Loélia écoutait Manuchan avec une attention non feinte. Lui non plus ne semblait pas trop savoir où il allait, pour le moment. Mais une chose est sûre, il avait une idée très précise de qui il était, de pourquoi il était ainsi ; il dégageait une identité forte. C'était très difficile à expliquer. Mais Loelia sentait qu'on pouvait réellement compter sur cet homme franc et honnête.
Au moment où elle louait mentalement le franc-parler du jeune homme, il confirma ses dires en glissant dans son discours qu'il avait un amant. Il était donc ce que l'on nomme shaych.
La jeune fille était embarrassée. Pas parce qu'elle réprouvait ces tendances. Mais parce qu'elle n'avait encore jamais rencontré de personne shaych. En même temps, elle ne l'aurait jamais soupçonné et cette situation confirmait bien sa pensée : les personnes aimant celles du même sexe sont comme tout le monde, dans leurs attitudes comme dans leurs discours. Aucune raison donc pour une discrimination que Loelia n'avait jamais comprise.
Elle sourit à son interlocuteur :
"Vous savez, je me sens un peu idiote, quand je discute avec des gens ici... au risque de sembler inculte, je ne connais pas Aanor.... quelle est cette divinité, exactement?"
Elle hésita un peu, puis poursuivi :
"Vous êtes vraiment quelqu'un de droit et de sincère, Manuchan, de parler ainsi de votre amant. Je vous envie d'avoir quelqu'un à aimer. Je comprends donc que vous êtes une personne dite shaych, ce qui en toute sincérité ne m'a jamais dérangé. Je n'ai personne dans ma vie, mais j'ai toujours pensé que si on aimait une personne du fond du coeur, son sexe importait peu, finalement. L'amour est l'amour, qui ne doit se laisser guider par une barrière des genres."
Elle rit, se disant qu'en tant que Barde, elle serait douée pour chanter l'amour... sous tous ses visages.