Manuchan ouvrit une paupière qui lui semblait aussi lourde qu’une brique à l’annonce de l’heure du réveil. Malgré tout, son sommeil avait été réparateur. Il se sentait bien réveillé, comme si rien ne s’était passé la veille et ce n’était pas la seule chose qu’il sentait…
Apparemment quelque chose de chaud et ressemblant à un bras d’homme s’était égaré sur son épaule. Loin de lui déplaire, ce contact inattendu au réveil provoqua ce qui arrive à la plupart des hommes à qui il en faut peu.
Un peu gêné, il se retourna sur le ventre alors que Glenn répondait au soldat. Un sourire était affiché sur son visage et Manuchan ne se l’expliquait pas vraiment. Il se sentait un peu euphorique et bizarrement optimiste.
Tournant la tête vers Glenn, il put s’apercevoir que celui-ci avait replongé tête la première dans son oreiller. Autant en profiter et l’admirer, même de profil, il restait séduisant, mais cela n’arrangeait pas ses affaires ! Pour tenter de faire disparaître son trouble physique, il essaya de se remémorer point par point le rêve dont il venait de sortir.
Début du rêve
Un ciel infini s’étend devant les yeux de Manuchan. Où qu’il porte les yeux, ils tombent sur l’horizon et rien ne semble interrompre son champ de vision à tel point que l’on serait en droit de se demander où finit le ciel et ou commence la terre. Mais y a-t-il au moins une terre ? Cette question ne le traverse même pas.
Il se sent merveilleusement bien en ce lieu sous les cieux cléments et aussi bleus que ses yeux. Curieux, le mage avance doucement quelques mètres, mais rien ne change dans ce panorama incroyable. Un irrésistible élan d’adrénaline et d’excitation le parcourt et il se met à courir en riant, comme un enfant.
Brutalement, l’Adepte s’arrête et se laisse tomber sur ce qui tient lieu de sol. Allongé ainsi entre deux plans, il à l’impression de voler alors que ses yeux scrutent l’infini. Sous son regard, le ciel s’obscurcit progressivement mais rapidement jusqu’à devenir aussi noir que de l’ébène. Cela aurait pu l’effrayer s’il n’y avait eu les étoiles….
Une myriade d’étoiles de toutes tailles et au scintillement persistant et réconfortant. Manuchan essaye de repérer des constellations, mais n’en connaît aucune. Ses recherches abandonnées, il ferme les yeux et le visage de Perle s’impose à son esprit. Il rouvre les yeux et voit ce même visage en surimpression sur le fond étoilé. La jeune fille sourit et lui dit ce qu’elle avait déjà dit : « il faut croire pour voir.»
Le rethwellan se souvenait de cette phrase. Elle ne l’avait pas marqué sur le moment, mais s’était insidieusement ancrée dans son cerveau. Logique, ce genre de phrase n’était pas du style de Perle. C’était donc une anomalie d’un certain côté et par conséquent, était un élément qui devait être remarqué.
Mais que voulait-elle dire ? Etait-ce une réminiscence de la possession par la Déesse shin’a’in ? La Dame Aux Yeux Etoilés…. Il se trouvait précisément sous un ciel étoilé, et c’est à travers Perle que s’était manifesté le pouvoir de la Déesse….
Intrigué, il voulut y réfléchir plus intensément mais….
Fin du rêve
*pourquoi faut-il toujours que les rêves intéressants soient interrompus ?*
Sans savoir pourquoi, il trouvait cette réflexion amusante et eut un léger rire. Il se souvenait bien de tout cela, un peu trop clairement peut-être….
*En tout cas, je pense que ma bonne humeur lui est dû, rêve ou pas !*
Une étrange sensation lui parvint à travers les brumes de ses souvenirs, comme si une nouvelle importante lui avait été transmise à son sujet, mais il ne se souvenait de rien de ce genre. Manuchan avait la quasi certitude malgré ce flou, que ce sentiment était lui aussi lié à ce rêve et que cette « nouvelle importante » allait changer sa vie.
Son cerveau à nouveau en état de fonctionner à plein régime sans être dirigé par une autre partie de son corps, le mage se leva doucement et entreprit de faire un brin de toilette, à l’eau froide, mais enfin, ça revigore ! Puis de changer ses vêtements salis et déchirés par endroits. Ceci fait, il se jeta sur l’un des plats laissés à leur intention la veille et le dévora aussi rapidement que sa gorge le lui permettait.
Son « petit-déjeuner » terminé, les paroles du soldat coupeur de rêve lui revinrent. Les Capitaines allaient venir les voir ? Il serait bon que Glenn et lui mettent définitivement au point ce qu’ils avaient entrepris auparavant dans l’utilisation des diversions, sans quoi, ils passeraient pour des tires au flanc ! Et ça, pour Manuchan, c’était impensable.
Il se leva donc et s’approcha de son confrère en douceur, usant de sa discrétion pour ne pas se faire remarquer jusqu’à être très proche de son oreille afin de lui susurrer de sa voix la plus douce :
« Debout jeune homme, il est plus que temps de te lever et de te rapprocher de moi… pour parler tactique ! »