Valdemar > Relais et Casernes

[RP d'intro Justina] Terre d'asile

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Conteur:
Rafalentha avait grandi en entendant les mêmes contes. Mais lui y avait toujours vu l’exact reflet de la vérité. Valdemar était un pays fondé sur des principes nobles, comme la confiance, le dévouement et la liberté. En passant la frontière, Rafalentha n’avait pas été surpris du climat de sérénité dans lequel vivaient les gens. Il avait spontanément fait confiance aux Hérauts, au désespoir de son frère qui percevait sans doute mieux la réalité complexe qui régissait le pays. À Valdemar, l’honneur était une vertu première, la vérité aussi. Mais pour les Hérauts, la sauvegarde du pays prenait le pas sur tout le reste. S’il fallait mentir ou utiliser à son avantage une situation, ils le faisaient. Pas tous, évidemment. Nombre de Hérauts étaient dotés d’une morale trop rigide pour répondre aux impératifs dictés par la réalité. Les autres, plus rares, occupaient des postes où le bon sens et un esprit retors étaient indispensables. Et c’étaient eux qui protégeaient le pays de lui-même.

Mais partout ailleurs, même parmi les soldats les plus cyniques, la confiance absolue était de mise. Si on leur affirmait qu’untel était honorable, ils l’acceptaient sans crainte, plaçant leur vie entre ses mains. Rafael en avait été d’abord abasourdi, puis honoré. Malgré son absence de rang officiel dans l’armée de Valdemar, les soldats lui obéissaient comme s’il était un de leur officier supérieur. Une fois, on l’avait mis à l’épreuve, pour tester sa fermeté et son aptitude à diriger. Depuis, aucun n’avait jamais remis en question sa stratégie, sauf quand réellement elle devait l’être.

Alors que le prince Rafalentha méditait tout cela, le Héraut Rickard s’en voulut d’avoir mal formulé sa question. Il n’était pas habitué à utiliser l’Enchantement de Vérité. Il l’avait appris, lancé quelques fois, mais plus depuis son année de probation. Il faisait partie de ces Hérauts qui s’occupaient moins de justice de que stratégie militaire, et il avait passé la majeure partie de ses affectations dans des casernes frontalières.

À cause de cette question mal posée, la jeune fille répondit à côté. Malgré cela, la lumière ne vacilla pas. L’Enchantement de Vérité ne pouvait résoudre les problèmes de communication. Justina ne semblait pas avoir compris qu’on lui demandait ce qu’elle recherchait en venant à Valdemar, ce qu’elle comptait y faire, pas pourquoi elle y était venue. Cela ils le savaient déjà. Ils avaient interrogé les villageois, et leurs récits concordaient en tout point.

« Vous n’avez pas répondu à ma question... mais je me suis sans doute mal exprimé. Je ne vous demandais pas comment ni quel évènement vous a poussé à venir à Valdemar. Je vous ai demandé ce que vous recherchez en venant ici. Ce sont vos motivations qui m’intéressent, pas les évènements. »

Il attendit qu’elle réponde correctement à la question, puis il enchaîna.

« Vous êtes spontanément venue à Valdemar. Pourquoi ? Vous auriez pu passer en Karse, qui est neutre dans ce conflit. Quelqu’un dans votre entourage vous a-t-il dit que Valdemar accueille tous les réfugiés ? Dans une conversation par exemple. Avez-vous été d’une quelconque manière envoyée ici, ou poussée à venir ici ? »

Rafael fronça les sourcils à ces questions étranges. Puis il comprit. Rickard craignait que la jeune femme ne soit qu’une poupée de plus entre les mains des mages.

Justina Aléra:
Justina attendait avec calme et patience le jugement que le Héraut donnerait sur elle, tout du moins sur ce point, elle était calme, car pour la première fois depuis le début de la guerre, elle était certaine de son action, même si elle ne l'avait pas été des méthodes employées, elle savait qu'elle avait fait ce qui était bien et juste. Pourtant, elle se trouvait devant l'un de ses réputés Héraut et elle découvrait que le jugement qu'il poserait sur elle avait beaucoup d'importance. Personne n'aurait dû être surpris qu'il y ait eu une mauvaise compréhension de la question, après tout le valdemaran n'était pas la langue natale de la jeune écuyer. Elle dut réfléchir une seconde au pourquoi elle avait fuit à Valdemar, pourquoi elle y avait conduit ses villageois, alors qu'elle avait principalement suivi son instinct. Pourquoi en effet?

« J’ai choisi de les conduire ici pour plusieurs raison.»

Elle choisissait ses mots avec soins pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, pour qu'il n'y ait pas de mauvaise compréhension de sa réponse, elle voulait être le plus clair possible.

« La première raison est stratégique, Valdemar était plus près que Karse, j'y connais mieux la langue et je connaissais mieux la forêt dans cette partie que celle vers Karse, bien que j'aurais pu les y conduire aussi.»

La raison la plus importante, restait malgré tout les contes de son enfance et son rêve de Justice.

« La seconde raison est plus égoïste, je dois l'avouer. J'ai toujours voulu rencontrer un Héraut, toute mon enfance, j'ai voulu ressembler aux Chevaliers et aux Héraut des contes de ma nourrice. Quand la situation c'est présenté, j'ai voulu croire de nouveau en ses contes, que si mon pays se perdait, perdait son âme et son honneur, que si la guerre avait été déclarée, que si le Régent nous avait menti et si le Prince et Roi légitime avait fuis vers vous, c'était parce que la vérité s'approchait des contes. Je voulais une chance de réparer mes erreurs de jugement et croire encore qu'il y avait une chance pour moi d'être la femme que je veux être, même si ce n'était pas dans mon pays.»

C'était une longue tirade, pendant laquelle elle avait regardé le Héraut dans les yeux, car ne disait-on pas qu'ils étaient la fenêtre de l'âme? Durant toute sa tirade, elle avait gardé la tête haute et la lumière n'avait jamais vacillé. Ses paroles venaient du fond de son cœur, parce qu'elle se rendait compte de la véritable raison qui l'avait poussé à choisir Valdemar au fur et à mesure que les mots coulaient de sa bouche, directement de son cœur à la bouche.

La seconde partie du questionnement était plus difficile à répondre, parce que si elle avait été manipulée, elle n’en avait pas vraiment l’impression.

« Je suis venue spontanément. Je n'ai pas souvenir d'avoir été aiguillé d'une quelconques façon, autre que les contes de mon enfance, pour venir ici. La seule personne à avec qui j'en ai parlé, as été le guérisseur pour savoir si les villageois qui avaient été blessés serait en mesure de nous suivre jusqu'ici. Si il n'avait pas pu le faire, j'aurais trouvé un endroit où nous cacher jusqu'à ce qu'ils puissent faire le voyage, je n'aurais laissé personne pour subir les conséquences qui n'aient pas choisie de tenter sa chance avec Rethwellan.»

Elle n'avait pas même laissé le choix de Karse au villageois. Elle se sentait responsable d'eux, à moins qu'il ne l'ait délit de cette responsabilité. Elle leur avait donc donné le choix de trouver refuge ailleurs en Rethwellan ou de la suivre en Valdemar.

Conteur:
L’Enchantement de Vérité n’avait aucune utilité quand il était question d’opinions et non de faits. La lumière bleue ne vacilla pas quand Justina exposa les éléments rationnels qui l’avaient poussée à venir à Valdemar. Elle ne trembla pas non plus quand elle parla de ses rêves. Le sort ne pouvait juger ni de leur véracité ni de leur fausseté.

La deuxième question ne perturba pas davantage la jeune fille, et la lumière resta vive sur ses traits. Le Héraut Rickard en était soulagé. Ce n’était certes pas une garantie parfaite. On pouvait lui avoir fait oublier l’événement, un mage aurait pu implanter un programme en elle comme cela avait été fait pour d’autres. Mais si c’était la cas, il n’y avait aucun moyen d’en être certain, et ils ne pouvaient pas emprisonner des innocents par crainte de les voir se retourner contre eux.

« Que comptez-vous faire maintenant que vous avez mis ces villageois en lieu sûr ? Quelles sont vos intentions ? »

Tous avaient bien entendu qu’elle espérait peut-être servir Rafalentha. Mais tous, à l’instar du Prince, la trouvaient trop jeune pour un tel poste, et surtout, personne ne souhaitait la garder si près du front. Elle serait envoyée probablement à Haven, et confiée aux bons soins d’un officier quelconque. Elle était officiellement trop jeune pour faire partie de la garde, mais ils pourraient toujours s’arranger.

Rafalentha se pencha sur le Héraut Rickard pour lui glisser une suggestion à l’oreille. Celui-ci hocha la tête et se mordit la lèvre, d’un air coupable. Il n’avait pas pensé à une question aussi essentielle et s’en voulait.

« Vous vous êtes présenté à nous sous le nom de Justina Aléra. Or, le prince m’informe que ce n’est pas un nom... fréquent, dirons-nous, parmi les nobles de votre pays, qui affectionnent particulièrement les prénoms à rallonge. Est-ce réellement votre nom ? Déclinez votre véritable identité. »

Rafael s’était d’abord demandé si Justina n’était pas un diminutif quelconque pour un prénom plus traditionnel, mais il n’en avait trouvé aucun qu’il aurait raccourci de la sorte. Et même si réellement, Justina était le diminutif d’un vrai prénom, ils avaient besoin de son identité complète pour les registres. Qu’importe comment elle se faisait appeler par la suite.

Justina Aléra:
Que comptait-elle faire? Elle n'en était pas certaine. Le prince lui avait fait savoir qu'elle était trop jeune pour servir sur la frontière. Elle ne s'y était pas attendu, elle qui avait commencé très jeune son apprentissage et elle était écuyer depuis un certain temps déjà. Différent pays, différente coutume. Elle devait désormais vivre selon les lois de Valdemar et jusqu'à maintenant, elle les trouvait juste.

« J'aimerais surtout finir mon apprentissage. J'étais l'apprentie d'un maître d'arme, est-ce que vous croyez que l'un de vos chevalier ou alors le maître d'arme de votre armée prendrait une apprentie? Le prince m'a dit que j'étais trop jeune pour votre armée, mais le suis-je aussi pour continuer ma formation? Vos Héraut ne se font-ils pas enseigner les armes à l'âge qu'il sont choisis?»

Elle savait un peu ce qu'était le choix, si les contes étaient vrais sur ce point comme sur les autres. Elle avait toujours adoré les contes de Héraut, surtout ceux qui étaient élue jeune. Et honnêtement, elle ne voyait rien d'autre qu'elle voudrait faire. À quel âge pouvait-on se faire recruter dans ce pays? Elle n'avait aucune envie de devenir mercenaire et de vendre ses services, bien qu'elle le ferait si elle n'avait pas d'autre choix, mais elle ignorait tout du fonctionnement interne de la guilde, sinon que certaine compagnie avait un code d'honneur. En désespoir de cause, si elle ne pouvait défendre des gens et la justice, elle rejoindrait sans doute une compagnie comme les Éclairs, qui travaillait toujours du côté des défenseurs et des opprimés. Mais elle espérait sincèrement ne pas en arriver là, elle ne voulait pas vivre sur les routes et aux crochets de guerre continuelle, elle voulait défendre la paix et des valeurs. Elle ne voulait pas vivre simplement que pour les armes.

La guerre entre Rethwellan et Valdemar, puis sa désertion, lui avait fait perdre ses illusions quand aux noblesses d'une guerre et d'une vie de combat fondé sur un désir vain de gloire. Son arrivée à Valdemar, quant à elle, lui avait fait perdre ses illusions quand aux fait que la paix et la justice pourrait jamais se faire complètement sans armes, ni combat. Parfois, il fallait savoir prendre les armes pour défendre ceux qui ne le pouvaient pas, ou pour défendre ce qui se devait de l'être.
Elle rougie légèrement devant la question que le prince avait soufflée au Héraut et le regarda une seconde avec une certaine amertume. Ne pouvait-il pas au moins lui laisser prendre le nom de son choix?

« C'est assez compliqué. Je suis née Cécillianelle Aléra, mais à l'âge de six ans, mon frère jumeau et moi avons échangé nos identités. Sur son lit de mort, il m'a demandé de faire honneur à son nom et de l'utiliser pour veiller sur notre mère, je l'ai gardé depuis ce temps. J'ai été Justinsino plus longtemps que je n'ai porté le nom de ma naissance. De plus, je n'ai jamais aimé cette coutume de donner des noms aussi longs aux gens. C'est une véritable confusion sur un champ de bataille et sur le papier.»

Elle gardait une certaine rougeur sur ses joues. Que penserait le Héraut du fait qu'elle avait portée si longtemps le nom de son défunt frère? Elle-même pensait bien plus à elle-même en tant que Justin qu'en tant que Cécillia ou Lia, comme l'appelait sa mère. La pensée de sa mère lui fit tourner la tête légèrement pour qu'on ne voit pas le trouble qu'elle ressentait. Qu'adviendrait-il de cette femme douce et aimante que la vie n'avait fait que torturé? Serait-elle privé de tout parce qu'elle-même avait déserté? L'une des raisons pour laquelle elle avait enterré son frère sous son identité à elle était pour que leur mère puisse gérer les affaires de la famille. Sans un fils pour hériter tout aurait été beaucoup plus compliqué pour tous. Elle n'aurait pu rester à Rethwellan avec ce qui advenait de son pays, mais avait-elle condamné sa mère à cause de cela? Mère et fille ne s'était jamais vraiment comprise, mais Justina ne voulait pas condamner cette femme innocente qui lui avait donné le jour pour son code d'honneur.
Perdu dans ses pensées, elle attendait le verdict du Héraut.

Conteur:
Le Héraut Rickard n’était pas habitué à ce qu’on le questionne quand il tenait un interrogatoire sous Enchantement. Il mit quelques instants à réaliser qu’elle lui avait à son tour demandé quelque chose.

« Si. Mais le maître d’armes choisit lui-même ses assistants, personne ne peut lui imposer un apprenti. Quoi qu’il en soit, c’est à Haven que ces décisions seront prises. Si vraiment vous désirez persévérer dans le métier des armes... eh bien c’est là-bas qu’ils décideront s’ils vous gardent. »

Rickard avait beau vivre au contact de l’armée depuis longtemps, il en connaissait mal les fonctionnements internes. Il ne savait pas ce qui était faisable ou pas. Et il n’osait pas prendre des décisions qui engageraient l’armée.

Quand la jeune fille déclina se véritable identité, Rickard entendit le greffier, ou celui qui en tenait le rôle, griffonner furieusement sur sa page. Sans doute raturait-il les lignes précédentes pour y mettre le véritable nom de leur invitée.

Rafalentha fronça les sourcils. Tant qu’il pensait qu’Aléra était un pseudo, il n’avait pas de raison de chercher à identifier ce nom. À présent, il fouillait dans sa mémoire pour tenter de situer cette famille. Il avait dû apprendre les noms de toutes les grandes familles nobles, et il avait rencontré des membres de la plupart d’entre elles. Le Prince était certain que la famille Aléra n’en faisait pas partie. Ce devait donc être une famille de petite noblesse. À Rickard qui l’interrogeait du regard, Rafael ne put répondre que par un haussement d’épaules. Peut-être Alemdar saurait-il qui était le père de la petite, si celui-ci avait servi dans l’armée.

« C’est une coutume comme une autre. Nous ne sommes pas ici pour en juger. Quoi qu’il en soit, si vous tenez à votre pseudonyme, ça ne pose pas de problème, tant que vous continuez à répondre à votre véritable nom dans les registres officiels. » Il fit une petite pause pour retrouver le fil de son interrogatoire. « Avez-vous déjà été en contact avec des mages ? Et plus précisément des mages noirs ? Avez-vous déjà combattu à leur côté ? Que savez-vous d’eux ? »

Rickard était partagé quant à ce qu’il aimerait entendre. À la fois, il aurait voulu en apprendre plus sur ces mages, à la fois, il espérait que la jeune fille s’était tenue à distance, car si elle les avait fréquentés, elle serait étroitement surveillée jusqu’à ce qu’on soit certain qu’elle n’était pas sous leur coupe.

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