui, quand c'est arrivé.
Il y avait beaucoup de sang, de cris, et l'Ancien n'arrivait pas. Alors j'ai pris en main les choses. Je n'avais aucune idée de ce que je faisais, en fait. Seulement, tous ces gens paniqués, ça me prenait à la gorge. Je devais agir! Alors, j'ai demandé de l'eau brûlante, j'ai ramassé une bouteille de notre alcool local, et j'ai sorti le matériel de couture que je transportais avec moi. Oui, il m'arrivait souvent d'aider l'Ancien en reprisant ses vêtements.
J'ai lavé la jambe, j'ai versé l'alcool. Heureusement pour lui, la douleur l'a assommé. J'ai pris mon aiguille... et... voilà.
A la fin, j'étais couverte de sang, exténuée, mais le bûcheron, lui, s'en tirerait. Enfin, c'est ce que m'a assuré l'Ancien qui était arrivé alors que je recousais encore la jambe... Et il a eu raison. De tout cet incident, il ne reste plus qu'une belle cicatrice...
Du coup, l'Ancien m'a pris sous son aile, et m'a enseigné ses connaissances. Je connais tous les remèdes possibles contre le gueule de bois, les douleurs "Féminines", les ventres douloureux... Rien de plus, mais lui trouvait ça suffisant. Moi pas.
Mais j'ai utilisé toutes mes connaissances aussi souvent que possible. Je dois avouer que les chèvres et les bœufs sont devenus ma grand spécialité."
Elle fut prise d'un fou rire, et ne se reprit que difficilement.
" bah oui... eux aussi, ils ont mal parfois. Et ils sont moins bruyants que les humains."
Elle accentua le mot "bruyant", comme si ce mot revêtait un sens particulier pour elle.
" J'ai soigné bien d'autres blessures, mais principalement des brûlures, des entailles, quelques fractures simples, et beaucoup de gros rhumes. La plus grave... ça dépend... humaine ou animale?"
Elle n'attendit pas la réponse.
"Humaine, j'imagine... je crois que c'était un accouchement... L'enfant se présentait par le siège. Il a carrément déchiré sa mère... On l'a sauvée, mais elle n'aura plus jamais d'enfant..."
Elle eut l'air désolée.
" Quant à des facilités... je ne crois pas être empathe... ou alors, vraiment faiblement!"
Elle rit joyeusement.
" Par contre, j'ai plutôt une difficulté. Trop de personnes en un lieu, et je deviens folle, ma gorge se serre, et j'ai l'impression d'étouffer... Enfin, c'est surtout quand il se passe quelque chose de spécial, genre un accident, une tempête, une fête particulièrement débridée... Là, je me sens vraiment oppressée, comme si... hum... comme si on tentait de me prendre d'assaut, de me faire disparaître..."
Elle resta silencieuse un moment, puis fronça les sourcils.
" C'est de l'empathie ça? Non... L'empathie, c'est sentir les émotions des gens, non? Moi, on m'a toujours dit que j'étais un peu... hum... comment dit-on? Vous savez, la peur des espaces clos..."
Elle sourit au Guérisseur.
" Ah, oui. Pour finir, quand l'Ancien est mort, j'ai décidé de partir du village, et d'essayer de devenir une vraie Guérisseuse!"
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Sans s'adoucir ni montrer aucun signe de changement, Johan laissa parler la jeune femme sans l'interrompre, observant chacun de ses changements de traits, chacun de ses gestes, et ses nuances de ton. Il hochait la tête de temps en temps, pour confirmer certains mots, ou apprécier certaines idées.
Quand Thalyana se tut enfin, il la regarda sans mot dire, comme s'il réfléchissait. Il finit par dire sérieusement:
" Vouloir guérir, et connaitre les premiers gestes ne suffit pas. Vous pouvez devenir guérisseuse, mais pas Guérisseur avec une majuscule, si vous n'avez pas les bons instincts, le bon Don. Nous avons besoin des deux sortes de guérisseurs, comme les Bardes sont complémentaires avec les ménestrels. Vous comprenez?"
Il fronça les sourcils puis la regarda:
" Vous récupérerez votre salaire actuellement avec mon ami Barde - il vous l'amènera ici je pense. Puis vous irez prendre vos affaires. Je vais vous montrer votre nouvelle chambre, vous présenter à l'Intendante, elle vous donnera vos uniformes. Les cours, vous les suivrez dès demain. Au moindre problème vous pouvez demander à n'importe quel Guérisseur, vous ferez partie de la famille... En tant qu'apprentie enfant si on peut dire. Des questions?"
Le Guérisseur ne s'embarrassait pas de tact ou de questions inutiles: Thalyana avait dit vouloir être Guérisseuse, lui avait vu un don probable ( en tout cas une envie de soigner et une technique intéressante bien que barbare) , tout allait bien, il lui proposait d'être élève. Il ne s'embarrassait pas de formalités non plus - c'était l'apanage d'Oesope et lui s'en moquait il se débrouillerait.
" Ah mais avant tout ça, je vais vous donner un formulaire. Savez vous écrire?"
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Thalyana n'en croyait pas ses oreilles. Elle était vraiment surprise par la tournure que prenaient les événements.
Elle? S'installer ici? Mais on ne lui avait même pas fait passer de test. On ne lui avait posé aucune question d'ordre purement médical, enfin, pas vraiment, et on n'avait même pas pris la peine de vérifier ses dires.
Elle était heureuse, au comble de bonheur. Elle savait qu'elle souriait probablement d'un air un peu bête. Elle avait envie de chanter; elle s'en garderait, elle n'avait pas envie de se faire jeter hors du bâtiment séance tenante. Elle trouvait sa voix affreuse, trop grave et profonde pour une fille de son âge.
Elle réfléchit.
"Hum... comment savoir si j'ai un Don? Je veux dire, y a un test? C'est douloureux? Et pour l'argent? Je n'en ai pas beaucoup, pas de quoi payer ma place ici. Enfin... J'espère réellement avoir un don!"
Elle se sentit un peu honteuse, elle s'était exprimé sur un ton enfantin, vraiment ridicule. Elle rougit légèrement. Maintenant qu'elle était calme, elle contrôlait bien mieux ses émotions et les expressions de son visage. Elle se retint de recommencer à jouer avec une mèche folle de ses cheveux.
"Je sais écrire... enfin, ma grammaire est correct, et mon orthographe plutôt bon... Par contre, mon écriture est... enfin, l'Ancien me disait toujours qu'on croirait qu'une armée de mouche avait dansé la gavotte...
Je vais vraiment vivre ici? Étudier ici? Je vais réellement entrer au Collegium?"
Elle n'en revenait toujours pas.
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Johan leva les yeux au ciel devant les questions de Thalyana:
" Pas douloureux. Technique. Théorique. Juste pour savoir votre niveau. Pas très grave. Et pour l'argent, si vous n'en avez pas, vous deviendrez boursière et vous le resterez tant que vos résultats suivront. Vos résultats seront le remboursement de vos frais."
Il haussa les épaules et les sourcils, blasé devant la réaction de sa future élève.
" Tant que je peux vous lire. Je vous amène le questionnaire."
Il s'éclipsa trente seconde, la laissant réfléchir dans le calme, avant de revenir avec une liasse de papiers. Il déposa une des feuilles, avec une bouteille d'encre et une plume, devant la jeune femme.
"Prenez le temps qu'il vous faut."
Il alla s'installer sur un tabouret au fond de la petite salle, s'inclina... et sembla s'endormir, le reste des papiers en main.
La feuille se résumait à quelques questions, derrières lesquelles on avait laissé la place de répondre.
Questionnaire d'essai.
Nom ( si il y a lieu ) / nom d'épouse. Prénom. Age. Lieu de naissance.
Que faire en cas d'insolation chez un adulte? Chez un enfant?
A quoi peut servir le thym?
Quels sont les signes précurseurs d'un accouchement?
D'après vous, quelles sont les qualités premières demandées chez un guérisseur?
D'après vous, quelle est la chose que ne doit surtout pas faire un Guérisseur?
Pourquoi avez-vous l'envie d'entrer au Collegium?
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Thalyana reporta instantanément son attention son le questionnaire.
Questionnaire d'essai.
Nom ( si il y a lieu ) / nom d'épouse. Prénom. Age. Lieu de naissance.
Thalyana, 17 ans, Troistorrents
Pour le moment, c'était facile...
Que faire en cas d'insolation chez un adulte? Chez un enfant?
Dans les deux cas, il faut hydrater le patient, le placer dans un endroit frais, ombragé, et lui appliquer des compresses froides. Pour l'adulte, on peut aussi recommander un bain tiède à froid, mais cela est à éviter pour l'enfant. Son corps plus fragile ne supporterait pas forcément le choc.
Il faut surveiller le patient avec attention, car une forte insolation peut entraîner une perte de connaissance.
Elle avait à peu près réécrit un passage qu'elle avait lu dans un livre de l'Ancien. La formulation était un poil trop pompeuse.
A quoi peut servir le thym?
Le thym est très bon pour soigner les maux de gorge, les affections des poumons. Il a aussi des vertus calmantes.
Question facile, elle avait toujours du thym sur elle.
Quels sont les signes précurseurs d'un accouchement?
Le premier signe est la pertes des eaux, lorsque la poche où se trouve le bébé se rompt. Ensuite, des contractions rapprochées indiquent l'imminence de l'accouchement. On peut aussi vérifier l'écartement du col de l'utérus.
Elle avait raturé plusieurs fois ce dernier mot avant de trouver l'orthographe correcte. Là, elle avait dû se concentrer, et elle avait l'impression d'avoir oublié quelque chose.
D'après vous, quelles sont les qualités premières demandées chez un guérisseur?
La compassion, le calme, l'assurance, la compréhension, la fermeté, l'empathie...
En tout cas c'était les qualités qui lui semblaient indispensables.
D'après vous, quelle est la chose que ne doit surtout pas faire un Guérisseur?
Utiliser son savoir pour nuire à autrui. Laisser son inaction nuire à autrui.
La question l'avait quelque peu surprise. Cela semblait évident. Après tout, chaque remède peut aussi devenir un poison. Des mains qui remettent les os en place peuvent aussi les briser. Tout les connaissances anatomiques d'un guérisseur pouvaient être utilisées à mauvais escient.
Pourquoi avez-vous l'envie d'entrer au Collegium?
Parce que je veux être capable de soigner réellement. Pas juste les petits bobos, les petites fractures ou les gueules de bois. Car je ne peux rester inactive devant la douleur d'autrui. Cela m'est bien trop pénible, bien trop douloureux. Parce que je ne peux me satisfaire d'aider un peu, je vais aider le plus possible.
Elle était parvenue au bout du questionnaire. Elle le relut plusieurs fois avec attention, corrigeant çà et là les fautes d'orthographe.
Quand elle fut sûre d'avoir terminé, elle le tendit au Guérisseur.
"Voilà... J'espère que vous parviendrez à me lire. "
Maintenant qu'elle était parfaitement soulagée, elle avait la nette impression qu'elle avait oublié quelque chose... Que le barde risquait d'être surpris s'il il fouinait dans ses affaires.
Elle retint un fou rire.
" Oh, par la Déesse! J'espère que votre ami le barde n'a pas peur des furets! Il aura sans doute dérangé ma compagne s'il s'est occupé de rassembler mes affaire!"
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Le Guérisseur ouvrit les yeux quand il entendit la chaise bouger. Thalyana lui donna à lire sa feuille, mais il n'y jeta pas un seul coup d'oeil. Il prit la feuille, la remit sur le tas de papiers qu'il tenait :
" Je lis pas. Oesope ou un des autres s'en chargera. Venez. Vous allez venir voir votre patient. Le premier à Thendara. Son bras doit être remis depuis, mais je veux que vous voyez quelque chose. Cela confirmera ou pas... bref, vous verrez."
D'un signe impérieux, il lui fit signe de le suivre et sortit de la salle. Il la guida dans les couloirs jusqu'à la grande salle de l'infirmerie. Des box abritaient des patients. Au fond, une porte. Il y alla, et la fit entrer avant lui. C'était une sorte de salle d'opération où plusieurs guérisseurs s'occupaient.
Au fond de la salle, sur un lit, le petit garçon gisait, les yeux toujours fermés. Près de lui, une vieille femme en uniforme avait sa main à quelques millimètres de la blessure. Les yeux fermés.
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Thalyana suivit docilement le Guérisseur. Quand elle pénétra dans l'infirmerie, elle se sentit oppressée, comme toujours en présence de gens malades, ou nombreux. Elle respira profondément pour chasser son trouble. C'était tellement ridicule, d'être sensible à ce point. Mais c'était toujours ainsi. Elle s'y était habituée, pensant que c'était sans doute sa plus grande faiblesse. Elle avait appris qu'un soigneur devait toujours rester calme, et agir avec fermeté et précision. Il ne devait pas laisser ses états d'âme influencer son art. Or, c'était justement ce qu'elle faisait. Elle mettait toujours tout son cœur dans ses soins, car elle avait l'impression qu'ils étaient alors meilleurs, que les patients se remettaient mieux. Évidemment, ce n'était que son imagination...
Elle se sentit plus mal que d'habitude. Sans doute les émotions de la journée l'avaient plus fatiguée qu'elle ne le pensait. Ou alors était étrangement réactive à ces lieux. Cela la rendait inquiète. Elle ne pouvait pas se permettre de s'effondrer. Elle essaya de se raisonner.
* Arrête d'imaginer n'importe quoi. Tu n'es pas plus sensible qu'une chaise, que ce soit ici ou ailleurs.*
Le Guérisseur et elle entrèrent alors dans une pièce plus petite, où une vieille femme était occupée à soigner l'enfant.
Étrangement, malgré la taille de la pièce, elle se sentit encore plus bizarre. Plus tout à fait oppressée, non, plutôt...
* Hum, je ne saurais comment le décrire. Je ressens un picotement dans la nuque, le bout des doigts. Que...*
Elle posa sa question à haute voix.
"Que fait-elle? ça me fait tout drôle. Je veux dire, pas comme d'habitude en présence d'une personne blessée. Normalement, je me sens un peu "enfermée", non écrasée plutôt, mais là, je me sens juste bizarre..."
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Johan suivit Thalyana vers l'enfant. Lui aussi sentait ce que faisait la Guérisseuse. Cependant, tout ce que ressentait la jeune femme pouvait n'être dû qu'à ses nerfs à fleur de peau ou à son imagination. Le visage du Guérisseur ne se dérida pas d'un poil.
" Bizarre comment? Vous êtes enfermée, mais en présence d'un enfant à soigner, est-ce que ça pourrait être assez pour justifier votre "bizarre"? "
Il avait parlé trop fort parce que la vieille femme releva le regard pour leur assener un "shhhh" qui ne faisait pas l'ombre d'un doute: elle voulait qu'ils parlent moins fort. Elle avait besoin de se concentrer. Johan fit signe à Thalyana de s'éloigner un peu, mais ils restèrent face au patient improvisé de l'ancienne serveuse.
" Son état physique est réparé, mais Ines tente de ramener son esprit aussi. Il a été choqué et il est dur à trouver. " analysa-t-il, tellement habitué (malheureusement) à ce genre de comportements chez les malades gravement atteints.
Il regarda Thalyana d'un oeil inquisiteur avant d'ordonner:
"Regarde et dis moi ce qu'elle fait exactement."
[ Thalyana, à part le fait qu'elle pose ses mains presque à un millimètre au dessus de la blessure, tu ne vois rien. Tu peux sentir que quelque chose se passe, mais tu es gênée parce que tu reçois deux sortes de choses: une douleur diffuse qui semble te parvenir du milieu de ton dos - mais tu n'as pas de problèmes ici - et une sorte de calme apeuré qui te fait penser à l'enfant. Puis tout s'apaise doucement, en commençant par la douleur et tu vois le regard de Johan sur toi, mais surtout celui de l'autre Guérisseuse qui semble en colère. ]
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Thalyana observa attentivement la Guérisseuse. Elle ne voyait rien de spécial, à part qu'elle tenait ses mains toutes proches de la blessure. Elle savait qu'il y avait sans doute quelque chose à voir, mais, elle n'y parvenait pas.
Elle s'apprêtait à répondre qu'elle ne comprenait pas ce qu'on attendait d'elle, quand elle ressentit à nouveau une sensation bizarre. Elle avait mal au dos. Comme ça, subitement, sans raison. Pourtant, un douleur qui apparaît soudainement est souvent vive, mais là, non. La douleur était diffuse, supportable. C'était vraiment étrange. Comme si ce mal ne lui appartenait pas vraiment.
*Je dois vraiment être plus fatiguée que je ne le croyais...*
Elle essaya d'oublier la douleur, mais pas moyen. Elle se demanda si elle s'était abîmé le dos en travaillant à l'auberge, après tout, elle n'avait jamais fait ce genre de travail auparavant. Elle commença à avoir peur. Mais elle ne comprenait pas pourquoi. Après tout, un mal de dos n'était pas forcément grave, surtout s'il était musculaire. Mais la peur continuait de l'habiter. Et ce n'était pas une peur "normale", en tout cas pas sa peur à elle...
*Mais pourquoi aurais-je peur?*
Il lui fallut quelques instants pour comprendre enfin que la peur n'était pas la sienne, c'était celle de l'enfant. Quelle étrange sensation! Ressentir quelque chose de précis, de vraiment précis au sujet d'un patient. D'habitude, elle ne ressentait qu'une angoisse profonde, qu'une sensation d'écrasement, comme si quelqu'un voulait prendre possession de son espace vital. Et ça, tout le monde lui avait dit qu'elle l'imaginait. Mais là, le sentiment était clair, et elle ne douta plus de sa réalité.
Elle se concentra sur ses sensations, pour rien perdre de l'intensité du moment. Petit à petit, la douleur décrut. Elle prit conscience du monde extérieur.
Le Guérisseur la regardait, sans trahir d'émotion particulière. La vieille Guérisseuse, par contre, la foudroya du regard.
" Euh... pardon, je m'excuse..."
Elle ne savait même pas ce qu'elle avait fait de mal.
" Je n'ai pas compris ce qu'elle a fait... mais... je l'ai senti... enfin... J'ai senti la douleur refluer..."
Elle semblait avoir perdu tout confiance en elle sous ce regard furieux.
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Le regard de la vieille se fit légèrement méprisant et quitta Thalyana pour revenir, plus doux, sur son patient. Johann regarda la jeune femme, les sourcils froncés, comme en colère lui aussi:
" Tu m'as dit que tu n'étais pas empathe ! C'est dangereux ici, sans formation. Tu n'es pas émettrice, je le sentirais, mais sûrement réceptrice. On s'en va. Mais tu ne m'as toujours pas dit ce qu'elle faisait."
Sa main reprit sa place adaptée, sur l'épaule de Thalyana, et il la dirigea vers la sortie, refusant de la lâcher avant le couloir.
" Tu auras des cours de théorie, des travaux pratiques et stages en ville. Et tu étudieras pour maitriser tes barrières avec les Guérisseurs et certains Hérauts et Mages. On va voir ta chambre. Ou plutôt signer les papiers officiels."
Et si sa main lâcha la pauvre jeune femme, le ton était sans équivoque.
[ Dernier tour de posts: après ta réponse, ton rp d'intro sera fini, tu pourras poster ailleurs.
Vous allez signer les papiers auprès d'un Guérisseur qui n'est pas Oesope - il est occupé- . On te présente à certains élèves Guérisseurs, et tu as une chambre ( vous la partagez à quatre.). Tu peux considérer que le Barbe est venu en soirée te rendre l'argent de l'auberge; il ne s'attarde pas mais te dit qu'il s'excuse de sa mauvaise humeur à la Taverne. Tu commence immédiatement les cours. Pour un probleme de chronologie, tu ne peux pas participer à celui en cours, mais au prochain, mais dans tes prochains rp tu peux considérer avoir déjà eu tes cours normalement. Si tu as des questions, tu mp Oesope ou un des autres mj ^^ ]
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Thalyana était surprise. Elle ne comprenait pas pourquoi était l'objet de regards si furieux. Puis le Guérisseur en expliqua la cause.
" Je... je ne savais pas. Personne ne m'a jamais expliqué que c'était de l'empathie. On me disait que j'étais trop sensible, et que c'était mon imagination. J'étais persuadée que c'était juste de la claustrophobie."
Elle avait enfin réussi à remettre la main sur le mot qu'elle cherchait.
Alors comme ça, elle était effectivement empathe. Elle n'en revenait pas, elle qui s'était toujours cru un peu folle.
"Que veux dire réceptrice? ou émettrice?"
Elle reporta son attention sur la Guérisseuse. Maintenant qu'elle savait que ce n'était pas son imagination, elle se sentait capable de répondre, en tout cas en partie.
" Elle apaise la douleur, pas seulement la douleur physique, mais aussi celle du cœur. Je crois qu'en calmant la peur de l'enfant, elle l'aide à se réveiller?"
Elle espérait avoir bien compris. Par contre, elle n'avait aucune idée de la manière dont la vieille Guérisseuse parvenait à faire cela.
A peine avait-elle répondu qu'on la conduisit, presque de force, dans le couloir, et aussi dans sa nouvelle vie. Enfin, une fois qu'elle aurait signé tous les papiers...